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Combien donner de pourboire (et à qui) ?

On a tous déjà été embêtés quant aux normes du pourboire. Doit-on laisser de l’argent à un massothérapeute ? Et quand on prend un plat pour emporter ? Voici quelques règles à suivre quand on veut respecter l’étiquette.

« Ma grand-mère disait toujours : “Dans le doute, on s’informe !”, c’est la même chose pour le pourboire », raconte Julie Blais Comeau, spécialiste de l’étiquette et auteure du livre Quoi dire, comment faire et quand ? (Béliveau Éditeur).  « On peut même demander, en prenant un rendez-vous, quel est le bon usage quant au pourboire dans l’établissement. De cette façon, il n’y aura aucun malaise au moment de payer. » D’autant plus que la pandémie a peut-être rouillé les habitudes des uns et des autres.

Guide pratique

Voici un petit aide-mémoire afin de savoir combien donner selon les corps de métier.

Serveur : 15 % de l’addition. Si on ne commande que des boissons, on donne 1 $ à 2 $ par consommation.

Coiffeur : 15 à 20 % de la facture. 1 ou 2 $ pour l’employé qui nous a lavé les cheveux. Si on a été pris en charge par plusieurs personnes (coiffeur, coloriste, etc.), on demande à ce que le pourboire soit réparti entre les employés.

Chauffeur de taxi : 15 % de la course plus 2 $ par bagage.

Massothérapeute : Environ 10 % de la facture ou 10 $ par heure pour les massages de relaxation. Si le massage est thérapeutique, on ne donne rien. On ne laisse pas de pourboire à une personne qui prodigue des soins de santé ou qui fait partie d’un ordre professionnel.

Livreur de restaurant :  15% de l’addition, avant les frais de livraison.

Femme de chambre : On laisse un pourboire si on reste plus de trois nuits. On donne alors entre 2 $ et 5 $ par jour. On s’assure d’en donner quotidiennement plutôt qu’à la toute fin du séjour. Comme plusieurs employés s’occupent de la chambre, chacun reçoit ainsi sa part et on obtient un bon service pendant toute la période d’hébergement.

Service au comptoir : On ne devrait pas laisser de pourboire puisque les employés obtiennent le salaire minimum et que le temps de contact est très court. Quand on paye avec une carte, le terminal propose parfois de laisser un pourboire. Il ne faut pas se gêner pour passer cette étape.

Barista : Pas obligatoire, mais si le barista est particulièrement attentionné et qu’on désire le remercier, on donne au maximum 10 % du prix du café.

Bon à savoir

Le pourboire devrait toujours être calculé avant les taxes. Or, les experts interrogés signalent que de plus en plus de terminaux de paiement calculent le pourboire après les taxes. La faute aux institutions financières ou aux commerces ? Mystère. Quoi qu’il en soit, « les consommateurs se retrouvent donc à laisser plus de pourboire qu’ils ne le pensent », souligne François Pageau, professeur en gestion de la restauration à l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec (ITHQ). Son conseil : sélectionner l’option dollars plutôt que pourcentage. À l’aide de la facture, on indique le montant correspondant à la somme des taxes provinciale et fédérale, ce qui correspond à 15 %. Ainsi, on est sûr de laisser un pourboire acceptable, tout en respectant son budget.

Pourboire et pandémie : comment s’y retrouver

« La perception que les gens ont de l’étiquette, c’est que c’est quelque chose de dépassé, de stagnant, alors qu’au contraire, ça évolue constamment », estime Julie Blais Comeau. Et la pandémie lui a donné raison, en floutant les règles déjà informelles du pourboire. En effet, lorsque les salles à manger des restaurant étaient fermées, beaucoup de consommateurs ont pris l’habitude de laisser du pourboire lorsqu’ils commandaient un plat pour emporter, ce qui n’était pas usuel auparavant.

Et maintenant que les restos peuvent de nouveau accueillir les clients, ceux-ci laissent des pourboires plus substantiels qu’avant. « Mes amis restaurateurs me disent que les clients n’ont jamais été aussi généreux en pourboire depuis la pandémie », souligne François Pageau, de l’ITHQ. En effet, selon une étude de l’entreprise Square, qui opère des terminaux de vente, les consommateurs canadiens ont laissé en moyenne 17,9 % en pourboire dans les trois premiers mois de 2022, alors que la moyenne pré-pandémie était de 16,6 %. Au Québec, le pourboire moyen a même atteint 18,1 %.

Cette générosité peut s’expliquer par l’enthousiasme des consommateurs à renouer avec leurs restos préférés et par leur désir d’encourager ceux-ci. « C’est devenu une façon d’exprimer notre considération pour les pertes d’emploi, le manque de revenus, la précarité », dit Julie Blais Comeau.

Or, François Pageau rappelle que ces dollars en extra vont dans les poches des serveurs, et non des restaurateurs eux-mêmes. Si son budget est plus serré, on peut donc y aller mollo avec la carte de crédit (offrir 15 % demeure tout à fait convenable), et trouver d’autres façons de contribuer à leur succès, par exemple en rédigeant un avis favorable sur les réseaux sociaux.

Et la livraison ?

Qu’en est-il des livreurs qui, plus que jamais, ont sillonné les villes pour nous apporter de bons petits plats réconfortants ? La convention veut désormais qu’ils se méritent un pourboire de 15 % (avant taxes, encore une fois). Si on utilise une application de livraison (les SkipTheDishes et Uber Eats de ce monde), François Pageau suggère d’inclure le pourboire lors de la transaction en ligne.

Une question de satisfaction ?

Quand on reçoit un bon service, il fait plaisir de remercier un employé en lui donnant un pourboire généreux, mais quand on n’est pas satisfait, l’envie de ne rien donner du tout est forte. Pour la spécialiste de l’étiquette Julie Blais Comeau, il serait plutôt inconvenant d’agir ainsi. « Au Québec, les employés du tourisme, de la restauration et des bars ont souvent un taux horaire inférieur au salaire minimum parce que leurs pourboires sont pris en compte. Si on ne donne pas de pourboire, l’employé ne reçoit pas son plein salaire. Il faudrait s’en tenir aux normes. »

Julie Faucher, professeure à l’Institut de tourisme et d’hôtellerie du Québec, a un point de vue différent à ce sujet. « Il n’y a pas d’obligation à donner un pourboire. Au Québec, on est un peu frileux à cette idée, mais les employés à pourboire doivent donner un bon service. Ça fait partie de leurs tâches. Si on est insatisfait, on n’est pas tenu de donner quoi que ce soit », nuance-t-elle.

À noter que le concept de pourboire est très nord-américain. En Australie, en Écosse ou en Italie, par exemple, un serveur peut être insulté de se faire donner de l’argent. Mieux vaut vérifier avant de partir, en consultant un guide de voyage ou en se renseignant dans un bureau d’information touristique du pays visité.

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