Bien-être

Un esprit sain dans un… ventre sain!

C’est maintenant scientifiquement prouvé: l’intestin parle, et le cerveau écoute. Décodage 101.

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On dit qu’on a des papillons dans le ventre. L’estomac noué. Qu’on met « ses tripes sur la table ». Les émotions seraient-elles liées au système digestif?

Aussi loufoque que cela puisse paraître, d’éminents chercheurs affirment que oui. Selon eux, le système digestif aurait une influence sur notre vitalité. Ils avancent même que l’anxiété et la dépression prendraient naissance dans l’intestin. Ce qui est loin d’être impossible quand on sait que 95% de la sérotonine, un neurotransmetteur qui joue un rôle important dans l’humeur, loge dans nos « boyaux ».

Le Dr Michael Gershon, neurobiologiste rattaché à l’Université Columbia de New York, a été le premier, à la fin des années 1990, à soutenir que cette obscure partie de notre anatomie agissait comme un deuxième cerveau: eh oui! l’intestin prend tout seul certaines décisions et fabrique ses propres neurones.

Intestin et cerveau communiquent par l’intermédiaire du nerf vague, un long cordon qui part de la base du crâne et descend jusque dans l’abdomen. « Ce qu’on peut maintenant affirmer, c’est que 90% des messages qui voyagent le long de ce nerf proviennent de l’intestin, note le Dr Gershon. Il parle, et le cerveau écoute. »

« À l’Université de Californie, on a remplacé les électrochocs par la stimulation du nerf vague pour soigner la dépression et l’épilepsie », poursuit le Dr Gershon. Et ça fonctionne! Plus encore: on a constaté que ce faisant, on améliorait aussi la mémoire et la capacité d’apprentissage. Fantastique, non?

D’autres scientifiques sont arrivés aux mêmes conclusions en étudiant la flore intestinale, cette couche constituée de quelque 100 milliards de « bonnes » bactéries qui tapisse les parois de l’intestin. Après avoir constaté l’ampleur de son rôle, ils la considèrent maintenant comme un organe à part entière et l’ont rebaptisée « microbiote ». Toute une promotion, et qui en dit long sur le lien intestin-santé mentale.

Un autre pionnier en la matière, le gastroentérologue américain Emeran Mayer explore les liens entre le cerveau, le microbiote et l’état d’esprit. « On sait déjà que certaines sensations, comme la nausée, l’appétit, la satiété et la fatigue, proviennent de l’intestin. Nous cherchons maintenant à démontrer que la réaction de personnes soumises à des stimuli émotionnels pourrait être influencée par la présence de probiotiques, ces micro-organismes utiles pour la santé intestinale », explique le professeur aux départements de médecine, de physiologie, de psychiatrie et de sciences béhavioristes de l’Université de Californie à Los Angeles (UCLA). Autrement dit, un système digestif en pleine forme grâce à des probiotiques module l’humeur.

La preuve est déjà faite chez les rongeurs. Des chercheurs de l’Université Cork, en Irlande, ont donné des probiotiques à des souris pendant six semaines. Résultat: celles qui en avaient pris se sont montrées plus aventureuses que les autres. En examinant leur cerveau, on a vu que leur taux de corticostérone, hormone liée au stress, était plus faible que celui des autres souris.  

Le Dr Mayer mène une expérience similaire sur des humains. Arrivera-t-il à la même conclusion: un esprit sain grâce à un ventre sain? Un peu tôt pour le dire, mais le chercheur semble optimiste.

À l’Université de Montréal, un laboratoire de recherche en pharmacologie, sous la direction du Dr Guy Rousseau, a fait une découverte qui en tout cas abonde dans ce sens. On sait que beaucoup de patients ayant subi un infarctus du myocarde souffrent ensuite de dépression. On a donc traité cette pathologie chez des rats avec des probiotiques, et le résultat s’est révélé positif. D’accord, il ne s’agit que de vulgaires rongeurs. Mais peut-être qu’un jour prochain, on verra des retombées concrètes pour l’humain.

En attendant, la meilleure stratégie antiblues ne serait-elle pas de se montrer vigilante sur le contenu de son assiette? Frites et hamburgers bien gras nuisent fort probablement à notre équilibre mental. Encore une preuve accablante: après avoir suivi 9000 personnes pendant près de 6 mois, des chercheurs de l’Université de Las Palmas de Gran Canaria, aux îles Canaries, en sont arrivés à la conclusion que plus on avalait de malbouffe, plus on risquait de souffrir de dépression. Une équation à ne pas négliger!

Pour plus de renseignements, on peut consulter le site de la Fondation Canadienne de la Santé Digestive.

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