Blogue La course et la vie

Une entrevue avec Pascale Létourneau, marathonienne

C’est la fille qui m’a inspirée à courir.

Pascale Létourneau, c’est la fille qui m’a inspirée à courir.

Je la regardais aller, et je me disais : «cette fille est magnifique». Forte, aimante et généreuse, cette mère de deux ados est une femme accomplie et une splendide coureuse. La regarder tout donner sur les derniers kilomètres d’une course, c’est recevoir une leçon de détermination et de puissance au service d’un objectif, le sien.

Elle a obtenu sa qualification (difficile) pour le marathon de Boston à son premier marathon (Ottawa 2013, à 46 ans), ce qui est exceptionnel.

L’air de rien, sans pousser, sans faire la morale, Pascale a réussi à me convaincre que si je me donnais la peine de quitter ma chaise longue et d’enfiler une jupe de course (elle aime les jupes), je pourrais, moi aussi, me mettre à la course.

– Tu crois, Pascale?

– Oui, fille.

Pascale est beaucoup trop fine pour donner des ordres, mais c’était dit avec assez de fermeté pour que j’aille acheter une jupe de course. C’est ça, le pouvoir d’une femme inspirante.

Rien ne me fait donc plus plaisir que de vous la présenter.

1)   Tu dis que ton père a été ta première inspiration. Raconte un peu…

C’était en 1979, la première édition du Marathon de Montréal… un grand événement. Papa s’est entraîné tout l’été avec un groupe de coureurs qui s’appelait ‘’Les Jog coeurs’’. Le jour du marathon,  j’ai eu la chance de courir avec lui les deux derniers kilomètres et papa a franchi la ligne d’arrivée en 04:26. C’était magnifique…

Marathon papa, Anik et moi

2)   Qu’est-ce qui te poussait à courir plus jeune?

Hum… Je n’étais pas très bonne en athlétisme à l’école, plus particulièrement les sprints où j’étais pas mal la dernière. Mais je me suis rendu compte un jour, que je pouvais « toffer » longtemps, que ça calmait le tumulte intérieur qui m’habitait.

Et quand j’ai eu mon premier chum à 16 ans (mes parents ne voulaient pas) je courais jusque chez lui (6 km aller/retour) pour aller frencher!

« Tu n’es pas obligé de l’écrire ça », m’écrit-elle, avec un bonhomme sourire.

Tu parles que je vais me gêner, Pascale! Le « french » est une excellente raison de se mettre à la course!

3)   Est-ce que tes motivations ont changé avec les années?

Hum… voyons voir.

Je ne cours plus pour aller frencher (quoique… j’haïrais pas ça!)  Mais je cours pour le bien-être et les bienfaits que ça me procure. Et puisque je suis une gourmande, la course est excellent moyen de brûler des calories vite fait bien fait!

4)   Tu m’as déjà dit que courir t’avait aidée à traverser des épreuves.

Comme tout le monde, j’ai traversé des épreuves au fil du temps, mais grâce à la course à pied, je n’ai jamais eu recours aux antidépresseurs. La course c’est ma drogue. Quand je ne cours pas depuis un long moment, je le sens physiquement et intérieurement.

À certains épisodes difficiles, je courrais deux fois par jour… pour m’aider à traverser ces moments.

5)   Je sais que longtemps, tu n’as pas voulu participer à des courses « officielles ». Pourquoi?

Entre ma première course officielle au secondaire et mon premier demi-marathon, il s’est écoulé 23 ans. Je n’en ai jamais senti le besoin. J’ai toujours couru seule. Les courses officielles, ça m’angoisse… Pourtant le feeling avant, pendant et après une course officielle est absolument extraordinaire: tout le monde est heureux, joyeux, amical, que ce soit les coureurs, les organisateurs, les bénévoles et la foule, jamais vu d’air bête là! Y’a pas grand événement aussi énergisant… Et l’après-course c’est tout simplement grisant.

6)   Qu’est-ce qui t’a fait changer d’idée et qui t’as motivé à t’inscrire?

Je m’étais fait la promesse que je ferais un marathon à 40 ans… Je l’ai fait six ans plus tard.

7)   En quoi est-ce que la femme en toi a été changée par la course?

Est-ce la course qui m’a changé ou simplement la vie… Je ne sais pas trop. Je n’ai pas trop analysé ça. Pour moi courir c’est un mode de vie.

