Ronde, et alors?

Pour ou contre le terme «taille plus»?

L’industrie de la mode utilise encore abondamment le terme «taille plus», mais certaines mannequins et entreprises militent pour qu’on arrête de catégoriser les femmes. Se débarrasser du «plus», une bonne idée ou pas?

Joanie-bandeau

La semaine dernière, le populaire site de shopping en ligne ModCloth a annoncé qu’il retirait l’étiquette «taille plus» de son site web de façon à être plus inclusif envers les femmes dotées de toutes les silhouettes, grandes ou petites, minces ou rondes. On peut donc désormais trouver au même endroit, sans indications précises, des vêtements offerts dans un large éventail de tailles, allant du XS au 4X. Bon nombre de blogues mode de même que des magazines de renom, comme le Time, ont relayé la nouvelle. Quand j’ai vu ça, je me suis dit: «Est-ce vraiment un scoop d’importance, ça? Un fait ne serait-ce que digne de mention?». Puis, je me suis souvenue un peu tristement que je ne vivais pas sur la planète Joanie, là où tout est rose et où chacun est égal à son voisin, mais dans le vrai monde. Et qu’ici, oui, c’est important de parler d’une telle nouvelle parce que ça représente un petit pas pour les gens voluptueux et un grand pas pour l’humanité.

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Je me suis rappelé une entrevue que la mannequin Ashley Graham a accordée à Métronews, il y a quelques mois déjà, où elle disait rêver du jour où elle serait considérée comme un top-modèle, et pas qu’un top «taille plus». «Je pense que la prochaine étape serait tout simplement de casser la barrière ‘grande taille’ dans l’industrie de la mode – ce qui signifierait que l’on n’aurait plus ce genre de conversation. J’aimerais que l’on m’apprécie comme mannequin et plus nécessairement comme mannequin ‘grande taille’. Mais je n’ai pas de problème avec cette étiquette; je pense qu’il est important de parler de tailles, car il y a encore tellement de racisme ‘anti-gros’», avait-elle dit à l’époque. Ça m’avait frappé, que ce sujet lui tienne tellement à cœur et qu’elle en parle avec tant de véhémence. Mais je comprenais sa pensée: si elle fait la même job, jouit des mêmes avantages et désavantages du milieu, travaille aussi fort et est aussi jolie et en forme qu’une mannequin de taille «régulière», pourquoi alors ne pouvait-elle pas écrire ce même titre sur sa carte de visite?

Je me suis aussi rappelé la naissance du hashtag #DropThePlus sur les réseaux sociaux, plus tôt cette année, un mouvement qui cherche à éradiquer le terme «taille plus» du langage commun. Pourquoi? Ça part de l’idée que tout mannequin qui porte du 4 et plus est considéré comme étant taille plus, alors que la femme américaine moyenne porte du 14. De quoi inquiéter la grande majorité de la population féminine mondiale face à leur représentation dans les médias. Parce que, soyons honnêtes ici: si les magazines, les journaux, les séries télé, les films et bien d’autres véhiculent l’idée qu’une femme qui porte une taille 6 est jugée grande taille, comment peut-on se sentir normale, nous?

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Malgré tout, je suis du même avis qu’Ashley: je ne crois pas qu’on soit prêts à éliminer l’étiquette taille plus, tant dans le langage courant que dans l’univers de la mode. Pas encore. Je le souhaite très fort, tout comme elle, mais je ne pense pas qu’on soit rendus là. Il me semble qu’il y a encore trop d’yeux à ouvrir, trop d’esprits à élargir, trop de belles pensées à implanter (du type acceptation de soi et des autres) et de chemin à parcourir. La révolution tranquille de la diversité corporelle vient tout juste d’être lancée – laissons-nous le temps de nous rendre sur le front, de présenter de nouvelles idées, de discuter, de négocier, et, qui sait, peut-être même de gagner cette guerre douce. Rome ne s’est pas construite en un jour, et le monde dont je rêve, là où tout est rose et chacun est égal à son voisin, n’existe pas encore.

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