Reportages

Toutoune inc.

La fondatrice de Sublimes Rondeurs a trouvé sa raison d’être.

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Photo: Julie Artacho

Maude Chartier-Paul vient de souffler 23 bougies. Les raisons de célébrer sont nombreuses : sa boutique, Toutounes atomiques, est un succès, elle a aussi trouvé l’amour… et perdu 100 livres.

Elle sort de son commerce de la Plaza St-Hubert vêtue d’une jolie robe de coton (une importation anglaise) à imprimé de geishas et de têtes de mort. Un vent coquin soulève l’étoffe fine, qu’elle rabat de ses mains en riant. La scène évoque Marilyn Monroe sur une bouche de métro. « Je n’ai pas de collant, je ne veux pas donner un show ! » Pas sur le trottoir, s’entend. Mais sur scène, n’importe quand ! Fondatrice d’une troupe burlesque (les Sublimes Rondeurs) qu’on a vue l’an dernier s’exécuter en p’tite tenue autour du chanteur Mika lors d’un gala dominical de Star Académie, Maude sait tout de l’art du strip-tease.

L’idée qu’une fille de 250 livres se déshabille devant public peut faire sourciller. Il faudra s’y habituer : elle n’a pas l’intention d’arrêter ni de camoufler ses sublimes rondeurs. « J’ai trouvé ma raison d’être : améliorer la vie des gens. C’est pour ça que j’ai ouvert Toutounes atomiques : pour qu’une femme qui entre dans ma boutique en ressorte heureuse parce qu’elle se trouve belle. Si tu savais le nombre de clientes qu’on aide ! »

L’entrevue se déroule près de son commerce, dans un café de la Plaza où, du comptoir, viennoiseries et gâteaux cochons lancent des œillades. Maude, qui a la dent sucrée, résiste à l’appel : « J’ai repris du poids dernièrement, je travaille beaucoup et je n’ai pas toujours le temps de cuisiner. Alors je fais attention. Et, grâce à l’anneau gastrique qu’on m’a posé, la sensation de satiété vient plus rapidement, alors je n’ai pas l’impression de me priver. » Elle a subi cette intervention délicate au début de 2012. À l’époque, son poids dépassait 350 livres ; en fait, il dépassait la limite de son pèse-personne électronique. « Il indiquait “Error”. » Maude a saisi le message, trouvé un chirurgien et est passée sous le bistouri. « Le poids, ce n’est pas qu’un chiffre, c’est la commodité. À La Ronde, par exemple, quand tu pèses 350 livres, le siège du Monstre ne se referme pas. »

Le chemin de l’acceptation de tout son soi a été long. « J’ai toujours été grosse. Je suis née (à Rosemont) dans une famille de gros. » Intimidation, rejet, insultes, humiliation : la jeune Maude a tout connu, tout subi, et pleuré toutes les larmes de ce corps qu’elle détestait. Le seul sport qu’elle pratiquait, c’était le yo-yo avec son poids. Un jour, elle a décidé d’être heureuse et d’arrêter de se haïr. « Quand tu arrives à t’aimer, tu as envie de prendre soin de toi, de ta santé, de vivre plus longtemps. »

Après avoir étudié en cinéma et en coiffure, Maude a constaté qu’elle n’était pas la seule consommatrice de mode jeune, bien enrobée et pas mal frustrée. « Quand il y a quelque chose de beau dans les chaînes de boutiques tailles plus, je l’achète et toutes mes amies aussi. Mettons que ça manque d’originalité. » Elle a flairé la bonne affaire, présenté le projet d’une boutique spécialisée dans un concours d’entrepreneuriat organisé par la Plaza… et remporté la bourse. Un an et des poussières plus tard, Maude voit grand, parle d’« exporter » Toutounes atomiques à Québec. Pour commencer. « Je le dis en riant, je veux me tailler un empire de toutounes. » Ce mot lourd de sens, qui l’a souvent blessée, elle en a fait son porte-étendard, question de le désamorcer. « Pour augmenter son estime personnelle, le premier pas, c’est de s’assumer. T’es toutoune ? Tu ne peux pas le cacher, les bourrelets sont là. Assume-les et viens magasiner ! »

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