Psychologie

Les vacances, ce n’est pas un luxe!

Prendre des vacances, c’est un plaisir, mais c’est aussi essentiel à une bonne santé mentale. Le Dr Nicolas Chevrier, psychologue et directeur clinique des Services psychologiques Séquoia, nous explique pourquoi.

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Combien de temps faut-il pour décrocher?
Tout dépend de son état de fatigue, mais idéalement, il faut trois semaines consécutives. Durant la première semaine, on fait le vide, on décroche. Mais ce n’est qu’au cours de la deuxième semaine qu’on commence réellement à se reposer. Les bienfaits cumulés des deux premières semaines font en sorte que dans la troisième semaine, on est dans des dispositions optimales pour récupérer complètement et retourner au travail en pleine forme!

Un employé reposé sera-t-il plus performant?  
Les bénéfices des vacances profitent autant à l’employeur qu’à l’employé. Tout le monde est gagnant. L’employé qui revient de vacances est plus productif, plus attentif, aura de meilleurs rapports avec ses collègues, sera moins irritable, moins stressé. Aussi, le nombre de semaines de vacances accordées peut influencer grandement l’engagement d’un employé envers son entreprise.

Ne pas prendre de vacances peut-il avoir un impact sur notre santé?
Oui. On augmente son niveau de stress et on se rend plus vulnérable à l’épuisement professionnel. Souvent, on constate que les victimes d’épuisement professionnel n’ont pas pris de vacances depuis deux ou trois ans. Les conséquences sont parfois dramatiques. Prendre des vacances fait partie d’une bonne hygiène du travail. Il fut une époque où il était de bon ton d’affirmer qu’on n’avait pas le temps de prendre une pause. Cela supposait un certain statut social, un emploi de haut niveau. Mais les mentalités ont évolué. Les gens prennent de plus en plus conscience de l’importance de s’occuper de leur santé mentale, comme ils se préoccupent de leur alimentation. De la même manière qu’on ne se fait pas une fierté de manger trois hamburgers pour le souper, on ne se vante plus de ne pas prendre de vacances! L’épuisement professionnel n’est plus tabou. On sait désormais qu’il n’est pas la conséquence d’une faiblesse ou d’une plus grande vulnérabilité, mais bien le résultat d’une mauvaise gestion du travail. Personne n’est à l’abri.

Quand on a juste deux ou trois semaines de vacances, il est facile de tomber dans le piège de la performance. Réussir ses vacances devient un enjeu de stress. Comment peut-on éviter ce piège?
Il faut bien comprendre la fonction des vacances : se reposer. Alors, on évite de surcharger son programme. Rien de prévu pour le lendemain? Tant mieux! On savoure le bonheur de ne rien faire, sans culpabiliser. Car, après tout, les vacances sont censées diminuer notre niveau de stress. Or, celui-ci n’est pas toujours uniquement lié au travail. Il peut provenir de plusieurs sources, comme la famille, les finances… ou la crainte de rater ses vacances! Plusieurs personnes ont le réflexe de vouloir s’adonner à une foule d’activités qui ne correspondent pas nécessairement à leurs intérêts. Ce n’est pas parce qu’on est en vacances qu’on doit se sentir obligée d’aller au bout du monde, alors que les voyages nous laissent indifférente, ou de tenter l’aventure du vélo de montagne, si on préfère aller au cinéma. L’idée, c’est d’écouter ses envies.

On appréhende beaucoup la fin des vacances. Avez-vous des suggestions pour adoucir le retour au travail?
Effectuer un retour en douceur, sans avoir d’attentes irréalistes, comme vider sa boîte de courriels avant l’heure du lunch. La brutale « to-do list » peut bien attendre un peu. Un bon truc : planifier une activité qui nous fait plaisir, une petite douceur, pour le week-end suivant. Ça change la perspective. Au lieu de se retrouver en mode « retour de vacances », on se réjouit devant la promesse du beau week-end à venir. C’est très efficace sur le plan cognitif.

Ne devrait-on pas adopter une attitude différente tout au long de l’année pour ne pas arriver épuisée aux vacances?
Il est essentiel d’avoir une bonne hygiène du travail : faire des heures raisonnables, respecter ses limites, prendre des pauses. Nous sommes toutes différentes. Certaines personnes peuvent travailler 50 heures par semaine sans s’épuiser, d’autres pas. En se respectant, on se prémunit du stress général qui peut se développer. Il faut aussi être attentive aux signaux d’alarme : irritabilité, baisse de concentration, insomnie, fatigue physique, démotivation. Ces signaux indiquent que c’est le temps de ralentir. Les données scientifiques en psychologie organisationnelle démontrent clairement le fonctionnement de notre cycle d’épuisement : au retour d’une semaine de vacances, on est à notre seuil optimal de productivité durant 8 à 10 semaines. Par la suite,  notre productivité décline progressivement. Dans un monde idéal, les personnes qui occupent des emplois plus exigeants devraient pouvoir prendre trois semaines de vacances durant l’été, une semaine à l’automne, une autre au printemps, et s’octroyer une petite pause pendant les Fêtes. Mais on est au Québec, pas en France!

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