Culture

Livre: Pêche ou la douleur qui déborde

Comme premier roman, l’écrivaine galloise Emma Glass nous propose une fable saisissante. Pêche est un titre à retenir.

Photo: Getty/Asia Marosa

Pêche, Flammarion, traduit de l’anglais par Claro, 128 pages

L’histoire

Un soir, rentrant seule chez elle, une jeune fille est violée. À la maison, elle évite ses parents et se réfugie dans la salle de bains, lave le sang qui coule sur ses jambes, tente de reprendre ses sens, de calmer le sentiment d’horreur qui l’étouffe. Elle entend sa mère lancer: «[…] le repas est prêt!» Alors, elle mange, s’amuse avec son petit frère, avec le chat… Et, sans s’en douter, s’installe dans un univers parallèle où dominent l’effroi et l’immonde odeur de gras de son agresseur. Les jours suivants, à l’école, elle ne dira rien non plus à son amoureux, à ses camarades, à ses professeurs. «Faisons comme s’il ne s’était rien passé.» Or, il s’est bel et bien passé quelque chose.

Les personnages

Pêche, adolescente dont la vie bascule à jamais à la suite d’une agression sexuelle. Qui refuse de se confier, n’acceptant pas le rôle de victime. Elle rejette le cliché: «Oh, il m’est arrivé cette terrible chose quand j’étais jeune. Il m’a volé une part de moi (dit d’une voix brisée, haletante)… une part de mon âme.» Elle répète, pour s’en convaincre: «Je suis quelqu’un de fort, de solide.»

Ses parents, couple fusionnel. Bébé, son frère, et Sid, le chat. Vert, son amoureux, garçon doux et tendre. Lincoln, le violeur, qui continue à harceler la jeune fille et qui ira très loin, trop loin, la poussant vers des solutions extrêmes.

On le lira

Pour l’écriture puissante de l’autrice, qui scande la «rage brûlante» de Pêche. Qui rappelle, à l’heure du mouvement #MoiAussi, la violence sournoise faite aux femmes depuis si longtemps. Qui martèle leur peur viscérale, leur honte. Qui expose en images fortes, dures, crues, combien on vit dédoublée de soi lorsqu’on oblitère le choc: «C’est presque comme tous les jours.» Ainsi Pêche, seule avec son secret, se met à grossir, grossir… «Je suis une baleine échouée. […] Baleine BAL-HAINE…»

Photo: Sarah Lee

L’autrice

Emma Glass

Née à Swansea, au Pays de Galles, Emma Glass a 30 ans. Pendant ses études littéraires à l’Université du Kent, elle commence la rédaction de Pêche. Puis, elle abandonne, change de voie et devient infirmière. Dix ans plus tard, elle reprend son manuscrit. Enfin publié, le roman – non autobiographique – reçoit des critiques très élogieuses. Toujours infirmière, l’autrice vit maintenant à Hampstead, quartier branché de Londres, et travaille à l’Hôpital pour enfants Evelina London.

À lire aussi: Passages des ombres, de l’auteur islandais Arnaldur Indridason

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