Le titre : Le pouvoir du chien
L’auteur : Thomas Savage
L’histoire : L’Ouest américain, années 1920. Deux frères mènent une vie solitaire sur un ranch, où ils gèrent leur bétail et partagent la même chambre. Le premier, Phil, a beau être le plus intelligent des deux, il est surtout cynique, raciste, homophobe et misogyne. Le second, Georges, est sensible et attentif. Quand il décide d’épouser une jeune veuve prénommée Rose et de s’installer avec elle à la maison, le fragile équilibre entre les deux frères est vite ébranlé. D’autant plus que Rose a un fils quelque peu efféminé, qui éveille des sentiments ambigus chez Phil…
L’univers : Au-delà de ses majestueuses descriptions de paysages (plaines de l’Ouest, Rocheuses, etc.), Le pouvoir du chien est une étude psychologique impitoyable de la vie de ces cow-boys qui, pour lutter contre leur homosexualité, se forgeaient une image de durs à cuire, virils et homophobes.
La voix : À la fois dure et cruelle, mais aussi d’une étonnante finesse et d’une grande simplicité. Publié en 1967, Le pouvoir du chien est considéré comme le chef-d’œuvre de l’auteur, décédé en 2003. Il a fallu attendre jusqu’en 2002 avant qu’il soit traduit en français.
Les premières phrases : « C’était toujours Phil qui se chargeait de la castration. D’abord, il découpait l’enveloppe externe du scrotum et la jetait de côté; ensuite, il forçait un testicule vers le bas, puis l’autre, fendait la membrane couleur arc-en-ciel qui les entourait, les arrachait et les lançait dans le feu où rougeoyaient les fers à marquer. Étonnement, il y avait peu de sang. Au bout de quelques instants, les testicules explosaient comme d’énormes grains de pop-corn. Certains hommes, paraît-il, les mangeaient avec un peu de sel et de poivre. u02baAmourettesu02ba, les appelait Phil avec son sourire narquois, et il disait aux jeunes aides du ranch que s’ils s’amusaient avec les filles, ils feraient bien d’en manger eux aussi. »
La raison de le lire : Parce que derrière ses allures de chanson country, Le pouvoir du chien est une grande fresque, une véritable tragédie. Et parce que le faible n’est pas toujours celui que l’on croit.
En deux mots : Vraiment puissant.
Éditeur : 10/18 – 340 pages.
Le titre : Les privilèges
L’auteur : Jonathan Dee
L’histoire : L’irrésistible ascension d’Adam et de Cynthia, un couple Cendrillon touché par la grâce. Beaux et riches, ces héros des temps modernes partent à la conquête de New York, où rien ne semble leur résister. Mais, derrière leur façade dorée, ils se retrouvent bientôt confrontés aux nombreux dérapages de leur fille, de plus en plus destroy, et de leur fils, honteux de la fortune familiale.
L’univers : Les coulisses de la réussite à tout prix. L’univers de ce fameux 1 % de la population qui possède 99 % de la richesse. Le regard décalé de ceux qui ont les moyens d’observer le monde de haut, mais qui oublient que, sous le vernis, il y a souvent de la crasse.
La voix : Adam : « Nous avons réussi. » Cynthia : « Chéri, nous n’avons pas simplement réussi. Nous sommes une putain de multinationale. »
Les premières phrases : « Un mariage! Le premier d’une génération; les futurs époux ont tout juste vingt-deux ans, ce qui est jeune pour l’époque. Leurs amis, pour la plupart, ont pris l’avion et sont arrivés hier, et Pittsburgh a beau compter un demi-million d’habitants, ils affectent, avec humour et snobisme, de se sentir désorientés, parce qu’ils viennent de New York et de Chicago, mais aussi parce que c’est le sentiment que leur inspire l’événement, sa nouveauté troublante et magique, comme s’ils se retrouvaient tout à coup au milieu de nulle part. »
La raison de le lire : Jonathan Dee décrit avec brio ce monde où l’argent permet… de tout se permettre!
En trois mots : Occupy Wall Street.
Éditeur : 10/18 – 356 pages.
Le titre : Le Diable, tout le temps
L’auteur : Donald Ray Pollock
L’histoire : De l’Ohio à la Virginie-Occidentale, de la fin de la Seconde Guerre mondiale aux années 60, Le Diable, tout le temps, nommé meilleur livre de l’année 2012 par le magazine Lire, raconte les vies disloquées et les destins croisés d’une galerie de personnages plus grossiers, incultes et violents les uns des autres.
L’univers : Donald Ray Pollock s’interroge sur l’origine du mal et de la rédemption. Ce faisant, il décrit d’une main de maître l’univers cinglé de ces fanatiques religieux qui en appellent sans cesse à Dieu pour camoufler leurs perversions. Son talent est si immense qu’il nous fait presque aimer ses personnages brisés, dont la bondieuserie et l’hypocrisie répugnante se veulent un miroir de l’Amérique profonde.
La voix : Malgré une noirceur narrative, ce livre est porté par une écriture lumineuse qui envoûte ses lecteurs.
Un extrait : « Quand du whisky ne lui coulait pas dans les veines, Willard se rendait à la clairière matin et soir pour parler à Dieu. Arvin ne savait pas ce qui était le pire, la boisson ou la prière. Aussi loin qu’il pût se souvenir, son père lui semblait avoir passé sa vie à combattre le démon. Arvin frissonna un peu à cause de l’humidité, et serra sa veste contre lui. Il regrettait son lit. Même l’école, avec tous ses tracas, valait mieux que ça. Mais on était samedi, et il n’y avait pas moyen d’y échapper... »
La raison de le lire : Parce que Donald Ray Pollock s’introduit à merveille dans la tête de ces pauvres âmes à la dérive.
En deux mots : Lyrique et sauvage.
Éditeur : Albin Michel – 370 pages.
Le titre : Générosité
L’auteur : Richard Powers
L’histoire : Et si la recette du bonheur était génétique? Thomas Kurton, pionnier de la génomique, vient de publier une étude qui fait sensation : il est désormais possible d’identifier le gène responsable du bonheur et de programmer les naissances de façon à concevoir des gens heureux. La porteuse de ce gène est une jeune réfugiée qui a fui la guerre civile algérienne, où a péri une partie de sa famille. Elle possède une joie de vivre si communicative que, malgré son passé douloureux, on la surnomme… miss Générosité.
L’univers : La force de l’auteur réside dans sa capacité à nouer une intrigue solide entre des personnages attachants et les problèmes d’éthique propres à la recherche génétique. Richard Powers multiplie les questions : qu’est-ce qui fait que nous sommes heureux? Est-il éthiquement acceptable d’intervenir sur le patrimoine génétique d’un individu pour en faire une personne heureuse?
La voix : Entre érudition et poésie, Powers démontre une nouvelle fois qu’il est l’un des plus intelligents écrivains américains contemporains.
Les premières phrases : « À bord d’un métro plein à craquer, un homme voyage dans le sens contraire de la marche. On ne doit pas être loin de l’automne, la saison des révisions. Je l’imagine aux prises avec un héritage, au fond d’un tunnel sous u02bala Ville qui en veutu02ba, vingt-cinquième au palmarès des plus grandes conurbations de la terre, coincée entre Tianjin et Lima sur le graphe des populations. Il fredonne un mantra apaisant, une chanson qui dit le nom de Chicago, mais la rame engloutit la mélodie. »
La raison de le lire : Parce que ce livre parle autant de science et de conscience que de technologie et d’humanité.
En un mot : Visionnaire.
Éditeur : 10/18 – 474 pages.
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