Société

Les femmes qui nourrissent le Québec : Nathalie Joannette

Pour elle, la confection des cochonnailles relève à la fois de l’art, de la science et du respect des méthodes artisanales.

Nathalie Joannette a la couenne dure. Tant mieux ! Car de la détermination, il en fallait à la Kamouraskoise d’adoption pour se lancer, il y a 17 ans, dans la préparation de saucissons artisanaux bios et sans nitrites. Une audace qui a payé. À preuve, les prix raflés à l’international pour Fouducochon, l’entreprise de celle qu’on surnomme désormais « la Reine du saucisson ». « Quand je vais en France, on me déroule le tapis rouge ! » badine la quinquagénaire à l’air espiègle, vêtue de son éternel sarrau blanc.

Dans la chair de ses charcuteries lactofermentées, des aromates dont le nom évoque la région fouettée par l’air salin où ils sont cueillis à la main : persil de mer sauvage, poivre des dunes… Et sur leur surface, de délicats motifs dessinés par la flore microscopique de champignons, de bactéries et de levures indigènes qui créent en bouche des saveurs aussi complexes que gourmandes.

« On dit que nos saucissons goûtent le Bas-Saint-Laurent. C’est parce qu’ils sont affinés ici, et que la flore se trouve naturellement dans l’air. Je pourrais reproduire exactement la même recette en Abitibi et le goût serait différent », explique celle qui se considère comme une intello passionnée de la viande.

Ces bâtons des dunes, grelots des battures ou grassouillets à l’ail ont beau être de la plus pure tradition française, ils ont parfois déstabilisé les carnivores québécois, moins familiers avec ces méthodes de fabrication du terroir. « Il m’est arrivé souvent à mes débuts que des gens recrachent le produit dans ma main », se remémore-t-elle. Le souvenir ne l’émeut même pas.

C’est que pour Nathalie Joannette, la consommation responsable est une conviction inébranlable. « Dans ce monde industriel, j’ai le goût de travailler à l’ancienne. Ça ne veut pas dire de ressortir le jute et les nappes à carreaux ! Ça s’exprime dans les techniques de travail, dans le respect et l’éthique. »

La maître charcutière a déjà relevé les manches de son sarrau pour son prochain projet d’envergure : la construction de sa propre ferme d’élevage bio. Elle évoque les 200 cochons qui vivront à l’extérieur, fertilisant des parcelles où pousseront ensuite des légumes, selon un modèle d’agriculture régénérative, et accessible au public. « C’est une façon d’aller plus loin dans ce en quoi je crois ! »

Tête de cochon, Nathalie Joannette ? Oui, absolument. Et fière de l’être.

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