Livre du mois

Six degrés de liberté, de Nicolas Dickner

Le troisième roman de Nicolas Dickner est un fabuleux jeu de piste où l’on retrouve avec bonheur l’auteur du foisonnant best-seller Nikolski.

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L’histoire

À Montréal, un conteneur disparaît du radar du transport maritime. Craignant l’acte d’un « Al-Qaïda canadien », toutes les polices se mobilisent pour mettre la main sur ce mastodonte réfrigéré baptisé Papa Zoulou. Sur ses traces vont se croiser des enquêteurs non autorisés et drôlement allumés. L’auteur emprunte le mode du thriller pour raconter une extravagante odyssée.

Les personnages

Lisa et Éric, amis « à la vie à la mort » depuis l’enfance. Lisa, jeune femme réfractaire à la banalité réductrice de l’existence, recherche « l’antidote au vertige originel ». Éric, prodige informatique agoraphobe, claustré dans un loft au Danemark, devient un entrepreneur multimilliardaire. Jay, ancienne fraudeuse reconvertie en agente de la GRC, change d’identité comme de tailleur ; elle a habité un temps à Tête-à-la-Baleine (clin d’œil à Nikolski).

On aime

Le conteneur comme machine à rêver, poétique et subversive, grâce à la finesse de l’auteur. L’humour réjouissant et incisif de ce dernier. La bulle de tendresse dans laquelle il enferme les deux aventuriers. Le rythme fébrile de la narration.

À LIRE: un extrait de Six degrés de liberté

Photo: François Couture

Photo: François Couture

L’auteur

Nicolas Dickner

Né à Rivière-du-Loup en 1972. Après ses études, il voyage au Pérou, en Allemagne (d’où est originaire sa famille). Retour à Québec où, en 2005, il publie un premier roman, Nikolski, qui remporte plusieurs prix et est traduit en une dizaine de langues. Suivront Tarmac, en 2009, et Révolutions, en 2014, écrit avec Dominique Fortier. Avec sa femme et leurs deux enfants, il s’installe à Montréal, où leurs effets ont été acheminés par conteneur. Est-ce là l’étincelle de laquelle a jailli ce dernier roman ? Il faut chercher ailleurs. « Tout a commencé par Fish Story, le livre qu’Allan Sekula [photographe et écrivain américain] a consacré au monde du transport maritime. C’est là que j’ai compris que le conteneur n’est pas qu’économique ou industriel, mais qu’il a une portée politique, imaginaire et domestique. » Et l’imaginaire, chez Nicolas Dickner, est un riche, très riche terreau… 

Éditions Alto, 392 pages

Les critiques:

1- Marielle Gamache

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Ce que j’ai aimé : Tout. À commencer par le récit soigné, méticuleux qu’a construit l’auteur, qui y va de tout son arsenal littéraire – descriptions justes, comparaisons imagées – pour imprégner le lecteur de son univers singulier, tel un réalisateur de cinéma. L’histoire est habilement ficelée, ludique, les personnages sont originaux et bien caractérisés. Captivant et émouvant.

Ce que j’ai moins aimé : J’ai beau vouloir trouver un quelconque bémol à ce bouquin, je n’y arrive pas.

Autres commentaires : C’est l’un des rares romans à m’avoir autant accrochée. C’est à mon sens un petit chef-d’œuvre, un bijou. À lire sans faute.

Ma note : 10/10

 

2- Émilie Côté

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Ce que j’ai aimé : La fluidité du roman. On se laisse porter par le récit sans nécessairement voir où il nous amène, et c’est ce qui fait son charme. Un pari réussi pour l’auteur : le chemin qu’on parcourt page après page importe plus que la finalité de l’histoire.

Ce que j’ai moins aimé : La confusion qui règne à certains moments entre les deux histoires qui ne se déroulent pas à la même vitesse.

Autres commentaires : C’est un roman d’une grande finesse où tous les petits détails finissent par s’imbriquer parfaitement dans l’histoire ; j’appelle ça un roman « Tetris ». Dans La Presse, l’auteur a dit de son livre : « Il est bâti comme si j’avais installé des dominos dans un gymnase pendant les deux tiers, et que j’avais donné une pichenotte dessus pour la dernière partie, pour regarder ça se vider. » Cela résume parfaitement la façon dont est construit ce roman d’une précision presque chirurgicale. On passe à travers un labyrinthe de détails dont aucun n’est insignifiant et, à la fin, on voit toutes les pièces assemblées, comme une grande carte du monde.

Ma note : 8/10

 

3- Yannick Ollassa

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Ce que j’ai aimé : La virtuosité de l’auteur. Son écriture précise, simple et limpide.

Ce que j’ai moins aimé : Au départ, l’intrigue autour des conteneurs ne m’a pas accrochée. Par l’entremise du personnage de Jay, j’ai fini par entrer dans la danse. C’est un roman très rationnel, cartésien. Bien que Lisa désire repousser les limites de l’expérience humaine, il n’en est pas question. Le récit se centre sur les aspects logistiques de son aventure.

Autres commentaires : Il s’agit d’une œuvre qui a dû demander un travail titanesque, tant dans la recherche et la structure que dans l’écriture elle-même. Tout est réglé au quart de tour. L’histoire est truffée de détails qui sont capitaux pour sa cohérence. Pour moi, ce roman est une réussite quant à la technique. Il n’a toutefois pas réussi à me fasciner au point d’en faire un coup de cœur.

Ma note : 7/10

 

4- France Giguère

francegiguereCe que j’ai aimé : L’originalité de l’histoire m’a tenue en haleine. J’ai aimé le style de l’auteur, son écriture fine et très vivante, ses personnages attachants, ses descriptions uniques et colorées. Exemple : « Deux techniciens s’affairent dans la fosse comme un duo de chirurgiens des enfers », en parlant d’hommes travaillant dans un escalier roulant.

