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Culture

Mariana Mazza sur sa mère, sa carrière, son corps… et Denise Bombardier

C’est l’humoriste de l’heure, tous sexes confondus. Et parlant de sexe... Mariana Mazza en cause beaucoup sur scène. En entrevue, elle a bien d’autres sujets : sa mère, sa carrière, sa thérapeute, son désir de laisser sa marque, le féminisme, son corps. Et Denise Bombardier.
Par Jean-Yves Girard

Mariana Mazza sur sa mère, sa carrière, son corps… et Denise Bombardier

Mariana Mazza sur sa mère, sa carrière, son corps… et Denise BombardierPhoto: Geneviève Charbonneau

Mariana Mazza sur sa mère, sa carrière, son corps… et Denise Bombardier

On m’avait averti : « T’arriveras pas à placer un mot. » Ça n’a pas été le cas. Enfin, pas tout à fait. Il est vrai que sa volubilité est remarquable. En deux heures d’interview, à la terrasse d’un café sans flafla rue Saint-Denis, le flot de paroles ne s’est interrompu que lorsqu’elle mangeait sa soupe ou buvait son café, en tuque et bottes de travail Timberland. Quand le torrent ralentissait, j’insérais une question ou un commentaire. Ainsi, on a réussi à avoir une sorte de conversation. « Je me suis calmée depuis l’année passée, assagie. Depuis que je consulte, je ne suis plus la même personne. »

Oui, Mariana voit une psychologue, « une Juive anglophone de 90 ans qui n’avait aucune idée de qui j’étais et qui me remet tout le temps en question. Il le faut, parce que c’est pas normal ce que je vis présentement ».

À un âge où l’on sort de l’École de l’humour avec l’angoisse au ventre devant l’avenir incertain, l’autodidacte de Montréal-Nord avait vendu 60 000 billets de son spectacle avant sa première montréalaise, en novembre 2016. Femme ta gueule tournera partout jusqu’en 2018 et la jeune femme a déjà commencé l’écriture de son deuxième one woman show. L’été dernier, l’humoriste est devenue actrice dans deux suites très attendues qui sortiront au cinéma cette année : De père en flic 2 et Bon cop Bad cop 2. Elle est l’une des stars de Vrak (Code F. et Med) et l’idole des jeunes. Ah, oui, j’oubliais : elle a aussi assuré la première partie de l’hypnotiseur Messmer à l’Olympia de Paris, « l’expérience la plus fucked up de toute ma vie, personne ne riait, moi je pleurais, mon gérant me disait : “Tu vas retourner sur scène et travailler, travailler, travailler”, et je n’ai jamais été aussi bonne qu’après. »

Ouf ! Elle a raison sur deux points : tout cela est exceptionnel et elle est en effet très bonne.

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À la fois perfectionniste et intense

Deux jours avant notre rencontre, je l’avais vue sur scène dans une petite salle de banlieue. « T’étais là ? C’est le spectacle le plus difficile depuis le début de ma tournée parce que je n’ai pas eu les réactions auxquelles je m’attendais. Le numéro de la pipe, normalement, il y a un hurlement, là non. Je capotais. Tout le long du show, je me demandais : À quel moment vais-je leur annoncer que je m’en vais ? J’ai alors réalisé à quel point je suis rendue professionnelle, parce que j’ai réussi à offrir la même performance que d’habitude, même si à l’intérieur je mourais : Ah mon Dieu ! ah mon Dieu ! »

Je l’ai rassurée : rien n’a paru. Et je n’étais vraiment pas le seul à m’esclaffer pendant « le numéro de la pipe », où Mariana explique qu’elle ne pratique pas la fellation, repoussant une érection fictive en grimaçant tel un enfant qui esquive le brocoli. Ce sketch, très visuel et l’une des « perles » de Femme ta gueule, a été livré ce soir-là de main de maîtresse, malgré ses « ah mon Dieu ! » intérieurs.

Pourtant, Mariana la perfectionniste insiste. « J’aurais aimé que tu voies le spectacle l’été dernier à Magog. J’étais en feu, le public aussi, et quand tu goûtes à cette drogue-là, après tu fais… tabarnac ! » Elle s’arrête pour s’adresser à une grande blonde assise à sa droite sur la même banquette. « Je fais une métaphore sur la drogue, c’est correct ? » « Oui », répond sa voisine. Car la nouvelle coqueluche des médias ne rencontre les journalistes qu’accompagnée d’un membre d’Entourage, sa boîte de production. Ce jour-là, c’était Kristina. Étonnant, ce chaperonnage, pour une fille reconnue pour ses propos à faire mûrir une tomate verte et qui s’est fait un nom avec le désormais célèbre numéro du « sable dans le vagin ».

