Société

Femme inspirante: Marie-Philip Poulin

On dit qu’elle est l’une des meilleures joueuses de hockey de la planète, la « Sidney Crosby du hockey féminin ».

Photo: Jess Desjardins et Isabelle Courville

 

La capitaine des Canadiennes de Montréal dans la Ligue canadienne de hockey féminin (LCHF) et membre de l’équipe nationale canadienne de hockey féminin change le Québec… en permettant à de jeunes sportives d’aspirer elles aussi à percer au hockey professionnel.

On dit qu’elle est l’une des meilleures joueuses de la planète, la « Sidney Crosby du hockey féminin ». Des éloges qui lui donnent toujours des « sueurs », confie-t-elle au téléphone depuis Calgary, où elle s’entraîne avec l’équipe nationale canadienne en vue des Jeux olympiques de Pyeongchang cet hiver. « Ça me gêne vraiment ! Je me dis que c’est un sport d’équipe, que si j’ai marqué des buts, c’est parce que j’étais à la bonne place au bon moment… » Je lui mentionne une étude démontrant que les filles ont tendance à attribuer leurs succès aux autres, mais à porter seules le blâme quand ça tourne mal – au contraire des gars. Elle éclate de rire. « Ouais… C’est pas mal moi, ça ! »

Mais pilons un peu sur l’une des valeurs qu’elle dit chérir le plus, l’humilité, pour étaler quelques-uns de ses exploits. L’attaquante de 26 ans s’est illustrée aux Jeux de Vancouver en comptant cinq buts, contribuant de manière spectaculaire à l’obtention de la médaille d’or ; deux ans plus tard, en 2012, elle était sacrée championne du monde ; puis aux Jeux de Sotchi, en 2014, elle a encore aidé son équipe à remporter l’or en marquant trois buts décisifs en fin de match. Pas gênant comme feuille de route.

En juin dernier, la numéro 29 des Cana­diennes de Montréal est aussi devenue la première hockeyeuse à tenir la vedette d’une vaste campagne publicitaire, celle de Gatorade, avec affiche format géant au centre-ville de Toronto. « Ça m’a fait chaud au cœur. J’espère que cette visibilité ouvrira la voie à d’autres filles. »

Car, au-delà de la médaille d’or qu’elle rêve d’avoir au cou aux Jeux de la Corée du Sud, la diplômée en psychologie de l’Université de Boston caresse aussi l’ambition de rendre le hockey plus égalitaire. Pour l’instant les injustices sont criantes : presque toutes ses consœurs des Cana­diennes sont forcées d’avoir un emploi de jour, puisque le revenu de quelques milliers de dollars qui leur est versé par la LNHF (équivalent féminin de la LNH) ne met pas de beurre sur leur pain. On est loin des collections de Lamborghini de leurs homologues de la LNH… « C’est choquant. Surtout qu’on s’entraîne de la même façon que les gars. » D’ailleurs, les gens qui pensent que les filles ne sont pas vites, vites sur la glace ramassent leur mâchoire par terre quand ils les voient jouer pour la première fois. « Ils viennent souvent nous le dire après le match. Ça nous rend fières, mais en même temps, ça montre qu’il y a toujours des préjugés. »

En s’investissant pour promouvoir sa passion auprès des fillettes, elle réalise que bien des parents sont eux aussi aveuglés par ces stéréotypes. « Le hockey exige beaucoup d’implication de leur part, sur le plan des déplacements par exemple, et j’ai parfois l’impression qu’ils seraient davantage prêts à faire ces efforts pour leur fils, parce qu’ils ne voient pas que c’est tout autant un sport de filles. Il y a comme un blocage. C’est dommage parce que ce sont souvent les parents qui nous donnent la première chance de faire quelque chose qu’on aime. »

Elle sait de quoi elle parle : papa et maman Poulin sont ses alliés indéfectibles depuis ses débuts sur la glace, en Beauce, à cinq ans. « Ils m’avaient d’abord inscrite en patinage artistique, mais ils ont bien vu que j’enviais mon frère à l’aréna… Alors je me suis ramassée toute seule de fille parmi les gars du hockey mineur, avec mon équipement de marché aux puces ! » En entrevue, elle évoque souvent son clan. Ils étaient là aux Jeux de Vancouver, avec frérot Pierre-Alexandre, quand elle a remporté sa première médaille d’or. Ça pleurait à chaudes larmes. « C’est ma plus grande fierté, qu’ils aient été là. Je ne viens pas d’une famille riche, mon père et ma mère cumulaient chacun deux emplois pour que je puisse me consacrer au hockey. Aujourd’hui, ils sont à la retraite, mais ils ont encore des petits boulots pour se permettre de venir me voir jouer. Je leur dois tout ce que j’ai. » 

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