Société

L’espoir et la peur

Quel bizarre début d’année. La crise économique se mondialise, nous n’y échapperons pas, et au même moment, la planète entière, le Canada y compris, se réjouit de l’arrivée de Barack Obama à la Maison-Blanche le 20 janvier. L’espoir politique est revenu dans le pays le plus cynique du monde.

Disons qu’ici on a l’impression d’être loin de ça, mais les Barack Obama ne courent pas les rues. Et encore faut-il les reconnaître quand ils se présentent devant nous.

Le soir des élections, j’avais peine à y croire. Les Américains, que d’ici nous percevons comme racistes, superficiels, voire demeurés, ont fait un geste inouï : ils ont élu un Noir à la présidence. Ils ont élu un jeune, finis les boomers au pouvoir. Et ils ont élu un homme qui parle d’espoir, de changements profonds. Je me pince encore pour y croire. C’est comme si le XXIe siècle venait vraiment de commencer.

Les défis qui l’attendent sont énormes : deux guerres, une des pires crises financières et économiques de l’histoire, la menace constante d’attaques terroristes. Et je crains pour sa sécurité personnelle. Trop facile d’y voir des parallèles avec John F. Kennedy.

Ce n’est pas un messie venu du ciel. Contrairement à son prédécesseur, il ne se croit pas investi d’une mission divine. On peut lui prédire des jours difficiles, il aura à prendre des décisions qui ne seront pas toujours populaires aux yeux de ses partisans, mais on sent sa détermination, malgré les embûches. Un homme intelligent sait qu’il n’y a pas de solutions simples à des problèmes complexes.

Les guerres ne se règlent pas en deux temps, trois mouvements, et on ne peut rien aux crises économiques. Ou si peu. Il a du pain sur la planche mais l’espoir est au rendez-vous, c’est palpable.

Ici, nous commençons l’année avec de nouveaux gouvernements. Fortement calqués sur les anciens. Les têtes ne changent pas tellement. Les dossiers sont les mêmes : la santé, l’éducation, l’identité nationale et le petit nouveau, l’environnement, dont on parle beaucoup mais pour lequel, au plan individuel, nous ne sommes pas prêts à faire grand-chose.

Est-ce une impression que j’ai ou on n’a pas avancé depuis 30 ans ? On parle toujours de la même chose et les résultats se font encore attendre. Difficile de ne pas être cynique quand on sait depuis combien de temps on veut régler le problème des listes d’attente en santé.

Mais en 2009, quelque chose va changer, qu’on le veuille ou non. Qui ne ressent pas l’angoisse de l’incertitude économique ? Le spa acheté à crédit l’an dernier sera pas mal moins relaxant cet hiver. Le voyage à crédit dans le Sud qu’on voudrait se payer pendant la relâche scolaire est moins tentant cette année. Je lisais dans le New York Times que si les magasins de vêtements sont vides aux États-Unis, les ventes de rouges à lèvres, elles, sont en hausse de 40 %.

On ne sait pas encore quelle forme la crise prendra chez nous, mais elle va nous forcer à changer nos habitudes de consommation. Après la simplicité volontaire, voici la simplicité involontaire, mais je crois qu’elle sera bienvenue. Cette fois, ce questionnement ne sera pas enveloppé de discours spirituels.

Car j’ai la conviction que beaucoup sont soulagées, au fond d’elles-mêmes, de voir la mode de la consommation à outrance prendre fin. Ouf ! se disent-elles, on va enfin y voir clair entre les désirs et les besoins. Sans verser dans le misérabilisme, la culpabilité ou la « victimite », l’occasion est belle de revoir ses priorités.

L’effet Obama se fera sentir bien au-delà des frontières américaines. Je souhaite seulement que cet homme d’exception réussisse à mieux gérer les priorités américaines, car leur influence est universelle.

Bonne année à toutes et à tous.

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