Culture

Korine Côté: une saison pour suer

J’adore l’Été. Assez pour ne pas avoir d’air conditionné.

L’Été est ma saison préférée. Comme pour beaucoup, je suppose, mais je pense que je l’aime plus que les autres. Assez pour lui donner une majuscule en tout cas. J’aime suer à moitié couchée en diagonale sur mon sofa. Et me réveiller en sursaut parce que j’ai une araignée dans la face, la lancer en panique n’importe où et me rendormir dans la frayeur de son retour. Je prends plaisir à faire une sieste quand il pleut. Le bruit, l’odeur, l’eau qui vient rafraîchir l’air… Juste à y penser, j’ai un vertige. Je suis vraiment fan. Pas une fan qui prend une photo et demande un autographe, non. Une qui appelle l’Été durant la nuit pour respirer fort dans son téléphone, qui fouille dans ses vidanges, qui mérite une ordonnance restrictive de la Cour.

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Mes parents ont toujours eu le climatiseur au maximum dans la maison. Jusqu’à 15 ans, j’étais certaine qu’on vivait dans l’allée des yogourts à l’épicerie. Ma chambre était un microclimat chaud et, quand j’en sortais le matin, j’avais l’impression de passer de la forêt tropicale à la forêt boréale du Biodôme. Je me faisais une toast et j’allais la manger sur le balcon, debout, en pyj, pour me réchauffer.

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J’adore les orages. Il y a quelque chose d’apocalyptique, mais de très rassurant, dans les éclairs, le tonnerre et la grosse pluie. Quand j’entends un grand coup de tonnerre, je lâche toujours un « wouh ! » festif. Je devrais d’ailleurs consulter pour ça. Ça doit venir de mon enfance, quand je m’assoyais sur le balcon avec ma tante Lizette pour regarder les éclairs en mangeant des Ringolos et en buvant un Pepsi. Et ça me garde en forme, parce que les journées d’orages intermittents, j’entre dans le cycle éternel de « fermer les fenêtres, ouvrir les fenêtres, refermer les fenêtres, rouvrir les fenêtres ».

J’adore jardiner. Plonger les deux mains dans la terre avec le soleil qui me tape dans le dos au point de me tatouer la camisole sur les omoplates pour les huit prochaines années, ça me met de bonne humeur. Partir seulement d’une graine et me retrouver avec trop de tomates en septembre, ça me fait sentir comme un créateur suprême. Malheureusement, j’habite au troisième étage et je n’ai pas de cour. La liste d’attente pour une parcelle de jardin communautaire étant d’environ 7 000 ans, je devrai sûrement léguer ma place à mes proches. Et, à ma mort, je leur demanderai de m’empailler et de m’installer comme épouvantail pour pouvoir en profiter.

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 J’adore vivre dehors. L’Été, je profite de chaque seconde  d’ensoleillement. Je m’invente des commissions pour marcher ou prendre mon vélo. J’étends mon linge à l’extérieur, sur des séchoirs que je laisse traîner là trois jours. Je cuisine au barbecue : ça ne salit pas de vaisselle et mon chum trouve que je sens bon après. On se met de la musique, on s’assoit sur les chaises qui laissent un faux fini de treillis sur la peau de l’arrière des cuisses et on mange sur la table chambranlante à cause des planches inégales du balcon.

J’adore le social estival. Même si l’autobus nous passe à trois pouces de la face, j’aime les petites terrasses qui volent des places de stationnement dans la rue. Prendre une bière avec des amis et rentrer un peu chaudaille un soir de semaine, on dirait qu’on s’en fout quand c’est l’Été. Souvent, le samedi, je vais voir mes parents et on descend se baigner chez ma tante Lizette, qui demeure juste en dessous. Ma cousine et mes cousins nous rejoignent, on rit et on mange les nouvelles sortes de chips funkys qui viennent de sortir. Et non, je ne détecte pas toute la subtilité de la saveur « hamburger-fromage-bacon ».

Je sue, je me baigne, je mange des chips, je sue, je mange d’autres chips et je me baigne encore. J’adore l’Été. Parce que l’Été, c’est fait pour suer.


 

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Korine Côté est humoriste. Cet été, on pourra la voir en spectacle au Festival Juste pour rire et l’entendre sur les ondes de CKOI tous les jours.

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