Il existe de ces moments où il est impossible de continuer comme si de rien n’était. Où on ne peut faire la sourde oreille devant les évènements de l’actualité qui se font écho jusqu’à la cacophonie. Où un silence retenu trop longtemps se transforme en cri. Où la vibration sourde de la rage de milliers de femmes se synchronise pour se transformer en tremblement de terre.
Nous vivons un de ces moments. En quelques jours seulement, les invasions et agressions dans une résidence de l’Université Laval, les allégations de viol concernant un député libéral et la poursuite des policiers de Val-d’Or à la suite de la diffusion d’un reportage faisant état d’abus commis à l’endroit de femmes autochtones ont fait les manchettes. Et c’est sans compter les frasques de Donald Trump, la sortie de prison de « l’athlète » Brock Turner et cette femme qui s’est fait embrasser sur un sein contre son gré en direct à la télé française…
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C’est trop d’incidents horribles en si peu de temps. Mais aussi, trop de commentaires misogynes et violents de gens qui oublient qu’il y a des humains de l’autre côté de leur écran. Trop de chroniques et d’émissions de radio débiles, blâmant les victimes et défendant les présumés coupables. Trop de preuves de notre incapacité, comme société, à prendre au sérieux la parole des femmes. Trop d’occurrences flagrantes de la culture du viol.
Cette accumulation a provoqué un haut-le-cœur collectif si puissant qu’une mobilisation spontanée a été créée. Dans ce climat explosif, elle s’est répandue comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux. Demain, le mercredi 26 octobre, des manifestations sont prévues dans plusieurs villes du Québec pour scander #stopcultureduviol.
J’irai manifester contre la culture du viol. Voici pourquoi.
- Parce que je ne peux concevoir qu’au Québec, une femme sur trois subit une agression sexuelle et que 90% de ces agressions ne sont pas dénoncées.
- Parce que la culture du viol existe, que le terme est juste et qu’on va en parler jusqu’à tant que tout le monde comprenne de quoi il s’agit.
- Parce que je ne peux m’empêcher d’avoir peur pour mes filles. Même éduquées par des parents féministes, elles vivent comme moi dans une société qui les considère comme des objets et les préfèrent silencieuses. Je dois faire tout ce que je peux pour que le monde autour d’elles change pour le mieux.
- Parce que je me sens en confiance d’y aller avec mes filles, entourée du «contingent famille», alors que toutes les personnes avec des enfants marcheront ensemble.
- Parce qu’offrir ma présence et ma solidarité est la moindre des choses que je puisse faire, ayant la chance et le privilège de figurer du bon côté des statistiques d’agressions sexuelles.
- Parce que j’ai envie de gueuler depuis des semaines et que je pourrai le faire de façon constructive dans une manifestation.
- Parce que je suis inspirée par les Polonaises qui ont vu leur gouvernement agir après une journée de mobilisation historique.
- Parce que marcher donne l’impression d’avancer.
La porte-parole
La poétesse, artiste multidisciplinaire et militante amérindienne Natasha Kanapé Fontaine est la porte-parole de cette mobilisation. Elle salue la concertation de tous les groupes impliqués : «Toutes les voix de femmes de toutes les communautés doivent être entendues. Mais en s’unissant dans un grand “Stop! On n’est pu capables!”, cela permet la convergence des luttes. Nous devenons une seule voix qui exige le changement. »
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Mercredi, Natasha Kanapé Fontaine sortira dans la rue. Elle vous invite à faire de même, car le mouvement Idle No More lui a montré que la mobilisation peut donner des résultats concrets : « Nous avons maintenant une Commission d’enquête nationale sur les femmes autochtones. J’ai espoir qu’en se rassemblant ainsi, on pourra diminuer l’influence de la culture du viol et que nous trouvions des solutions ensemble. »
Venez don’, vous aussi, le mercredi 26 octobre:
Montréal : 18h à la Place Émilie-Gamelin
Québec : 19h à la Place de l’Université
Sherbrooke : 18h au Marché de la Gare
Saguenay : 17h30 à l’Université du Québec à Chicoutimi
Gatineau : 18h30 à l’Université du Québec en Outaouais
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Pour écrire à Marianne Prairie: chatelaine@marianneprairie.com
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