Entrevues

France Beaudoin refait le plein!

L’enfilade de talk-shows, fini pour elle. L’animatrice a pris congé tout l’été pour passer du temps avec ses enfants au chalet, en vélo, en Westfalia… et faire éclore de nouveaux projets. Place à l’imprévu!

« Je suis à une sortie d’autoroute. » France Beaudoin négocie le virage, le pied tantôt sur le frein, tantôt sur l’accélérateur. Depuis qu’elle a quitté les plateaux de télé, du moins pour l’été, elle apprend à décélérer. Après six ans d’heu­reuses rencontres à Bons baisers de France (Radio-Canada), elle a mis un point final à l’émission. Elle rêvait d’une vie normale, de vacances et d’horizons nouveaux.Petite, j’ai vécu des étés idylliques.

On les passait à Saint-Jacques-le-Majeur, au bord d’un lac, à 20 km de la maison de Disraeli. J’avais l’impression d’être au bout du monde! On était deux familles dans un chalet de trois chambres à coucher. On faisait des épluchettes de blé d’Inde, on se construisait des maisons dans le bois, on se baignait, on jouait au tennis. C’était comme ça pendant deux mois. Je souhaite que mes enfants vivent ça. Mon chum [le comédien Vincent Graton] va faire cet été la tournée des communautés francophones en caravane pour TV5. C’est possible qu’on aille le rejoindre en Westfalia aux Île-de-la-Madeleine, au Nouveau-Brunswick, dans la vallée de l’Okanagan… Je veux improviser.J’organise mon horaire à mon goût.

Je m’occupe des décors pour le spectacle de pirates de mon fils [Théo, 4 ans], j’accompagne ma fille [Juliette, 6 ans] à son cours de violon, je lis des histoires à la bibliothèque. Je suis de toutes les activités de parents bénévoles et j’adore ça! Je déjeune avec une personne, je dîne avec une autre. J’écoute, j’observe.

Je serai au chalet tout le mois de juillet. Je veux faire beaucoup de vélo avec les enfants. Mon but : goûter à toutes les sortes de crème glacée, avec toutes les garnitures qui vont dessus! J’ai envie d’aller à la pêche, de cueillir des framboises, de faire des pique-niques avec des herbes fraîches et un rosé, de dormir sur ma roche l’après-midi… J’ai besoin de la forêt pour faire une coupure. Je ne suis pas du genre à décrire sur Facebook la petite robe que je me suis achetée ou le gâteau que je suis en train de préparer…

Je ne pouvais plus continuer comme ça. J’enfilais les émissions – En direct de l’univers, La Rentrée de Radio-Canada, Le Gala Excellence La Presse/Radio-Canada, Bons baisers… À un moment donné, il faut que ça s’arrête. Ne serait-ce que pour livrer la commande. Au printemps 2010, j’ai dit à mes patrons : « Je pense que ce sera mon dernier été à Bons baisers. » [L’annonce officielle a été faite à la mi-octobre.] Cette année, dans ma famille, on vivait pour la première fois le cadre scolaire. Moi, je travaillais tous les samedis et tous les étés. J’étais complètement à l’envers du calendrier! J’ai beau vouloir intégrer les enfants à mon horaire, il y a des limites. Théo sera à la maternelle à l’automne, et Juliette en deuxième année. Combien de fois j’ai vu ma fille dans les bras des régisseurs, appuyer sur le bouton pour que j’entre en ondes! Théo, je l’allaitais cinq minutes avant de monter sur scène. Maintenant, mes enfants ont besoin de leur vie. Ce n’était plus l’fun pour eux d’être dans les coulisses tout le temps. Et pour moi, c’était trop.



 

France Beaudoin : la séance photo
Avec ou sans chapeau? Comme dans un champ ou au bord de la mer? Le concept de la séance photo a changé mille et une fois, mais France Beaudoin s’est prêtée au jeu avec plaisir!

Mon chum n’a pas été surpris de ma décision. La réaction des enfants a été plus rock’n’roll! On était assis à table. J’ai dit : « Maman va être à la maison cet été parce qu’on ne fera plus Bons baisers. » Juliette m’a demandé : « Ça veut dire qu’on n’ira plus dans le décor? » J’ai répondu : « Non, mais on va faire plein de choses, aller à la campagne… » Finalement, le fait d’avoir passé toutes ces années sur le plateau ne les a pas vraiment traumatisés!

Les gens sont contents pour moi. Mais, dans le milieu, on m’a bombardée : « Tu ne réalises pas ta chance d’avoir un talk-show. Tu as 41 ans. Les femmes vieillissent vite à la télé, ça ne va pas repasser! » J’ose penser que mon choix est un investissement pour ma santé, pour ma vie, pour mon équilibre. Je n’avais plus de place dans ma tête. Ce métier porte à croire que si tu n’es plus à la télé tu n’existes plus. J’ai toujours pensé que je pourrais faire plein de choses, comme enseigner… Ce que j’aime par-dessus tout, c’est créer, rencontrer des gens.