Ce que j’ai moins aimé : J’ai décroché vers le dernier quart du livre, car l’intrigue tombait un peu à plat. Je ne croyais plus à l’histoire, qui me paraissait trop invraisemblable. Reste qu’en refermant le roman, j’ai ressenti une envie de liberté.

Autres commentaires : Très jolie page couverture.

Ma note : 8/10

 

5- Isabelle Goupil-Sormany

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Ce que j’ai aimé : Le propos est intelligent, bien fignolé et original. Les deux trames narratives du roman sont agréablement tissées dans des univers à la temporalité différée. Presque tous les paragraphes du roman se terminent par une phrase assassine, tantôt sur notre société de consommation, tantôt sur la vacuité de nos vies. Le roman offre ainsi d’innombrables clichés comme autant de petites vérités douces-amères savourées de manière coupable. Au-delà du fait extraordinaire que présente l’histoire, ses personnages partagent une douleur poignante et des obsessions plus grandes que nature.

Ce que j’ai moins aimé : Jay m’a parfois ennuyée, tout comme ses collègues de bureau dont les propos visaient surtout à narrer l’histoire du conteneur. Lisa et les personnages qu’elle côtoie sont mieux définis. Les habitants du Domaine Bordeur sont d’une richesse bien exploitée. Résultat : il y a parfois un décalage entre l’histoire de Jay et celle de Lisa en termes de qualité et d’intérêt de lecture.

Autres commentaires : Il s’agit d’une œuvre à l’écriture maîtrisée, mais surtout d’un travail descriptif exemplaire. Ce roman a un caractère cinématographique. Le rythme de lecture est soutenu. Je l’ai terminé avec mille et une images claires et bien circonscrites en tête.

Ma note : 9,5/10 – Un vrai coup de cœur

 

6- Julie Gagnon

juliegagnon

Ce que j’ai aimé : L’écriture de Dickner est très légère, aérienne. Malgré leurs malheurs, ses personnages ne sombrent jamais dans l’apitoiement. Le dénouement du roman est insolite et brillant.

Ce que j’ai moins aimé : Des noms, des colis livrés, des indices qu’il faut deviner… Le lecteur comprend qu’ils sont d’une grande importance, sans jamais savoir exactement pourquoi.

Autres commentaires : C’est une lecture que j’ai beaucoup plus appréciée que Nikolski, du même auteur.

Ma note : 8,5/10

 

7- Philippe Garon

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Ce que j’ai aimé : L’esprit de Dickner. Son intelligence va au-delà du montage cinématographique de l’histoire grâce au chassé-croisé de ses personnages et des situations insolites. Elle dépasse aussi l’utilisation habile de références culturelles et de détails truculents. Son humour est fin, et ses observations sur la société de consommation sont brillantes. Et que dire de l’ouverture presque métaphysique de l’aventure dans laquelle plongent les protagonistes ? Six degrés de liberté est un livre gigogne. Les métaphores y sont puissantes. Bien que Dickner ait son langage à lui, la qualité de ce texte me fait penser à Réjean Ducharme. Le tandem Lisa et Éric m’a rappelé les héros Ines Pérée et Inat Tendu. En refermant le livre, je me suis dit qu’il s’agissait d’un grand roman, peut-être de la trempe de L’avalée des avalés.

Ce que j’ai moins aimé : L’illustration de la couverture, trop représentative à mon goût. Le texte de la quatrième de couverture est, selon moi rebutant, à moins qu’Alto ne souhaite s’adresser exclusivement aux passionnés de lecture et aux aficionados de Dickner. Et, en passant, pourquoi une jaquette si c’est pour reprendre exactement le contenu de la couverture, surtout que le livre est déjà habillé d’un carton de belle qualité ?

Ma note : 9/10

 

8- Stéphanie Vincent

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Ce que j’ai aimé : Les pointes d’humour et d’ironie, le rythme, le foisonnement, les personnages, le point de vue du lecteur sur les histoires croisées.

Ce que j’ai moins aimé : Mon intérêt pour les conteneurs et les outils est au point mort.

Autres commentaires : Un roman sympathique que j’attendais et qui m’a beaucoup fait sourire. Une lecture où le quotidien dans ses moindres détails se voit transformé en aventure rocambolesque, quasi fantastique.

Ma note : 9/10

9- Stéfannie Larichelière

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Ce que j’ai aimé : Je suis tombée sous le charme des personnages agités de Dickner. J’ai apprécié le volet méticuleux de la mise en scène, ce chassé-croisé des destins, cette ligne de temps qui nous tient en haleine. C’est beau, tendre et humain. J’ai particulièrement aimé le personnage de Jay, ex-pirate informatique ironique.

Ce que j’ai moins aimé – ou si peu : C’est une lecture qui demande parfois de la concentration. Mais c’est très dynamique et au final, captivant.

Autres commentaires : J’ai tout lu de Nicolas Dickner. J’aime ses obsessions, sa structure, sa griffe. Il peaufine ses histoires et les construit de manière brillante.

Ma note : 9/10

 

10- Gabrielle Paquette

gabriellepaquette

Ce que j’ai aimé : Le roman de Dickner est passionnant, en plus d’être intelligent. J’ai particulièrement aimé les personnages d’Éric et Lisa, qui déjouent la morosité à coup d’expériences et de projets loufoques, mais réfléchis. Dickner manie les chassés-croisés et s’attarde au moindre détail avec beaucoup d’habileté. Son écriture est agréable, précise et efficace.

Ce que j’ai moins aimé : Le résumé du livre m’avait fait hésiter à en entreprendre la lecture. Mais j’ai rapidement été happée par le récit.

Ma note : 8,5/10

 

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