Culture

La Société du feu de l’enfer, de Rawi Hage: visage humain de Beyrouth en guerre

Dans son quatrième roman, Rawi Hage revisite son pays dévasté par la guerre. Une danse obsessive, ravageuse, incessante, libératrice.

Mosquée

Photo: Pixabay/Djedj

L’histoire

Beyrouth, 1978. La guerre civile bat son plein et on ne dénombre plus les morts. Un entrepreneur de pompes funèbres loge à l’entrée du cimetière chrétien où il exerce son métier dans le plus grand respect. Avec le même soin, il exploite clandestinement un crématorium où il organise des funérailles pour les homosexuels, prostituées et athées que lui envoie La Société du feu de l’enfer, créée pour ces exclus des religions.

Les personnages

Pavlov, autour de qui s’articule l’histoire. Garçon farouche, il poursuit la mission de son père, tué par une bombe alors qu’il creusait une tombe. De son balcon surplombant le cimetière, il assiste aux processions funéraires, observant « la guerre et ses sempiternels ravages ». Grand lecteur d’Homère, il vit seul tout en étant présent pour les uns et les autres. La « Dame de l’escalier » qui a perdu la raison après avoir été témoin du massacre de sa famille et qui trouve refuge chez lui. Nadja, la prostituée. Rex, le chien orphelin, qu’il adopte et avec lequel il poursuit de longs dialogues magiques. El Marquis, libertin milliardaire, fondateur de La Société du feu de l’enfer, qui commande ses propres funérailles à l’image de sa vie de débauche. La sœur de Pavlov, Nathalie, qui décide de s’exiler en Suède avec son mari et leur fillette.

Beaucoup plus tard, la guerre terminée, Ingrid, la petite-nièce de Pavlov, vient au Liban vivre dans la maison familiale où ses allures « occidentales » choquent « plusieurs habitants du quartier: Les gens comme vous […] il n’y en a plus ici », lui dira-t-on. 

On le lit

Parce qu’il s’agit d’une tragicomédie puissante où défile une galerie de personnages dont la vie est en suspens, menacée à tout moment par une bombe égarée.

Campé au Liban, dont l’auteur connaît bien les particularités géographiques, ce roman illustre l’absurde cruauté des nombreux conflits qui font actuellement rage sur la planète.

L’auteur

Rawi Hage

Photo: Justine Latour

Rawi Hage

Naissance à Beyrouth en 1964. Traverse les années de guerre civile avant de déménager aux États-Unis en 1984, puis au Canada en 1992. À Montréal, il étudie à l’Université Concordia tout en pratiquant différents métiers. Également photographe, il expose dans divers pays. L’écriture arrive fortuitement. Encouragé par son ami et mentor, le poète libanais John Asfour – décédé en 2014 et à qui le présent roman est dédié –, il publie en 2006 Parfum de poussière (prix IMPAC Dublin, Prix des libraires du Québec), livre-choc qui révèle une voix forte. Suivent Le cafard (2008) et Carnaval (2012).

Rawi Hage vit à Montréal avec sa compagne, l’écrivaine Madeleine Thien.

La Société du feu de l’enfer, Alto, 320 pages, traduction (remarquable) de Sophie Voillot

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