Il y a quelques semaines, Desjardins annonçait officiellement le début de la récession au Québec peu après avoir affirmé que nous allions y échapper… Moi, je ne l’ai pas vue arriver : elle a dû entrer par la porte de derrière. Depuis, on sent un courant d’air froid qui circule.
J’étais à Londres avant Noël : on ne parlait que de crise économique. Là-bas, les gens se plaignent surtout du credit crunch (le resserrement du crédit), car la Grande-Bretagne est l’un des pays les plus endettés au monde. Ce n’est pas tant qu’ils n’ont pas d’argent, mais ils n’ont plus accès au crédit. Ne pas pouvoir sortir sa Visa pour acheter un parfum parce qu’elle est « toppée », ce n’est pas si grave. Par contre, avoir de la difficulté à obtenir une hypothèque, le plus gros emprunt dans une vie, c’est une autre paire de manches.
Ici, on ne sait pas encore quelle ampleur prendra la récession. Mais il est certain que des hommes et des femmes seront affectés à différents degrés, ainsi que leurs familles. Des emplois seront perdus. Les plus pauvres y goûteront plus que d’autres. Même les organismes censés leur venir en aide sont touchés. Pas étonnant que Québec Solidaire ait fait élire son premier député, Amir Khadir.
Toutes ces personnes devront se serrer la ceinture. Elles vont prier pour que la fourgonnette « toffe » encore une année. Espérer que l’hiver ne soit pas trop dur pour ne pas avoir à payer des factures de mazout hallucinantes. Mais elles vont surtout agir, établir des priorités : acheter des bottes d’hiver, oui mais, en revanche, repousser l’achat de biens plus luxueux.
Pas besoin de perdre son emploi pour se livrer à cet exercice. Pour enfin mettre fin au gaspillage. Pour consommer intelligemment.
Pour ma part, comme c’est une nécessité d’être bien vêtue au travail, les vêtements représentent une partie importante de mes dépenses. J’ai donc adopté le style « chic récession ». Dans une friperie, j’ai trouvé un veston griffé dont TOUT le monde me parle. J’ai acheté chez Payless des bottes de soirée en satin qui semblent tout droit sorties d’un magasin de luxe. Je suis allée faire une virée à Plattsburgh où vient d’ouvrir une succursale du légendaire magasin à rabais Target (les snobs disent « tar-jet ») : j’y ai trouvé un sac à main de la designer Anya Hindmarch, créé spécialement pour la chaîne, à moins de 50 $. Normalement, ces sacs coûtent des centaines, voire des milliers de dollars. Et je suis pâmée devant le nouveau mascara Maybelline, dont je parle à tout mon entourage comme étant la huitième merveille du monde.
Pas de voyage dans le Sud cet hiver non plus. De toute façon, qui resterait à la maison pour s’occuper du petit dernier de la famille ? Il y a un an, j’ai perdu mon chien Ben, mon beau Labrador blond, emporté par un cancer. Ma fille a reçu en cadeau un bébé caniche que nous avons baptisé Toby. Moi qui n’aimais que les gros chiens, je suis tombée amoureuse de cette petite boule de laine grise qui aime se coller et se faire gratter le ventre pendant des heures. Des activités pas très onéreuses. Grâce à lui, je pourrai même me passer de gym car il exige quatre sorties par jour !
Oui, la récession est là. Mais c’est l’occasion d’être solidaires. De se montrer généreux (ce que les Montréalais ont très bien fait lors de la dernière campagne Centraide, qui a récolté près de 55 millions de dollars malgré l’incertitude économique), de réapprendre la valeur de l’argent et de tirer des leçons du chaos. De se rapprocher pour se réchauffer le cœur comme le corps. Et de profiter de plaisirs simples comme porter un beau vêtement acheté pour une chanson et jouer à la « baballe » dans la neige avec son chien.