8)   Qu’est-ce qui t’as été le plus bénéfique?

Le bien-être et l’équilibre que ça me procure. Les endorphines… c’est bon! C’est difficile à expliquer, ça se vit…

9)   Quelles qualités de la femme que tu es ont les plus bénéfiques à la coureuse?

Je dirais que c’est plutôt l’inverse… La course à pied m’a permis de développer la discipline, la patience, la détermination, le courage et la persévérance.

10)  Un moment de course que tu as trouvé particulièrement difficile?

Le Tour du Mont-Royal Brébeuf. Ma course la plus difficile à vie…  Je n’ai pas encore assimilé les côtes (mais c’est un circuit magnifique)!

11)  La course dont tu es la plus fière?

Mon premier demi-marathon en 2006 où j’ai franchi le fil d’arrivée avec Jacqueline Gareau. C’était magique… pour moi du moins. Madame Gareau, elle, était blessée et m’a dit : on va le finir ensemble, fille, suis-moi!!! Merci. Elle m’a « tirée » du 17e kilomètre jusqu’au Stade à un pace de 04 :15 – 04 :30 (man, c’était duuuur). Arriver dans le Stade et être accueillie sous les applaudissements de la foule (destinés Madame Gareau) et recevoir toute cette énergie en plein plexus, j’en suis encore émue!!!

Pascale & Jacqueline

 

12)  Beaucoup de coureurs ont des rituels au moment d’une course. Tu en as?

Euh non j’en ai pas… plate de même. Je devrais sans doute ça m’aiderait sans doute à gérer mon angoisse!

13) Aux adolescentes qui ne font pas de sport parce qu’elles trouvent que ça les rend laides (sueurs, cheveux ébouriffés, rougeurs) tu dis quoi?

Au contraire… Courir ou pratiquer n’importe quelle activité physique, ça rend une fille plus belle! La peau est oxygénée, les yeux sont pétillants, ça fait du bien au corps… pis les gars aiment ça des filles actives. Demandez-leur pour voir!

14) Se qualifier pour Boston à son premier marathon, c’est exceptionnel. Est-ce que cette fierté a eu un impact sur le reste de ta vie?

Pas tant exceptionnel si on considère que je me suis préparé pendant 30 ans. C’est après une soirée post-marathon que j’ai commencé à regarder les temps de qualification pour Boston. Quand j’ai compris que ça se pouvait, le vrai travail de préparation (les nombreux entraînements) et la visualisation ont commencé.

L’impact dans ma vie? Ça donne de la confiance, la confiance que les seules limites qui existent sont celles que l’on se fixe.

15)  À trois mois de prendre le départ du marathon de Boston, tu te sens comment?

Angoissée, nerveuse, excitée, pis des fois je me dis, pourquoi je me suis embarqué là-dedans? Ah oui, c’est vrai, j’aime ça courir tsé! C’est la raison pour laquelle je ne fais que peu de courses officielles. Ça me stresse trop. L’entraînement pour un marathon, c’est d’la job. Le marathon c’est d’la job itou, mais c’est l’accomplissement du travail bien fait avant.

Boston, cette année, c’est symbolique en raison des tristes événements de l’an dernier. Je suis fière de pouvoir me retrouver avec cette communauté pacifique que sont les coureurs… Mais c’est aussi pour ma mère et mon père. Maman, la petite warrior parce qu’elle a lutté et gagné son combat contre de multiples cancers et que c’est de l’endurance et beaucoup de courage, et Papa parce qu’il l’a épaulée tout au long de son parcours et aussi, parce que c’est grâce à lui si j’ai eu la piqure de la course.

Alors Boston, c’est pour eux que je vais le courir.

16)  Tu dis quoi à une coureuse qui commence?

Go fille, mets tes runnings, fais-toi une couette, pis vas-y… Va sentir ton corps bouger, ta respiration s’activer, ton sang courir (lui avec) dans tes veines, tu vas triper… Peut-être pas au début et tu vas apprendre à te connaître. Doucement au début. Mais y’a juste l’habitude qui fait en sorte que ça devient plus facile.

Pis courir c’est hautement addictif, n’est-ce pas Geneviève?

Tout ce que j’ai à répondre, Pascale, c’est « Go, fille »!

Prémarathon

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