Société

Les entreprises et la conciliation travail-famille

La conciliation, les entreprises devront s’y mettre. Yves-Thomas Dorval, président du Conseil du patronat du Québec – représentant de tous les patrons d’ici – nous l’a certifié. Sa prédiction : tout va s’améliorer dès 2013. Patience, les filles !

Pourquoi les changements sont-ils si longs à venir ? Parce que ce n’est pas facile. Plus de 70 % de la difficulté vient de l’organisation du travail. Sur une chaîne de production, il faut assurer une présence continue ; un bureau doit pouvoir compter sur une réceptionniste toute la journée, tous les jours… Ensuite, il y a les coûts associés aux changements. Imaginez que vous êtes à la tête d’une petite entreprise. Au lieu d’avoir 6 employés à plein temps, vous en aurez plutôt 12 à temps partiel. Cela signifie que votre masse salariale va augmenter – à cause des coûts fixes liés à chaque employé. Cela implique aussi que vous aurez besoin de plus d’espace, ce qui coûtera plus cher. Une entreprise a toujours des concurrents. Tout ce qui génère des dépenses additionnelles n’est pas bienvenu.

Voilà pourquoi si peu d’entreprises font de la conciliation… On ne peut pas dire qu’il n’y en a pas. La majorité des grandes entreprises en font déjà sans problème. Et les congés parentaux, de maladie ou de décès existent partout… Mais c’est beaucoup plus difficile dans les PME. Le chef d’une petite entreprise lutte continuellement pour assurer sa survie. Les demandes de conciliation travail-famille peuvent devenir un objet de colère, surtout pour le patron qui travaille lui-même 70 heures par semaine.

Il doit bien y avoir des avantages pour l’employeur  ! Un employeur veut par-dessus tout attirer une main-d’œuvre de qualité et la retenir. On sait que les mesures de conciliation améliorent le climat de travail et réduisent le taux d’absentéisme. Si les employés sont satisfaits de leurs conditions de travail, la productivité augmente.

Le ministère de la Famille lance ces jours-ci une norme de conciliation travail-famille. Une bonne nouvelle pour les patrons  ? Oui et non. Le pire, c’est de les obliger à agir d’une certaine façon. Mieux vaut leur faire entendre des témoignages de chefs d’entreprise qui ont bénéficié de la conciliation travail-famille. C’est en tentant l’expérience qu’on voit les retombées positives. Si une employée accomplit en quatre jours presque autant de travail qu’en cinq parce que, la cinquième journée, elle a le temps de s’occuper de ses affaires personnelles, de ses rendez-vous chez le dentiste ou autres… eh bien, ça peut signifier un avantage économique pour l’employeur. Par contre, un patron pourrait insister pour avoir le même rendement en quatre jours qu’en cinq. Une situation qui pourrait devenir lourde pour la salariée.

Que réclament le plus souvent les travailleurs  ? L’automne dernier, nous avons fait auprès des chefs d’entreprise un sondage portant sur les demandes qu’ils recoivent en matière de conciliation travail-famille. Trois éléments ressortent  : les horaires flexibles, le travail à temps partiel et le nombre de semaines de vacances annuelles. Bref, du temps et de la souplesse.

Surtout que la conciliation travail-famille, ce n’est plus seulement l’affaire des femmes… Tout à fait. Les jeunes de la génération  Y n’ont ni les mêmes attentes ni les mêmes comportements que leurs aînés. Les jeunes professionnels arrivent beaucoup plus tard sur le marché de l’emploi. Après l’université, ils partent en voyage, font des stages à l’étranger… En même temps, ils savent qu’ils seront actifs plus longtemps que leur mère ou leur grand-père. Ils envisagent le travail comme un con­ti­nuum. À un certain moment, ils feront une pause pour avoir un enfant, pour vivre une expérience ailleurs… La conciliation ne veut pas dire travailler moins. Ça signifie travailler autrement (faire du télétravail, par exemple), à des heures différentes. Et il n’y a pas que les jeunes couples qui veulent harmoniser boulot et vie privée. Les travailleurs d’expérience aussi. Les employeurs cherchent une façon de les garder en tenant compte de ces besoins.

Que peut-on espérer au cours des prochaines années  ? À partir de 2013, il y aura plus de travailleurs qui partent à la retraite que de gens qui arrivent sur le marché du travail. Historiquement, le Québec a toujours connu un surplus de travailleurs par rapport aux postes disponibles. Ce sera bientôt l’inverse. Les employeurs devront trouver des solutions pour accommoder leurs employés. C’est une question d’offre et de demande.

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