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« En entrevue, je m’emporte, je dis des choses, mais les lectrices ne me connaissent pas. Si je parle de drogue, certaines vont penser que j’en consomme. Je dois apprendre cela. Et ça vient avec le métier. En humour, il faut d’abord aimer l’humain, alors qu’en musique, on s’en câlisse si l’artiste a une belle personnalité. On va pas refuser d’aller voir Lady Gaga parce qu’elle a un caractère de marde, on veut la voir en show. Tandis que moi, si j’ai un caractère de marde, tu veux pas m’écouter pendant une heure et demie.

– As-tu un caractère de marde ?

– Comme tout le monde, il y a des jours où je suis insupportable. Je suis humaine, je reste une femme en devenir, j’ai 26 ans et les hormones dans le tapis, je veux tout faire et rien faire en même temps, je chiale sur tout et j’accepte tout. C’est très contradictoire ma vie en ce moment. »


Sur la photo: Chemisier chez Frank & Oak, Veste chez BCBG, Pantalons PINKO aux Cours Mont-Royal, Chaussures L’intervalle, Boucles d’oreilles chez H&M

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Mariana Mazza sur sa mère, sa carrière, son corps… et Denise BombardierPhoto: Geneviève Charbonneau

Mariana Mazza sur sa mère, sa carrière, son corps… et Denise Bombardier

Maman m’a dit

Mariana étonne et détonne, et cela va bien au-delà des jurons, des multiples tatouages et de son allure à la garçonne. Un exemple : son assurance. La scène, elle n’en fait qu’une bouchée. C’était déjà le cas il y a trois ans et demi au Centre Bell, alors qu’elle participait, inconnue parmi une enfilade de vedettes, à L’événement Avenir Lac-Mégantic. L’extrait qu’on peut voir sur YouTube est éloquent. « Cette confiance en moi est là depuis que je suis petite, à cause de ma mère, qui n’a jamais suivi les conventions et les lois, qui était capable d’aller acheter du lait en djellaba ou d’apporter sa boîte à lunch au cinéma. »

L’histoire de sa mère, qu’on a vue parmi le public de Tout le monde en parle, souriante et clairement fière de sa seule fille, Mariana l’a racontée à Nathalie Petrowski. Fuyant un mariage arrangé dans son Liban natal, elle a épousé un Brésilien – jusqu’à récemment, Mariana disait qu’il était uruguayen mais elle vient d’apprendre que ce n’est pas le cas –, le père de l’humoriste (que cette dernière n’a jamais connu). « C’est grâce à elle si je suis ce que je suis. Même si on me disait : “Tu parles trop, t’es un p’tit gars, t’es ci et ça”, j’ai été élevée par une mère qui me disait : “T’es belle”. Même quand j’avais pris du poids, “T’es belle”. Même quand j’avais plein de poils sur les jambes et les bras, elle ne voulait pas que je m’épile et me répétait : “T’es belle”. Ma mère, c’est une intense, et moi aussi. »

Mariana ne craint pas de dire qu’elle se trouve bonne et belle, assumant ses petites rondeurs, les célébrant même. À preuve, une photo d’elle postée sur sa page Facebook en août dernier, devenue virale. « Je jouais au tennis avec mon gérant. J’ai enlevé mon chandail – j’étais en brassière de sport – et il a pris la photo. Je me regarde et je suis vraiment belle, c’est beau mon ventre, il y a une confiance dans mon visage, c’est nice à voir. Beaucoup de filles ont mon corps, mes attributs, mon poil, et passent leur vie à essayer de les camoufler, et passent à côté de tout le bonheur qui vient avec, c’est incroyable. »

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Moi, vulgaire ?

