Bientôt, votre pharmacien pourra, entre autres, demander des tests de labo et prescrire certains médicaments... Et c’est beaucoup à Diane Lamarre qu’on le devra.
Diane Lamarre est présidente de l’Ordre des pharmaciens du Québec et de Pharmaciens sans frontières – Canada. Elle est propriétaire de deux pharmacies où elle pratique toujours ; elle enseigne à l’Université de Montréal et tient une chronique dans Le Journal de Montréal. Ah oui, elle est aussi mère de trois enfants. Superwoman ?
« Jamais de la vie ! » Elle ne s’est pas impatientée devant la question, elle en est probablement incapable. Elle est menue, élégante, et garde un ton posé. Mais elle est aussi passionnée, ultra-compétente et extrêmement décidée. Il le fallait pour atteindre le résultat qu’elle s’était fixé, et qui se matérialise enfin. Sous peu entrera en vigueur la loi issue du projet de loi 41, qui permettra aux pharmaciens québécois de jouer un rôle plus important dans le système de santé.
« Le projet de loi 41, c’est le bébé de Diane Lamarre », dit Christian Leduc, journaliste à L’actualité pharmaceutique, une publication destinée aux pharmaciens québécois. « C’est elle qui a mis ce projet sur la table et qui a donné l’impulsion nécessaire à sa mise en œuvre. »
Ce qui l’a menée là, c’est une statistique. « Presque le tiers des Québécois (29 %) n’ont pas de médecin de famille, dit-elle. Mais tout le monde a un pharmacien. Et les compétences de ce professionnel de première ligne étaient sous-utilisées. »
Or, elle savait que, pour élargir leur mandat, il fallait changer la loi. Grosse commande. On devait vaincre des résistances et rassurer les pharmaciens qui craignaient qu’on leur impose un surcroît de travail sans leur offrir une rémunération équitable.
Sa méthode : « On répond à toutes les questions, on peaufine les arguments, on trouve des solutions, dit-elle. Et on ne recule jamais. »
Les pharmaciens soutiennent qu’il est impossible de faire de la consultation sans y perdre leur chemise ? C’est pour prouver le contraire qu’elle a ouvert sa première pharmacie, il y a 22 ans, à une époque où très peu de pharmaciennes se lançaient en affaires.
Le ministre doute que ces professionnels aient les compétences nécessaires au mandat qu’ils réclament ? Diane Lamarre lui fournit les plans de cours des deux programmes de pharmacie (à l’Université de Montréal et à l’Université Laval) et elle s’engage à offrir une formation supplémentaire aux 6 000 pharmaciens du Québec.
Cette façon de faire, elle l’a perfectionnée en Bosnie, au Kosovo, en Ouganda, au Mali et en Haïti, où elle a participé à plus d’une trentaine de missions humanitaires avec Pharmaciens sans frontières. En Bosnie-Herzégovine, elle a travaillé à une réforme de la loi sur la pharmacie et la santé publique. « Il a fallu asseoir ensemble des Serbes orthodoxes, des Bosniaques musulmans et des Croates catholiques qui, peu de temps auparavant, étaient en guerre les uns contre les autres, explique-t-elle. Nous y sommes arrivés en nous concentrant sur leur seul point commun : le souci du patient. »
Cette même préoccupation, croit-elle, pourrait amener notre système de santé à mieux servir la population. « Depuis 30 ans, le Québec a formé plein de professionnels de la santé qu’on n’utilise pas de façon optimale. »
Diane Lamarre, elle, poursuivra sa douce révolution. Elle vient d’être élue pour un troisième mandat à la tête de l’Ordre des pharmaciens du Québec.
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