Ronde, et alors?

Non au body shaming d’Alexa Moreno

Scrutés, analysés, soupesés: les performances et les corps des athlètes sont sous les projecteurs durant les Jeux olympiques. Horrifiée par les commentaires sur la gymnaste mexicaine Alexa Moreno, Joanie Pietracupa veut que l’on cesse le body shaming des sportifs.

Joanie-bandeau

Avez-vous suivi assidûment les Jeux olympiques? Étiez-vous de ceux qui ont eu le regard visé à l’écran de leur téléviseur entre le 5 et le 21 août ? Avez-vous lâché des cris aigus — de bonheur, de rage, d’angoisse, de tristesse — au moindre mouvement des athlètes à Rio? Pas moi. Pas que leurs performances ne m’intéressent pas, je me tiens au courant des scores, des exploits et des événements marquants sur les réseaux sociaux, mais toujours avec un petit délai. Je m’émeus et je me fâche aussi devant les beaux et les moins beaux moments vécus par les sportifs, leurs entraîneurs et leurs familles, mais simplement pas toujours en direct.

Le fait de s’informer sur Facebook et Twitter vient toutefois avec les commentaires des internautes – parfois intéressants et pertinents, souvent perturbants ou irrévérencieux. Si c’est sur Twitter que j’ai visionné l’excellente vidéo d’Elizabeth Plank sur la couverture médiatique pour le moins sexiste des JO, c’est aussi là que j’ai lu des commentaires absolument ignobles à propos de la silhouette de la gymnaste mexicaine de 22 ans, Alexa Moreno.

Petite mise en contexte: Alexa Moreno a participé aux phases éliminatoires à Rio en poutre, barres asymétriques, sol et en saut. Elle s’est hissée à la 31e place, et n’est donc malheureusement pas allée plus loin dans les compétitions. Pas de quoi en faire un plat, non? Semblerait que oui. Il faut croire que sa silhouette légèrement plus enrobée que les autres athlètes de sa discipline a choqué, voire dégoûté, des tonnes de gens à travers le monde. J’ai lu des critiques assez acerbes à son sujet, merci. Certaines l’ont comparé à un cochon ou encore à une compétitrice de concours de hot-dogs. D’autres ont expliqué sa présence par l’obligation de «remplir des quotas». Quelqu’un a même écrit, et je cite: «Alexa Moreno a le corps de deux gymnastes en un. Un régime avant d’aller aux Jeux olympiques aurait été bienvenu.»

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Je vous mentirais si je vous disais que je n’ai pas eu un haut-le-cœur en lisant ça. Que mes yeux ont saigné de l’intérieur. Que mon sang a bouilli dans mes veines. Que j’ai serré les poings jusqu’à laisser des traces d’ongles à l’intérieur de mes mains. Mais que se passe-t-il avec le monde? Avons-nous tous perdu la tête? Une foule d’idées me viennent en tête quand je repense à ça.

1) De quel droit nous permettons-nous de critiquer le corps de quelqu’un autre? Quelqu’un d’autre qu’on ne connaît ni d’Ève ni d’Adam, et dont l’existence n’a aucune incidence sur nos propres vies?

2) De quel droit nous permettons-nous de critiquer la silhouette d’une athlète olympique qui pratique la gymnastique à raison de plusieurs heures par jour depuis qu’elle a trois ans? Nous qui sommes pour la plupart incapables de toucher nos orteils, encore moins de faire un salto arrière sur une poutre?

3) Qui donc nous a un jour donné le droit de nous moquer des autres sans conséquences et sans qu’on éprouve le moindre remords? Le Dieu tout-puissant des Internets, c’est ça?

Photo: Presse canadienne/Morry Gash

Photo: Presse canadienne/Morry Gash

On va se le dire une fois pour toutes et on va tâcher de se le répéter jusqu’à la fin de nos jours: le body shaming, soit le fait d’humilier quelqu’un à cause de la forme ou de la taille de son corps, ne devrait pas exister. Que l’on juge qu’une personne est trop maigre (thin shaming) ou qu’elle est trop grosse (fat shaming), il ne faut ni le faire dans la vraie vie ni sur le web, que cette personne soit un proche ou un étranger. Ni hier, ni aujourd’hui, ni demain. Je n’ose même pas imaginer l’étrange mélange de peine et de colère qui a dû s’emparer d’Alexa Moreno quand elle a appris que des inconnus des quatre coins du monde avaient aussi méchamment critiqué son poids. Déjà qu’elle devait être très, très, très déçue de ne pas s’être qualifiée pour la compétition de ses rêves…

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Je l’ai déjà dit dans le passé et je le redis aujourd’hui: j’ai hâte qu’on arrête de se comparer, de se juger, de se critiquer et de s’humilier, en solo ou entre nous, par rapport à notre apparence physique. Ça n’apporte rien de bon ni de positif dans nos vies. On est tous différents les uns des autres et je crois réellement que c’est ce qu’on a de plus beau en tant qu’être humain. Vive les gens maigres, gros, minces, ronds, délicats, forts, musclés, chétifs… Vive la différence! Parce qu’après tout, il faut de tout pour faire un monde, même – et surtout – des Alexa Morano.

Suivez Joanie Pietracupa sur Twitter (@theJSpot) et Instagram (@joaniepietracupa).

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