Partout, on entend des gazouillis (traduction de twittering), en particulier dans le milieu des communications ; au Québec, ce média social compte déjà des milliers d’adeptes.
Il n’y a pas si longtemps, lorsqu’on disait « twit », c’était pour insulter quelqu’un. Aujourd’hui, un tweet, c’est un microbillet de 140 caractères maximum, rédigé par un illustre inconnu – votre voisine? –, un journaliste ou un animateur télé sur twitter.com.
L’automne dernier, Twitter comptait 175 millions d’abonnés dans le monde entier ; les dirigeants de l’entreprise, fondée en Californie en 2006, estiment à 370 000 le nombre de nouveaux utilisateurs par jour.
Selon la spécialiste du commerce électronique Michelle Blanc, auteure du livre Les médias sociaux 101, Twitter et Facebook équivalent à un « réseau mondial de beaux-frères et de belles-sœurs ». Et comme dans n’importe quelle famille, il y a des membres plus intéressants que d’autres.
La sexologue Jocelyne Robert (@JocelyneRobert) est présente sur Twitter depuis environ un an. « Au départ, c’est mon attachée de presse qui m’a conseillé d’y aller, au moment de la sortie de mon livre Les femmes vintage », raconte-t-elle. Aujourd’hui, la sexologue dit être victime de l’engouement du néophyte. « Je suis très seule dans mon univers professionnel et ce site comble un besoin de convivialité et de partage que je n’aurais pas autrement », ajoute-t-elle.
Le « twivage » en direct
« Twiver », c’est bavarder pendant qu’on regarde la télé. Vous trouvez le mot-clé de votre émission préférée (Tout le monde en parle : #tlmp, Occupation double : #occupationdouble) et vous commentez avec d’autres téléphages. Si vous avez de la chance, l’animateur le fera en direct avec vous. C’est le cas de Guy A. Lepage et de Dany Turcotte (@danyturcotte), qui twittent presque tous les dimanches soir. Véronique Cloutier (@CloutierV) le fait pendant Les enfants de la télé (#EDLT), et Sophie Thibault (@ThibaultSophie), pendant les pauses publicitaires du TVA 22 heures (#TVA). Quant à l’émission C’est juste de la TV (#cjdltv), sur les ondes d’ARTV, elle organise des séances de « twivage » en compagnie des animateurs Marc Cassivi (@MarcCassivi) et Anne-Marie Withenshaw (@amwithenshaw) à l’occasion de grands rendez-vous télévisuels, comme le Gala de l’ADISQ. Pourquoi « twiver »? Pour en apprendre sur les dessous de l’émission, pour échanger avec les artisans de la télé.
Twitter s’avère également une source inépuisable pour qui cherche une information dans un domaine précis. Vous aimez découvrir les nouveaux restos? Vous pouvez vous abonner à des critiques gastronomiques : Marie-Claude Lortie de La Presse (@mclortie), Lesley Chesterman de The Gazette (@lesleychestrman) ou Gildas Meneu de Voir (@gmeneu). Vous aimez voyager? De nombreux chroniqueurs voyage comme Gary Lawrence (@LawrenceGary) ainsi que plusieurs guides touristiques (@fodorstravel, @TimeOutNewYork, @MichelinGuides) twittent aussi allégrement.
Au Québec, selon l’étude NETendances du Centre francophone d’informatisation des organisations (CEFRIO), on évalue à environ 11 % la proportion d’internautes québécois inscrits sur Twitter, en majorité des hommes.
« Le phénomène est en émergence, mais il demeure tout de même marginal au Québec, observe Najoua Kooli, directrice de l’étude NETendances. Ce sont les innovateurs, ceux qui adoptent rapidement les nouvelles modes, qui s’y trouvent pour l’instant. C’est un bon moyen pour réseauter, établir des contacts. »
Le succès quasi instantané de ce nouveau moyen de communication s’explique en grande partie par sa simplicité d’utilisation : vous vous inscrivez, et le tour est joué. Vous pouvez ensuite assister à la conversation – sans intervenir – en vous abonnant aux comptes des autres, ou vous pouvez plonger et ajouter votre grain de sel. Le truc, si on veut être remarqué, c’est d’être bref, précis et, surtout, « punché ». Le fait d’avoir accès à des vedettes autrement inaccessibles est une raison de plus qui explique la popularité croissante de ce média social.
Les stars internationales sur Twitter
Ce sont l’actrice Demi Moore (@mrskutcher) et son mari, l’acteur Ashton Kutcher (@aplusk) , qui ont lancé la mode avec des photos et des informations sur leur vie quotidienne. À eux deux, ils comptent près de 10 millions d’abonnés. Depuis, nombreuses sont les stars internationales qui gazouillent allégrement. Mais il faut savoir séparer le bon grain de l’ivraie. Certains comptes sont faux et une petite recherche s’impose. Parmi les plus connus, on trouve la veuve de John Lennon, Yoko Ono (@yokoono) , l’acteur Steve Martin (@SteveMartinToGo), l’écrivain brésilien Paulo Coelho (@paulocoelho) et l’animatrice Ellen DeGeneres (@TheEllenShow) .
