Samedi matin, on regarde l’état du plancher, et on se dit qu’il faudrait bien le laver. Les feuilles mortes s’y ramassent à la pelle, les poils de chien aussi. Tu vois, je n’ai rien oublié.
Tant pis! Viens le chien, on va courir! Tant qu’à devoir faire le ménage, autant ramener un peu plus de poussière, de terre, et de feuilles mortes.
Le paradoxe, c’est de réaliser – en courant évidemment – que la course s’est occupée de faire le ménage dans nos vies. Un ménage nécessaire, utile, qui nettoie et fait voir la vie d’un œil neuf.
La course fait le ménage dans nos corps, nous délestant de ces kilos qui pesaient sur l’ossature, l’énergie, le moral. On dira tout ce qu’on voudra sur l’importance de s’accepter comme on est, on se rend bien compte qu’il y a un poids dans lequel, naturellement, on se sent à notre meilleur. Rien à voir avec l’esthétique, tout à voir avec une énergie décuplée, qui dynamise tout le reste de notre vie.
Le bilan de santé est à l’avenant. « Pas de cholestérol, pas de haute pression, pas de diabète, vous êtes plus en forme que moi, madame » me dit ma jeune médecin, « continuez de courir, et on ne se verra pas souvent ».
La course fait le ménage dans notre façon de manger. Sans se forcer, sans calculer, ni les portions, ni les calories, ni les glucides, on mange mieux. Parfois plus. On ne voit plus la nourriture comme une source de kilos maléfiques qu’il faut redouter, mais comme ce qu’elle devrait toujours être : un carburant essentiel pour ce corps qui nous sert si bien. Du coup, on lui donne de la qualité.
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La course fait le ménage dans nos peurs, bien installées depuis l’enfance. Attention, tu vas tomber, attention tu vas trop vite, tu vas trop loin, tu n’y arriveras pas.
Ben oui, ben oui, j’y arrive. Avec des efforts, en tombant plusieurs fois, mais j’y arrive. Et ça me rend fière et forte. Tiens, toi, la peur. Va te coucher.
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La course fait le ménage dans nos placards. Le « skinny jean » est trop serré des mollets… et trop grand de la taille! Signe que notre corps est devenu un véhicule utilitaire sport. On ne supporte plus ce qui contraint, serre, pince et brime. Les talons hauts sortent moins souvent qu’avant. L’élégance d’accord, mais plus au prix du confort.
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Et puis, il faut bien le dire… La course fait aussi le ménage dans l’entourage.
Tout naturellement, sans chicane, sans grandes explications, les gens qui, chroniquement, se cultivent le bobo en serre chaude, ceux qui nous pompaient l’énergie de leur « moi, moi, moi » sans jamais penser que l’amitié, pour être belle, se décline au « nous », ceux-là sont partis.
Tombés comme des feuilles mortes, emportés par le vent, sans doute importunés par nos résolutions à privilégier ce que la vie a de mieux à offrir. Va savoir…
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Samedi matin. On revient de courir avec le chien, les pattes et les runnings sales, mais le cœur content.
Le ménage est fait.