L’histoire
Années 1990, Université Vassar. C’est la fiesta de fin d’études. Au premier regard, Lotto « grand, drôle, magnifique », prince de la soirée, tombe amoureux fou d’une fille sublime qui ne ressemble à personne. Ils ont 22 ans et se marient deux semaines après leur rencontre fulgurante. L’histoire de ce couple magique est racontée en deux segments. L’un, solaire, décrit le parcours de Lotto. L’autre, opaque, celui de Mathilde. L’union fusionnelle serait-elle un leurre ? « Ils étaient deux, ce qui signifiait qu’ils ne faisaient pas qu’un »…
Les personnages
Lancelot (surnommé Lotto) Satterwhite, né un jour de tornade. Dramaturge célèbre, éblouissant, « sans une once de malice ». Mathilde, sa femme. Beauté diaphane, « cheveux platine, un côté à la Hitchcock », indomptable amazone. Gawain, père de Lotto, disparu trop tôt. Antoinette, ex-reine de beauté, sa très possessive maman. Sallie, sa tante, et Rachel, sa petite sœur, rouages essentiels de cette famille. Chollie, ami d’enfance revanchard. Ariel, galeriste, visqueux et manipulateur.
On aime
Le climat effréné des « brillantes années quatre-vingt-dix ». La tension émotive et sexuelle qui sous-tend cette œuvre ambitieuse. Les sentiments contradictoires d’un couple flamboyant. L’enfance, ses blessures et ses secrets. Les pièges du succès. L’amitié à double visage. La colère ambiguë d’une femme prisonnière de son rôle d’épouse pourtant pleinement choisi.
L’auteure
Lauren Groff a 38 ans. Née dans l’État de New York, elle vit présentement à Gainesville, en Floride, avec son mari (amour de jeunesse) et leurs deux fils. Jeune écrivaine très douée, elle a publié avec succès deux romans avant de triompher avec Les furies, en lice pour de nombreux prix prestigieux. Barack Obama l’avait d’ailleurs choisi comme son meilleur livre de 2015.
Éditions de l’Olivier, traduction de Carine Chichereau, 432 pages
POUR LIRE UN EXTRAIT DU ROMAN LES FURIES
Les critiques du Club de lecture Châtelaine
J’ai aimé : Le fait que le livre ne traite pas tant du mariage mais surtout du destin, de son alignement de base et de toute la volonté requise pour garder le chemin aussi droit qu’on le voudrait. Les deux parties distinctes, les versions racontées séparément par Lotto et Mathilde, version publique et privée, et j’ai particulièrement aimé la deuxième partie, qui remplit le vide entre les lignes, où la satisfaction de comprendre mène quand même à encore plus d’intérêt. Le côté théâtral, avec toutes ses références, les didascalies du narrateur qui s’exprime comme le ferait un chœur grec. L’humour, les jeux de mots subtils et l’esprit qui sont très présents, à commencer par les noms des personnages : Lotto, qui suggère que toute sa vie n’est qu’un jeu de hasard; Aurélie, qui change son nom pour se protéger des blagues salaces; le chien, même, qui s’appelle God! La richesse et la profondeur des idées véhiculées. L’excellente traduction.
J’ai moins aimé : Le style parfois déclamatoire, même si ça fonctionne dans cette esthétique théâtrale. Les bases des personnages principaux qui relèvent de clichés – l’homme narcissique, presque bête, centré sur les apparences et son succès, la femme diablesse, manipulatrice, qui construit tout et se consacre à gérer les mythes – même si à la lecture on voit bien que ça n’empêche pas beaucoup de subtilité et de profondeur.
Ma note sur 10 : 9
J’ai aimé : Une médaille n’est jamais assez mince pour ne présenter qu’une seule face : ce roman offre une belle confrontation des points de vue sur plusieurs aspects d’une relation amoureuse idéalisée de toutes parts. Pourtant, ce que j’ai le plus apprécié va au-delà de cette relation idéalisée. En effet, j’ai surtout aimé le segment traitant du coup de foudre entre Léo, le jeune compositeur homosexuel, et Lotto, l’auteur en quête de lui-même après un passage à vide. Tout était dans le non-dit, propos central du roman.
J’ai moins aimé : Lotto le séducteur est décrit de façon caricaturale à la fois dans ses gestes et son vécu. Bien que les détails de sa vie soient nombreux, la tout apparaît légèrement brouillon. De son côté, Mathilde offre une complexité qui n’est pas assez explorée par l’auteure. Sa méchanceté profonde et sa résilience face à son propre démon intérieur mériteraient davantage de pages, surtout face à un Lotto, que j’ai trouvé plutôt fade, naïf et superficiel au final.
Autres commentaires : J’adore ce genre de roman : le quotidien extraordinaire d’individus sans histoire autre que celle de passer à travers le temps. Mais le roman souffrait de sa réputation, mes attentes étaient trop élevées, je suis restée sur ma faim. Dans ce cas-ci, j’ai été souvent tannée par les sauts temporels constants dans le récit narratif. De plus, malgré le fait que je sois une grande amoureuse, je n’ai pas cru à cette histoire d’amour particulière et remplie de non-dits.