Il fallait que je retrouve un équilibre. Ne plus avoir peur de mourir – j’ai été hypocondriaque et ne suis jamais loin d’une rechute! Quand je me mets à avoir peur de la mort, c’est parce que le temps m’échappe. La panique me prend. C’est ma sonnette d’alarme – je la connais parce que j’ai fait un burnout dans la vingtaine. Elle me signale que la vie me glisse sous les pieds, que je ne suis pas exactement là où je voudrais être. Je savais que je pouvais changer quelque chose dans cette dynamique familiale essoufflante. Si la question s’était posée plus tôt, peut-être que j’aurais été déchirée entre le travail et les enfants. Mais, après six ans, j’ai vraiment l’impression que le temps était venu de me retirer.

Je veux continuer à animer, mais je songe aussi à créer une boîte de production. J’ai commencé avec En direct de l’univers et je veux développer ça. J’ai plein de projets, dont un show télévisé en partenariat avec une grosse société américaine – on est en pleine négociation –, et une émission sur les « vieux » de 70 ans qui chantent. Peut-être que rien de tout ça ne verra le jour, mais l’idée, c’est d’avoir du fun! J’ai la volonté (ou la naïveté, on verra!) de créer des dynamiques d’équipes ultra motivantes qui permettent un équilibre entre le travail et la famille. Je lis beaucoup là-dessus. Prendre quatre mois, ça me permet de faire le point, de faire du développement… et de regarder pousser les framboises!

 


 

France Beaudoin : la séance photo
Avec ou sans chapeau? Comme dans un champ ou au bord de la mer? Le concept de la séance photo a changé mille et une fois, mais France Beaudoin s’est prêtée au jeu avec plaisir!

Ces projets ne sont jamais aussi prenants qu’une quotidienne. J’étais en ondes chaque soir. J’avais continuellement des choses à mémoriser. J’avais l’habitude de lire cinq livres par semaine, des pages et des pages de dossiers, de voir tous les films, tous les documentaires, de me taper quatre bulletins de nouvelles par jour. On doit toujours être à l’affût des gens qui font l’actualité sur un plateau comme celui de Bons baisers. La discussion peut te mener partout. Tu commences avec Michel Tremblay, tu finis avec les gaz de schiste! C’est pourquoi, quand j’ai arrêté, j’ai dû me désintoxiquer de ce rythme accéléré.

Savoir partir, c’est important. On peut le faire sans se renier. C’est une force. Et c’est parce qu’on est fort de tout ce qu’on a été, sur le plan personnel ou professionnel, qu’on peut passer à autre chose. Je vois plusieurs avenues. Si j’arrive un jour à un cul-de-sac, je virerai de bord. Se tromper de chemin, ça n’existe pas.

J’ai souvent pris des risques. Le fait d’avoir une famille m’aide à le faire. Quand j’ai quitté Deux filles le matin à TVA [au printemps 2005], je n’avais rien! Je ne savais pas que j’allais animer Bons baisers à Radio-Canada. Au début de ma carrière, j’ai commencé comme reporter puis comme présentatrice du bulletin de nouvelles à TQS Estrie. Un an plus tard, un job de recherchiste s’ouvrait à CKAC, à Montréal. On m’a dit : « Lectrice de bulletin à 20 ans, c’est rare. Tu ne retrouveras jamais ça. » L’année suivante, on m’a offert 15 minutes en direct de nouvelles culturelles à l’émission La vie en Estrie à TVA Estrie. Encore là, on m’a dit : « Si tu quittes Montréal et une grosse boîte comme CKAC à 21 ans, tu n’y reviendras pas… » Toutes ces expériences m’ont appris à faire confiance à mon feeling.

En direct de son univers

Chez elle, il ne se passe pas trois jours sans musique. Autour du piano, il y a une guitare, une clarinette, une trompette, un harmonica, un violon… Tout le monde se partage les instruments. Son seul regret : s’être fait dire à huit ans, par sa chef de chœur, qu’elle chantait faux. Depuis ce jour, le son ne sort plus…

Sa chanson du moment : Sorry, I’m Happy, de France d’Amour
« Comme elle, j’ai le goût d’être heureuse, et j’ai l’intention de tout faire pour cela! »

Sa chanson de couple : On va s’aimer encore, de Vincent Vallières
« Les paroles me font pleurer. Être parent, c’est un travail à temps plein. Tu peux facilement te perdre. Mais si tu y tiens, ça peut marcher. »

Ses tounes de l’été

Poisson d’avril, de Marc Déry
« Pour la lenteur, la nature… Je le vois avec un chapeau et les mouches qui lui tournent autour. »

Hurts so Good, de John Mellencamp
« J’ai 16 ans, je suis à Vancouver avec des amis. Tout est possible. »

Summer of ‘69, de Bryan Adams
« Je suis née à l’été 1969. Dans ma tête, il l’avait écrite pour moi! »

Ain’t no Mountain High Enough, de Marvin Gaye et Tammi Terrell
« Pour son effet antidépresseur et le coup de pied au cul qui vient avec : “Crois, rêve… Tu peux compter sur moi…” Elle me porte à composer avec les événements, à ne pas me braquer, à grimper les montagnes, à surfer sur la vague, à découvrir un chemin que je ne soupçonnais pas, à agir, à faire des choix et à jouer des tours à la vie… »



 

France Beaudoin : la séance photo
Avec ou sans chapeau? Comme dans un champ ou au bord de la mer? Le concept de la séance photo a changé mille et une fois, mais France Beaudoin s’est prêtée au jeu avec plaisir!

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