Entrevues

Ce que Louise Richer a appris

Fonder une école? Elle ne savait pas comment. Elle a pourtant créé l’École nationale de l’humour, qu’elle dirige depuis 25 ans.

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Une tête ordonnée peut cohabiter avec un chaos extérieur. Je suis bordélique. J’ai essayé de me corriger pendant 40 ans. C’est terminé. Je suis organisée à ma façon et je me retrouve toujours. Une certaine dose de chaos peut cohabiter avec une vision éclairée, une fine compréhension des choses. J’ai fait des entrevues d’embauche récemment ; en entrant dans mon bureau encombré, les candidats voyaient tout de suite avec quelle personne ils allaient travailler.

On n’a pas le droit à l’erreur, on a le devoir de l’erreur.  Parce que si on ne prend jamais le risque de vraiment se péter la gueule, on n’évolue pas. Donc, il faut se tromper dans la vie, essayer de nouvelles patentes. L’apprentissage passe par la déstabilisation.

Se faire organiser, des fois, c’est l’fun. Diriger, c’est bien. Mais être dirigée, se transformer en suiveuse, peut être jouissif. Lâcher prise, être juste disponible… Faire du voilier ou du parapente avec quelqu’un qui connaît ça, jouer au bowling, laisser quelqu’un décider de ce qu’on va manger pour souper…

On a besoin de dire des niaiseries. Rire ensemble, c’est du lâcher-prise, mais c’est également de la créativité. Et c’est un état d’alerte. Être présent à l’autre, l’écouter, rebondir sur ce qu’il vient de déclarer, jongler avec lui. C’est une communion, un pied de nez au surmoi aussi.

Le doute est le compagnon de route de l’ouverture. Pour certaines personnes, le chemin entre le point A et le point B est parfaitement droit. Moi, j’hésite, je mijote, je remets en question. Je préfère ça, malgré les souffrances que ça implique. Je trouve que les gens qui ne doutent pas sont souvent inintéressants. Le doute est incontournable si on veut progresser. Il nous ralentit, mais nous mène plus loin. Il apporte la nuance et nourrit le discernement.

Nous sommes des poupées russes. Toutes les personnes qu’on a été sont encore là, vivantes, à l’intérieur de soi. La petite fille qui veut bien faire, la bummeuse, la femme de tête, je tiens à les garder toutes et à les reconnaître. Parfois je considère la femme de tête trop préoccupée par le jugement des autres. Ou je dis à ma poupée de huit ans de me laisser tranquille. Ça permet de s’accepter, ça crée une distance, on est à la fois agissante et observatrice. Et ça nous amène à une saine autodérision.

Il faut faire confiance à ceux qui nous font confiance. Quand quelqu’un te confie un mandat qui t’apparaît comme un défi vertigineux, si tu valorises cette personne, fais-lui confiance. Mets de côté tes appréhensions. De l’anticipation à l’action !

Voyager avec une grosse valise, il n’y a pas de mal là-dedans. On entend souvent dire qu’il faut voyager léger… mais que choisir ? Au lieu d’hésiter entre trois articles, je les emporte tous les trois. Est-ce que je dérange quelqu’un ? Non. C’est moi qui la traîne, mon ambivalence.

Être gentil avec quelqu’un ne signifie pas qu’il faut l’épargner. Je valorise beaucoup la gentillesse. Mais pour aider quelqu’un, on doit pouvoir lui dire : « Ça, ce n’est pas bon. »  Combiner l’exigence avec la bienveillance.

La meilleure façon de dissiper un malaise, c’est de le nommer. Ce n’est pas un aveu d’incompétence, c’est un moyen de reconnaître ce qui se passe. Et souvent le point de départ d’une conversation intéressante. C’est trop lourd d’être en représentation tout le temps.

 

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