L’animatrice blogueuse est une amoureuse du mot juste. Sophie carbure aussi à l’étrange musique des langues étrangères. Elle se nourrit autant de dicos que de romans et de poèmes. Et souhaite voir son fils suivre sa voie.
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J’ai eu la chance de naître en France et d’y vivre jusqu’à mes 12 ans. Plein de gens me reprochent mon accent français, mais c’est un héritage dont je suis fière. J’avais neuf ans et on nous faisait apprendre par cœur des poèmes de Jacques Prévert, qui haïssait la religion et avait des préoccupations sociales. Ce n’est ni snobisme ni élitisme, mais un souci de la langue, que j’essaie de transmettre à mon fils. C’est important d’être exposé jeune à la beauté, à la réflexion, à des gens qui pensent différemment.
Quand mes parents ont divorcé, ma mère est venue s’installer au Québec avec les enfants ; mon père, diplomate, a été affecté à Beyrouth, en pleine guerre, entre 1977 et 1982. Un été, en vacances chez lui, je suis tombée très malade. Pendant ma convalescence, pour passer le temps, j’ai dévoré les Rougon-Macquart. Émile Zola, c’est le début du naturalisme. Écrivain et journaliste, il disait : « Je serai un miroir de la société, je vais vous décrire comment ça se passe dans les mines », ce qui a donné Germinal.
Quand j’écris une chronique, je la relis avec le regard de Louis-Ferdinand Céline : cette phrase est trop longue, il faut la rendre plus punchée… L’influence de son style, on la voit partout. En un livre, il a pris la langue française, l’a passée dans le blender, et elle ne s’en est jamais remise. Dans ce roman, Bardamu, le narrateur, qui a été soldat pendant la Première Guerre mondiale, raconte en langage parlé l’horreur des tranchées, puis, une fois de retour dans la vie civile, décrit le quotidien des pauvres gens de l’époque. Cela déchire le cœur.
Ce pourrait aussi bien être un dictionnaire français-italien. L’idée derrière, c’est que je suis une amoureuse des langues étrangères, une passion depuis toujours. Après le Liban, mon père a été posté au Mexique et c’est là que j’ai peaufiné mon espagnol. C’est hyper important dans ma vie. Je pourrais sortir tous les clichés : l’ouverture aux autres, les voyages… Mais lire La casa de los espíritus (La maison des esprits), d’Isabel Allende, en version originale (avec l’aide de mon dictionnaire), me donne le même plaisir que de lire du Prévert.
Le livre que j’ai le plus recommandé. Il a mérité à David Grossman le Prix Médicis étranger 2011. À peine revenu de son service militaire de trois ans, le fils d’une Israélienne lui annonce qu’il s’est porté volontaire pour une mission. Sa mère, qui n’en peut plus de vivre avec la peur constante qu’il meure, décide de quitter sa maison pour que l’armée ne puisse pas venir lui annoncer sa mort. Elle part, traverse son pays, dont elle nous raconte l’histoire. Ce n’est pas anti-Arabes ni anti-Palestiniens, juste humain, une déclaration d’amour à la terre d’Israël.
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