L'édito

Édito : À quand les beaux jours ?

Comment surmonter notre sentiment d’impuissance face à l’horreur de la guerre. Et surtout, comment réussir à se convaincre que les beaux jours seront malgré tout de retour…

johanne lauzon

J’ai attendu jusqu’à l’extrême limite. Tout simplement incapable d’aligner les lettres, les mots, les phrases.

L’équipe tape du pied. L’édito se fait attendre. Je sais, je sais. Je ferme ma boîte de courriel et je bloque mon agenda.

Les images de l’Ukraine vues au Téléjournal tournoient comme des vautours sur ma rétine. Marioupol, dévastée. Borodianka, violée. Boutcha, massacrée. Et tous ces corps inertes qui jonchent leurs rues. Comme des pantins cassés, piétinés. Des enfants, des femmes, mais surtout des hommes, vêtus comme vous et moi – ici une chaussure New Balance, là, un jean déchiré –, qui vaquaient jusque là à leurs occupations. Tous condamnés par la furie guerrière.

Aborder tel ou tel sujet dans cette page blanche ? Tout me semble si dérisoire.

Faire comme si rien n’était arrivé. Se doucher, cuisiner, ranger, aller à l’épicerie, jogger… Et soir après soir, se retrouver devant le petit écran à chercher des explications dans les reportages de Marie-Eve Bédard, de Yanik Dumont Baron, de Tamara Alteresco…

Un jour, adolescente, j’ai demandé à mon grand-père ce qu’il faisait durant la Deuxième Guerre mondiale. Chef d’une famille nombreuse, il a posé sur moi son regard bleu royal. « On travaillait », a-t-il laissé tomber comme une évidence. Travailleur acharné, cet homme de peu de mots avait dit l’essentiel et je savais que je n’obtiendrais pas davantage de confidences. Mais je me souviens que la jeune fille curieuse que j’étais cachait mal sa déception. Je voulais tout savoir.

Que vais-je raconter à mes petits-enfants quand ils demanderont ce que je faisais lors de l’invasion de l’Ukraine par la Russie ? Si peu de choses.

Je leur parlerai de cette vie quotidienne presque insignifiante. Du sentiment d’impuissance, de la peine et de la honte.

De l’espoir, aussi. Parce qu’en observant, matin, midi et soir, mes semis pousser en ce printemps naissant, j’ai une certitude : les beaux jours s’en viennent.


Dialogue ouvert

Juin est le Mois national de l’histoire autochtone. Et Châtelaine voulait, cette année, souligner l’événement et mieux faire connaître les 11 nations autochtones du Québec. Qui de mieux qu’Elisapie pour nous parler de la réalité des Premiers Peuples ? Ç’a été un honneur de la rencontrer au moment de la séance photo de la page couverture. Elle porte en elle une sagesse et une joie de vivre hors du commun. À lire, le portrait sensible qu’en a fait Jean-Yves Girard (en kiosque). Aussi, je vous invite à parcourir les propos recueillis auprès de neuf femmes – Crie, Huronne-Wendat, Abénakise, Mohawk, Anichinabée, Atikamekw, Innues. Ces dernières nous parlent de réconciliation avec une belle franchise.

Nous, les Allochtones, avons un devoir : nous informer davantage sur les enjeux et les cultures des Premières Nations. Allons-y ! Soyons curieuses. Et bâtissons des ponts ensemble, comme le suggère l’inspirée poète innue Joséphine Bacon.

Johanne Lauzon, rédactrice en chef

Cet article vous a plu?

Abonnez-vous à Châtelaine pour seulement 15 $ !

Oui, je m’abonne
Couvertures de magazines