Nous sommes revenus de vacances samedi dernier. Et même si j’ai eu beaucoup de plaisir avec les enfants pendant cet intermède de trois semaines, vous savez déjà que tout n’a pas été rose. Entre un verre de chardonnay (ou trois-quatre), les couchers de soleil époustouflants au-dessus de l’anse et les parties de pêche, il y a eu aussi les multiples chicanes à gérer, l’ennui parce qu’il a fait froid et, surtout, la fatigue. Ma fatigue.
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Parce que OUI, passer trois semaines avec ses enfants c’est fatigant. Mais il ne faut pas le dire. Oh non. J’ai eu le malheur, en arrivant à Montréal, de déclarer sur ma page Facebook que les parents devraient avoir droit à une semaine de vacances en tête-à-tête pour se remettre de celles passées en congé avec leur progéniture.
Il n’en fallait pas plus pour que l’escouade des «mères parfaites» débarque sur mon mur pour condamner mes propos. Comment osais-je déclarer une telle chose ? Après tout, toute mère n’a qu’un seul souhait : passer le plus de temps possible avec ses petits. Si je me plaignais de la sorte, peut-être aurait-il fallu faire moins d’enfants, voire ne pas en avoir du tout, pouvais-je lire sur mon mur.
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Minute papillon. Je m’excuse, mais je n’en reviens pas de me faire dire que je n’aurais pas dû avoir d’enfants parce que j’exprime un sentiment bien légitime : la fatigue. Je suis comme flabbeurgastée par tant de non-avancées sociales. L’image de la mère invincible sévit encore et toujours, mesdames et messieurs. Et celle-ci n’est jamais écoeurée, encore bien moins épuisée. Cette mère parfaite là jubile à l’idée de consacrer l’entièreté de son temps à ses enfants. Vous comprenez, c’est qu’elle les aime tellement plus que nous, les pauvres «mères ordinaires».
Excusez-moi, mais je suis légèrement pompée. Avec ce genre de commentaires, je me dis que l’on n’a pas fait grand progrès depuis la «révolution» féministe. On en est encore au maudit même stade. On exige tout des femmes, et des mères en particulier, qui doivent se taire en retour parce que «hey, avoir des enfants c’est donc merveilleux et ça devrait être suffisant pour combler chaque parcelle de ton être.»
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C’est rare que j’utilise cette tribune pour faire une montée de lait, mais là j’en ressentais vraiment le besoin. Je sais que je ne suis pas la seule à trouver ça difficile de passer tout l’été avec ses enfants. Je sais que plusieurs sont fatiguées, écoeurées et prendraient volontiers une pause de vacances en famille. Vous me l’écrivez en privé parce que vous avez peur du jugement des autres. Vous avez peur de le dire à votre chum, à votre famille ou sur Facebook. Pire, vous croyez que ces sentiments sont illégitimes et inappropriés. Ça fait que je le dis encore encore une fois : j’ai bien aimé mes vacances, mais je les ai aussi trouvées éreintantes (l’un ne s’oppose pas nécessairement à l’autre) et j’ai le goût d’aller dormir une semaine dans un tout inclus pour m’en remettre. Voilà, deal with it mère parfaite des internets.
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Geneviève Pettersen est l’auteure de La déesse des mouches à feu (Le Quartanier)