Je m’étais promis de l’emmener voir le film avant Noël. J’avais vérifié s’il y avait du sang, de la violence. Il n’y avait que cette scène de pendaison, de suicide, au tout début. Pas moyen d’y échapper.
J’ai hésité, mais je me suis dit que c’était l’occasion ou jamais d’en parler avec lui.
Mon B était ravi d’aller voir Monsieur Lazhar, nomination aux Oscars ou pas. Moi aussi. Pas pour les mêmes raisons. Mais nous avons tous les deux été charmés par ce prof érudit, immigrant au passé lourd qui tente de refaire sa vie dans une cour d’école primaire de Montréal.
En ressortant du film, nous sommes allés nous asseoir dans notre resto préféré. Petite conversation mère-fils au menu:
– Ça t’a fait quoi de voir le professeur qui se suicide? (Je lance le sujet en prenant mon courage à 4 mains).
– Ben, j’ai trouvé ça triste. Surtout le p’tit gars qui la trouve…
– Est-ce que tu savais que mon père s’est suicidé?
– Hein! Non! (en continuant à manger sa lasagne). Est-ce que c’est toi qui l’a trouvé?
– Non. C’est mamie. J’étais enceinte de toi…
– Ah!
– Je voulais t’en parler pour que tu saches que ce n’est pas une solution et combien ça m’a fait de la peine. Et pour que tu saches aussi que tu peux toujours me parler de tout, n’importe quand. Des fois, ça fait du bien de parler. On pense que les autres s’en fichent, mais c’est pas vrai. Tu comprends?
– Oui… D’abord, est-ce que je peux te poser une question importante maman?
– Oui, n’importe quoi, mon chou!
– C’est qui le lutin de Noël qui m’appelle chaque année?
Y’a des jours où vous sous-estimez la capacité d’adaptation et d’éveil des enfants. Y’a des jours où vous mesurez la distance entre votre monde et le leur. Y’a des jours où vous vous dites qu’on ne devrait pas sortir de l’enfance trop vite.
Finalement, c’est le film sur les lutins de Noël que j’aurais dû aller voir avec mon B.