C’est la possibilité d’échanger avec des journalistes – nombreux à gazouiller – qui a attiré Vicki Fragasso-Marquis (@Vickilalune), étudiante en communication et en sciences politiques à l’Université de Montréal. « Un ami m’a transmis la “maladie”, dit la jeune femme de 21 ans en riant. Je suis “abonnée” principalement à des journalistes. Ça me permet d’approfondir mes connaissances, d’échanger et de découvrir le côté plus relax de leur personnalité. »
L’étudiante passe environ une heure par jour sur Twitter. Elle participe aussi aux séances de « twivage » (voir Le « twivage » en direct), des échanges à chaud durant des émissions de télé. « Ce n’est pas plus abrutissant que certaines émissions, note-t-elle. Et puis, j’ai l’impression de mieux connaître les gens que je vois à la télé. »
Au Québec, Twitter a pris de l’ampleur surtout en janvier 2010, dans les minutes qui ont suivi le séisme en Haïti. Le site de microblogage s’est soudainement transformé en centrale d’information : on cherchait un collègue ou un ami, on publiait les premières images de la catastrophe, on relayait l’information. Depuis, les internautes se tournent vers Twitter à l’occasion d’événements importants, ou encore pour suivre des résultats électoraux, les travaux de la commission Bastarache, etc.
En fait, on trouve de tout sur Twitter. On peut s’abonner aux grands journaux de la planète comme le New York Times (@nytimes) ou The Guardian (@guardiannews) ou lire les commentaires éclairés du dalaï-lama (@DalaiLama). De nombreux politiciens y sont aussi, le plus actif au pays étant le député libéral Denis Coderre (@DenisCoderre), qui commente en direct les matchs de la Ligue nationale de hockey… Même des chefs – stars de l’heure – partagent petits mots d’esprit et recettes, tels le Britannique Jamie Oliver (@jamie_oliver) et Éric Gonzalez de L’Auberge Saint-Gabriel (@GonzalezEric), dans le Vieux-Montréal.
Le grand manitou de Juste pour rire, Gilbert Rozon (@GilRozon), la chanteuse Cœur de pirate (@beatricepirate) et l’animatrice Marie-France Bazzo (@MFBazzo) joignent régulièrement leurs voix au concert de gazouillis.
Qui suivre au Québec?
Avec 50 000 abonnés, le journaliste Dominic Arpin (@DominicArpin) est sans doute le Québécois le plus populaire sur Twitter. Mitsou Gélinas (@mitsougelinas) est présente du matin au soir, tout comme Anne-Marie Withenshaw (@amwithenshaw) . Parmi les plus colorés, Benoît Dutrizac (@Dutrizac) et la spécialiste des réseaux sociaux Michelle Blanc (@MichelleBlanc) . La productrice et animatrice Julie Snyder (@snyderjulie) raconte les coulisses du Banquier, et a twitté tout au long de son entrevue spéciale avec Céline Dion, qui, elle, ne gazouille pas. Les commentaires déjantés du comédien David La Haye (@DavidLaHaye) valent le détour, ainsi que les recettes de Ricardo (@Ricardocuisine) .
Cette diversité a séduit Christine Pouliot (@Crispicrunch), courtière habitant la Rive-Sud et auteure d’un blogue avec sa sœur. « C’est Facebook qui m’a menée à Twitter, dit-elle. J’y passe une heure, une heure et demie chaque jour. C’est ma revue de presse quotidienne. J’aime les échanges d’information ainsi que l’aspect créatif de cette plateforme. »
Abonnée depuis un an et demi, Christine Pouliot y a même lié des amitiés. « J’ai fait la connaissance de filles sympas, des foodies comme moi, et nous nous sommes rencontrées “pour de vrai”. »
Crispicrunch, devenue un véritable « personnage » sur Twitter, apprécie également l’aspect démocratique de ce média social. « Un journaliste du New York Times ne t’accepterait pas nécessairement comme ami sur Facebook, souligne-t-elle, mais tu peux le suivre sur Twitter sans lui demander sa permission. »
La moitié des abonnés de Twitter consultent le site pour y glaner des renseignements. L’autre moitié est plus active et y va de ses propres petites compositions de 140 caractères. « Mais attention, avertit Najoua Kooli, du CEFRIO. Pour être sur Twitter, il faut avoir quelque chose à dire. » Il faut aussi des abonnés si on veut que ses propos trouvent un écho dans cette grande communauté virtuelle. Mais comment se tailler une place au soleil? Avec de l’humour, des observations pertinentes et de l’information à divulguer. Bien sûr, la notoriété ne nuit pas. En octobre dernier, Guy A. Lepage (@guyalepage), qui préside au rendez-vous dominical Tout le monde en parle, avait près de 30 000 personnes « à ses trousses », soit l’équivalent de la population d’Alma. « Merci à vous tous, écrivait-il sur Twitter. Je vise maintenant Vaudreuil-Dorion! »
Soyons honnêtes, on y trouve aussi des trucs très idiots : des blagues stupides, des phrases creuses (« Merde, il pleut et j’ai oublié mon parapluie! ») et des commentaires insignifiants (« Mon café n’est pas buvable, pouahhh! »). Bref, Twitter peut être à la fois un formidable outil de recherche, un fil de presse, un temple du narcissisme ou encore une façon divertissante de perdre son temps.
En fait, l’intérêt de ce site dépend de l’utilisation qu’on en fait. Mais attention, il peut créer une forte dépendance. J’ai consulté Twitter au moins 40 fois durant la rédaction de ce texte.
Aussi
Vous êtes une néophyte du «tweet»? Pour vous y retrouver consultez notre lexique ici.
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