Entre l’île et la tortue, par Karine Rosso
Triptyque, 186 pages.
Pour cette troisième œuvre littéraire, Karine Rosso a choisi l’écriture au « tu », qui permet un double point de vue. « Ça devient comme une voix intérieure distanciée qui est parfois dure, injuste, comme on peut se parler à soi-même », dit-elle. Avec sa plume précise et profondément émouvante, l’écrivaine et professeure de littérature nous fait voyager entre les mondes qui construisent son identité, l’Amérique du Nord et du Sud. C’est le confinement de 2020. Montréal vit au ralenti. La solitude est partout, la grisaille aussi. Quelque part dans le Mile End, la narratrice tente en vain d’écrire un roman à partir de ses souvenirs de voyage. En filigrane, un drame se noue. Une liseuse de cartes lui a un jour prédit la maladie. Son corps la laisse tomber. Elle risque de ne plus faire ce qu’elle a toujours voulu faire : écrire ce qu’elle voit, ce qu’elle vit, et le transformer en histoires.
Le Chagrin moderne, par Quentin Jardon
Flammarion, 240 pages.
Au début de ses vacances familiales, Paul Paliseul est pris d’une envie surprenante d’abandonner sa femme et son enfant. De les libérer de lui-même. Pourtant, il est celui à qui tout a réussi d’un coup. S’il souffre d’une chose, c’est de l’abondance de privilèges, du manque de défis dans sa vie; ils auraient pu l’aider à devenir plus résilient. Il y a quelques années à peine, il a connu une ascension peu commune dans le domaine de l’humour en Belgique… avant de redescendre de manière tout aussi abrupte. Clémence, sa compagne de toujours, le soutient, et il s’épanouit désormais dans la paternité. Alors pourquoi vouloir fuir ? À travers ce roman, le journaliste et écrivain Quentin Jardon tente l’autopsie du mal d’une génération : l’éternelle insatisfaction à l’ère du culte de la performance, dans un monde où tout nous est dû, à commencer par le bonheur.
Amiante, par Sébastien Dulude
La peuplade, 224 pages.
Éditeur et auteur de plusieurs recueils de poésie, Sébastien Dulude signe ici un premier roman solide où la beauté de la langue contraste avec la dureté des paysages miniers qu’elle décrit. Il nous amène à Thetford Mines durant l’été 1986, alors que Steve Dubois rencontre enfin « petit Poulin », qui deviendra son meilleur ami. Avec lui, il pourra être lui-même et bâtir un de ces univers secrets qui caractérisent l’enfance. « J’ai voulu explorer la tendresse et la proximité que permet l’amitié à 9 et 10 ans, avant que les codes sociaux viennent normer les comportements attendus des garçons », confie l’écrivain. Ensemble, les amis découvrent le territoire à vélo, dorment chez l’un et chez l’autre et construisent une cabane, quartier général de rêve pour deux jeunes garçons. Mais la tragédie frappe. L’été se termine par un deuil qui perturbera le reste de la vie de Steve.