Beaucoup n’y croyaient pas : Mariana Mazza et Denise Bombardier – qui a fustigé ceux « qui sacrent comme des charretiers » – sont amies. « On a des points en commun, on aime les femmes fortes, les gens qui s’assument. Denise se reconnaît à travers moi, elle me dit que je suis elle quand elle avait mon âge. On a une relation très privée et tellement belle. Un jour, je l’ai appelée de Val-d’Or en pleurant, je faisais une crise d’angoisse. On a parlé une heure et demie, j’ai raccroché et j’étais vraiment mieux. »

Que Madame B. – et, plus récemment, Karine Vanasse – ait succombé au magnétisme de Mariana n’est pourtant pas si surprenant. Cette fille est diablement attachante. « J’aime plaire. Ça vient du père manquant, du déficit d’attention dont j’ai souffert jeune, alors je trouve tous les moyens pour plaire. Avant, je cherchais une façon d’avoir de l’attention. Mais ça, c’est facile. Je pourrais me lever, crier et me mettre toute nue. Plaire, c’est autre chose. »

Elle n’est pas au goût de tout le monde, elle sait la chose impossible et, honnêtement, ce n’est pas ça qui l’empêche de dormir. Sauf qu’elle n’est pas très heureuse des titres du genre : « Mariana Mazza, aussi brillante que vulgaire » (TVA Nouvelles).

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« Je ne suis pas vulgaire, je suis directe. Je dis ce que j’ai à dire et ce n’est pas gratuit. Tu as vu mon show. Tout est réfléchi, calculé. Plus je suis intense, plus je fais attention à ce que je dis. Dans le numéro sur la masturbation, il y a une intelligence, une pertinence. Ce qui me rend fière, c’est de voir des femmes de l’âge de ma mère me regarder les bras croisés, rire, puis applaudir comme des malades. Les jeunes, je les ai dans ma poche depuis le début, je suis pour eux un modèle. »

As-tu l’impression de parler au nom d’une génération ?

« Malgré moi, oui, mais ce n’était pas le but. Depuis que je suis toute jeune, je veux changer le monde. Pas la planète au complet, mais mon monde à moi, 20 personnes, ou 50, ou 200 000, ou un million. J’aimerais que les générations futures se souviennent d’une fille qui est arrivée à un moment donné, qui a osé dire ces affaires-là et que, grâce à elle, il y a ça et ça. Avec mon histoire, mon passage sur Terre, je veux marquer l’imaginaire des gens. Pas parce que j’ai un problème d’ego et que j’ai envie qu’on parle de moi, mais parce que je veux inciter ceux qui s’en viennent à foncer. »


Sur la photo: Chemisier chez H&M, Veste DKNY aux Cours Mont-Royal, Bottillons L’intervalle, Boucles d’oreilles chez H&M

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À LIRE: Céline Bonnier: les grands recommencements

Mariana Mazza sur sa mère, sa carrière, son corps… et Denise BombardierPhoto: Geneviève Charbonneau

Mariana Mazza sur sa mère, sa carrière, son corps… et Denise Bombardier

Mariana en accéléré sur…

Le féminisme Être féministe, c’est vouloir que les femmes soient égales aux hommes. C’est évident que je suis féministe ! On l’est tous à moins d’être un fucking redneck raciste et misogyne du Texas. Ce que je déplore, c’est quand on choisit une fille parce que c’est une fille et non parce qu’elle est la meilleure personne pour une job. Ce que je fais, moi, ce n’est pas du féminisme, mais de l’encouragement positif à s’assumer.

L’humour, un monde macho ? Oui, c’est macho, parce qu’il y a beaucoup plus de gars que de filles. Mais, non, on n’est pas rejetées. Pour faire de l’humour, ça prend des testicules, faut avoir du chien et du culot.

L’amour J’ai fréquenté plusieurs gars mais, jusqu’à la fin de ma carrière, personne ne va savoir quand j’aurai un chum. Je ne veux pas. Sinon, on va perdre le focus. J’ai tellement de choses à dire par rapport à mon art, à ma vision des choses…

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Son rêve Je vis déjà mon rêve : j’utilise ma grande gueule pour parler aux gens, pour encourager, inspirer, faire réfléchir. OK, j’en ai un autre : être invitée à l’émission de France Beaudoin, En direct de l’univers. Je veux que mes amis viennent chanter pour moi.


Sur la photo: Robe DKNY aux Cours Mont-Royal, Boucles d’oreilles chez H&M


Nous remercions la Brasserie Harricana de nous avoir accueillis lors de la séance photo.

 

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