Formation professionnelle, rattrapage scolaire, spécialisation universitaire, langue seconde à intégrer, loisirs à perfectionner : notre matière grise est constamment sollicitée, et parfois, la quantité d’information à mémoriser complique l’apprentissage… Sauf si on connaît les bons trucs!
Marie-Claude Béliveau, orthopédagogue et psychoéducatrice au CHU Sainte-Justine, nous met sur la voie dans son récent ouvrage : Mieux vivre l’école… En 7 savoirs et quelques astuces. Si son livre a d’abord été conçu pour aider les parents à soutenir leurs enfants dans leurs études, il répond parfaitement aux questions et aux besoins des adultes qui se trouvent eux-mêmes en situation d’apprentissage. Avec elle, on fait le tour des cinq astuces essentielles pour réussir ses études : mentalisation, effort, verbalisation, motivation et mémorisation.
Apprendre, ça fonctionne comment?
Si on veut apprendre, on doit d’abord comprendre. Et pour comprendre, il faut faire interagir les deux hémisphères de notre cerveau. Le gauche, qui est le siège de l’intelligence verbale (et de l’analyse), et le droit, celui de l’intelligence non verbale (et de la synthèse). Bref, il faut faire voyager l’information d’un hémisphère à l’autre ou, si vous préférez, d’un mode de pensée à l’autre. C’est-à-dire qu’on traduit mentalement en images ce qu’on entend, et en mots, ce qu’on voit.
Le mécanisme est-il le même pour tout le monde?
Tout à fait. Au départ, cependant, l’information est saisie selon le « style cognitif » d’un individu. Certaines personnes pensent surtout en images (style non verbal), d’autres, en mots (style verbal); les unes voient l’information globalement (style simultané), et les autres, en détail (style séquentiel). Mais l’idée centrale, peu importe son style cognitif, reste la mentalisation active.
Qu’appelez-vous mentalisation active?
C’est le travail de « traduction » dont je parlais tout à l’heure. Chaque fois qu’on a besoin d’apprendre une chose, le truc est de toujours mettre l’information verbale en images, l’information visuelle, en mots, puis d’aller du détail (les parties) au global (le tout) et vice-versa. Le but de l’exercice, c’est de se démontrer à soi-même l’information au lieu de seulement se la dire. C’est un travail. Un effort. Mais il devient alors possible de comprendre, d’apprendre et de retenir les choses. C’est la clé du mécanisme de l’étude.
On ne peut donc pas apprendre sans effort?
En effet. Ni sans motivation, d’ailleurs. Car la motivation est indissociable de l’effort : il faut la forcer si on veut qu’elle dure! La planifier, la mettre à son programme quotidien! Condition essentielle, cependant, elle doit être profondément personnelle (c’est la motivation intrinsèque). On n’étudie pas pour les autres, mais pour soi, pour son propre intérêt, sa propre curiosité, son but particulier, même si on ne rêve d’acquérir des connaissances que pour briller dans les conversations!
Pour en revenir à l’effort, cela signifie de toujours en faire plus que moins. Pas en temps : en variété. Quand on a une information à assimiler, on joue avec elle en l’abordant sous tous les angles possibles : on l’exprime en mots, en images, on la met en lien avec d’autres, on se l’explique à deux, on s’invente des exemples ou des applications, etc. On la surligne, la découpe en sections, on en fait des résumés, on l’épingle au mur, bref, on y met de l’imagination! Et cela, jusqu’à ce qu’on soit capable de l’expliquer clairement et simplement à quelqu’un d’autre. De l’enseigner, en somme.
Le langage tient donc un rôle important?
Un rôle central. Discuter, débattre, réfléchir, exprimer des sentiments… En mettant une idée en mots, on l’oblige à la cohérence. Car le langage ne fait pas qu’exprimer la pensée, il l’aide à s’organiser, donc à se développer et, donc à développer son intelligence. Parler de ce qu’on apprend (et s’en parler à soi-même, ce qu’on appelle le langage intérieur) reste le meilleur outil pour clarifier sa pensée.
Il faut forcer sa motivation, disiez-vous plus haut. Comment?
En l’associant au plaisir. Il s’agit de se donner des raisons agréables de persévérer dans son étude. Je les appelle des « extras ». Par exemple, se féliciter concrètement à chaque succès, se mettre sur son trente-et-un pour aller au cours, s’offrir une sortie après la classe, etc. Mais le plus efficace de tous ces extras est de se servir de ses nouvelles connaissances! Ça les concrétise, les rend profitables. Vous étudiez l’italien? Alors, multipliez les occasions de le parler, même si vous le baragouinez encore. Et puis, le plaisir est d’autant plus important dans le processus qu’il aiguise la conscience de ce qu’on apprend et qu’il stimule la mémoire.
Parlez-nous de la mémoire, justement. Comment la maximiser?
La mémoire est comme une toile d’araignée. L’astuce, c’est de toujours accrocher ses nouvelles connaissances à celles qui sont déjà en place. Cela crée des connexions, des liens, qui vont servir de repères et de base pour s’inventer des trucs mnémotechniques.
Il ne faut pas oublier que la mémoire se nourrit de motivation. Il faut donc se donner de vraies raisons d’apprendre, anticiper un profit. Se lever le matin, heureuse d’avoir un cours dans la journée!
Autre chose : le grand ennemi de la mémoire est le stress de la performance, parce qu’il fait chuter l’attention et perdre le contrôle de ses apprentissages. Le remède? Étudier plus activement encore! Car plus la mentalisation est active et les actions concrètes sont diversifiées, plus la mémorisation sera efficace. Naturellement, le bon fonctionnement de la mémoire est aussi étroitement lié à une bonne hygiène de vie. Bonne ouïe, bonne vue, bon sommeil, bonne alimentation sont des outils dont elle ne peut se passer.
La clé de la réussite : multiplier les approches On retient :
source : Béliveau, Marie-Claude, Mieux vivre l’école… En 7 savoirs et quelques astuces, CHU Sainte-Justine, 2011, p. 162 |
Le cerveau et l’âge On entend parfois dire qu’après 25 ans, nos neurones déclinent et qu’il est donc plus difficile d’apprendre. « Faux, c’est un préjugé, réplique Marie-Claude Béliveau, orthopédagogue et psychoéducatrice au CHU Sainte-Justine, qui, à bientôt 50 ans, étudie le soir, après son travail, en vue d’obtenir un diplôme en gérontologie. La difficulté réelle, explique-t-elle, quand on vieillit, c’est qu’on risque de manquer d’imaginaire d’avenir. » Mais tant qu’on peut faire des projets… pas de problème! |