Culture

Lorraine Pintal: tête-à-tête avec une femme de théâtre rassembleuse

La comédienne Lorraine Pintal a fait du Théâtre du Nouveau Monde son deuxième chez-soi il y a bientôt 30 ans. À la fois directrice artistique et directrice générale de cette institution du centre-ville de Montréal, cette passionnée de l’art et amoureuse du Québec a su remettre le théâtre à l’avant-plan de la scène culturelle. Elle s’est prêtée, avec grand plaisir, au jeu de l’entrevue !

Si je n’avais pas fait ce métier, j’aurais adoré… Travailler en psychiatrie. Au théâtre, on fouille l’être humain tout le temps: la psyché féminine, les traumatismes, les aspects plus sombres de l’Homme… Je suis aussi fascinée par les travers amoureux: qui s’éprend de qui, pourquoi, dans quel contexte. [Rires] En tant que metteuse en scène, on développe, je l’espère, des qualités d’écoute et d’empathie. J’aime faire face à plus grand que moi.

Trois mots qui me définissent Premier mot: énergique. Je tiens ça de ma mère, qui était une vraie boule d’énergie! Deuxième: passionnée. Ça, t’as pas le choix quand tu optes pour le théâtre! Et on me dit aussi que je suis rassembleuse, ce qui me touche.

La musique que j’écoute en ce moment Classique, car elle me repose. Et c’est la seule qui me permet de me concentrer lorsque je suis en télétravail – à cause de la COVID-19. J’y pensais il y a quelque temps: Rachmaninov, quel génie! Et comme sa musique est magnifique! Même les auteurs déments comme Wagner réussissent à me calmer.

Une journée satisfaisante, c’est une journée… À la fin de laquelle je suis passée à travers tout ce que je voulais faire, tant en création qu’en direction et dans mes relations humaines.

Un parfum naturel dont je raffole L’odeur du varech quand on arrive sur le bord de la mer. Le monde marin, ça me transporte.

Le film qui a marqué ma vie Je parlerais plutôt d’un genre: le cinéma de la Nouvelle Vague, qui a fait son apparition dans les années 1950. On connaissait jusqu’alors un septième art assez convenu. Ses mises en scène inventives, ses gros plans poignants, son audace… Tout cela m’a beaucoup influencée.

J’ai détesté… Aïe aïe aïe! Je ne suis tellement pas une personne dans la haine. Mais je pourrais dire que tous les événements entourant le 11 septembre – qui ont dévoilé toute la violence, la peur et l’intolérance de l’être humain – m’ont menée à un état agressif que je n’aime pas. Le monde a basculé le 11 septembre 2001.

Le plus beau moment de ma vie La naissance de ma fille. Mais tout le monde dit ça, n’estce pas? [Rires] Chaque naissance est un miracle.

Le plat que je réussis le mieux Ma meilleure recette, c’est… un numéro de téléphone pour commander un repas! [Rires]

Un vêtement qui me fait sentir belle Un costume de théâtre. Ça déguise, ça transforme, ça révèle même parfois des choses très intimes chez quelqu’un.

Mon roman fétiche Sans aucun doute L’avalée des avalés, de Réjean Ducharme. Je me suis identifiée à son personnage principal, Bérénice Einberg, pendant une grande partie de mon adolescence. J’en suis même presque venue à changer de nom: j’utilisais le pseudonyme Bérénice lorsque j’écrivais de la poésie et des scénarios de films! Cette œuvre est un journal extraordinaire, celui d’une jeune fille qui refuse l’âge adulte par indépendance. On y trouve un humour décapant et aussi une mélancolie qui me parle. C’est une amazone, cette Bérénice!

Les mots que je n’oublierai jamais et ils ont été prononcés par… On va dire que je suis encore branchée sur le théâtre… Il s’agit d’une phrase tirée d’une pièce qu’on a montée autour de l’épouse secrète de Louis XIV. Je porte toujours en moi sa devise: «Je ne mets point de borne à mes désirs.» Il faut se rappeler que madame de Maintenon était une femme du 17e siècle, une époque qui ne permettait pas d’être aussi affranchie. Je pense qu’on peut dire qu’elle avait toute une tête! [Rires]

La première chose que je fais au saut du lit Je regarde dehors. Pas pour connaître la météo. Je veux juste saluer l’extérieur. Ça me fait du bien.

Une expression que je dis trop souvent Je n’aime pas dire ou quand quelqu’un dit: «Je ne sais pas si j’ai raison, mais…». En plus, c’est typiquement féminin. On s’apprête à exprimer ce qu’on veut dire, et on s’en excuse à l’avance! Il faut enlever cela de notre vocabulaire. Ne doutons pas de la pertinence de nos propos.

J’ai peur de… La violence faite aux femmes. Cette force qui, tout à coup, peut anéantir les plus vulnérables. Ça m’effraie.

Les circonstances dans lesquelles j’ai les meilleures idées Quand je prends une douche, c’est incroyable les idées que j’ai! Je peux faire une mise en scène au complet. [Rires]

Ce qui me ressource le plus L’entraînement, au moins une fois par semaine. C’est le moment où je suis seule avec moi-même, en train de bouger, de suer… Je me vide l’esprit pour ensuite pouvoir y faire entrer autre chose. Je termine mes séances avec un peu de yoga.

En amitié, je suis… Très fidèle.

Et en amour… Très imprévisible! Dans le sens que j’aime les imprévus, bien sûr. Cela étant dit, j’ai eu beaucoup de relations, j’ai divorcé, j’ai repris… Je n’ai pas eu un parcours en ligne droite, mais je ne regrette rien. Je suis maintenant une heureuse célibataire.

Quelque chose que j’aimerais apprendre Je veux savoir ce qui se passe après la vie. Y a-t-il d’autres mondes après celui dans lequel on vit? Comment l’univers s’est-il composé? Chaque fois que j’écoute l’astronaute David Saint-Jacques en entrevue, je suis fascinée par ses propos.

Si j’étais un personnage de fiction, je serais… Je suis une passionnée folle de Tintin, qui me ramène à mon enfance. J’en lis encore. C’est un explorateur, un humaniste, un détective, un fin finaud…

Si je pouvais aller dîner avec la personne de mon choix demain… Ce serait avec ma fille! Je l’invite partout. Si elle n’est pas libre, je demande à des amis. Mais quand elle peut venir, je suis bien contente. Ça change une vie, la monoparentalité…

Je suis accro à… On m’a souvent dit que j’étais workaholic, et je commence à le croire! Mais si on exclut le travail, je reviens à ce que j’évoquais tantôt: la mer, les plages… Pour moi, c’est du bonheur à l’état pur

J’aimerais qu’on se souvienne de moi comme de quelqu’un qui… A permis une certaine évolution dans la société, bâti quelque chose qui n’est pas éphémère, mis une pierre dans le grand édifice culturel.

En plus de diriger le Théâtre du Nouveau Monde (TNM), Lorraine Pintal continue de s’engager dans les causes pour la santé mentale, avec notamment l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, l’organisme Les Impatients et le projet d’art-thérapie au TNM.

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