Ma note sur 10 : 7
J’ai aimé : La première partie du livre est consacrée à la vision du mari (Lotto) de leur histoire, leur avancement dans la vie et la vision qu’il a de sa femme (Mathilde). La seconde raconte le point de vue de la femme, vision complètement différente et beaucoup moins romanesque que celle du mari (dramaturge, donc enclin à embellir la réalité). On se rend compte que la femme tapie dans l’ombre de son mari qui gère tout et l’a toujours encouragé n’est pas aussi dévouée et gentille que son mari la croit. J’ai adoré l’amour sincère qu’ils se portent et les petits gestes de leur vie quotidienne qui donnent un aspect plus réel à leur couple. J’aime bien comment l’auteur a su rendre désagréable la mère de Lotto durant toute l’histoire.
J’ai moins aimé : Dans la dernière partie, la femme démontre un côté obscur qu’elle a passé sa vie à cacher à son mari. Cela m’a eu peu déçue qu’elle calcule sa rencontre avec Lotto (cependant, cela se transforme en amour). Ce qui est difficile aussi à digérer, c’est le quiproquo entre Lotto et Mathilde sur l’ancienne relation entre Ariel et Mathilde (avant Lotto). Également, le besoin de libération de Mathilde avec de nombreux hommes après la mort de Lotto. Les parties consacrées aux pièces de Lotto, un peu lourd à lire à moins d’être calé en mythologie grecque.
Ma note sur 10 : 8
J’ai aimé : Ils sont beaux, jeunes et ont toute la vie devant eux. Ils choisissent de se marier deux semaines après ce regard, cet élan, cette passion naissante qui durera. Mais à quel prix. Ils sont maintenant trois : Lotto, Mathilde et leur couple. Roman d’une grande intensité dans lequel on retrouve les aléas d’une vie à construire, d’une vie qu’on envie, d’une vie intense et vibrante aux yeux de tous. Même à leurs yeux à eux deux, qui idolâtrent chacun l’autre et le couple qu’il constitue, malgré la misère et les contingences de la vie. On comprend rapidement qu’on ne peut pas vraiment les envier, que ce bonheur ne peut être authentique, basé sur leur individualité solide et saine. On devine bien qu’à travers cet apparent bonheur se cachent des drames. La construction efficace du roman, le style de l’auteure, simple, tout en poésie, en image, en théâtre. Une première partie sur Lotto, l’artiste qui se cherche, puis une seconde, plus énigmatique, sur Mathilde, le pilier du couple. Une grande fresque amoureuse sans compromis, une grande peinture des sentiments humains qui nous mène à des choix de vie, une grande incursion dans l’intime et, si l’on veut bien s’investir, une belle réflexion sur notre place dans le couple.
Je n’ai pas aimé : Roman dans l’air du temps, du genre bobo, convenu dans la trame dramatique qui se tisse lentement. La fin si finement étirée, que l’on redoute, qu’on ne veut pas lire, n’apporte pas toutes les réponses espérées. Est-ce un défaut? Peut-être pas!
Ma note sur 10 : 9,5
J’ai aimé : Toutes les éloges reçues par ce roman (et être nommé livre préféré de Barack Obama en 2015 n’est pas la moindre) sont amplement méritées! Une œuvre sensible et nuancée dépeignant parfaitement la part d’ombre qui existe dans chaque couple et qui en fait souvent la force.
J’ai moins aimé : Je cherche des points négatifs mais j’avoue que je ne trouve pas! Au moment où une certaine longueur pourrait commencer à s’installer, Lauren Groff introduit habilement un revirement majeur qui à la fois redonne du souffle à l’histoire et rajoute une complexité qui élève l’ensemble du livre.
Autres commentaires : Un livre intelligent qui se dévore. Bref, un vrai coup de cœur!
Ma note sur 10 : 9,5
J’ai aimé : La deuxième partie, mettant en scène Mathilde, qui sauve les meubles. Le problème, c’est que pour arriver à la deuxième partie, il faut passer par la première! Le style, visuel et organique, est beau, aucun doute là-dessus. Lauren Groff arrive, grâce à la finesse de son écriture, à camoufler le manque d’originalité de son intrigue. Le constat final sur le mariage et les réflexions qu’elles entraînent ne sont pas dénuées d’intérêt.
J’ai moins aimé : Ce roman m’a ennuyée comme c’est pas possible. Je n’arrive pas à comprendre pourquoi il a soulevé autant d’éloges et d’intérêt. Lotto est soporifique : égocentrique, misogyne. Ce genre de personnages a le don de me taper sur les nerfs. Les personnages sont tous trop stéréotypés à mon goût et leur psychologie, plaquée. Les scènes de sexe m’ont laissée perplexe : en gros «Lève ta jupe, ma belle», «Donne-moi ton oreille, mon beau!». J’ai trouvé les passages décrivant le processus de création bancals. La description des pièces écrites par Lotto alourdit inutilement l’intrigue.
Autres commentaires : Ce roman arrive au Québec auréolé d’une tonne d’éloges. Sur ce coup, je sens que je vais faire cavalière seule à ronchonner!
Ma note sur 10 : 5
J’ai aimé : La magnifique histoire d’amour de deux personnes très différentes et que tout le monde voulait séparer. Mathilde et Lotto sont une belle illustration de l’amour qui dure pendant de longues années : pas un amour facile ni un long fleuve tranquille, plutôt des montagnes russes. De beaux moments au quotidien, mais aussi des secrets bien enfouis, des non-dits, des côtés sombres qu’on garde pour soit et quelques écorchures au passage… Une magnifique illustration à l’américaine de l’amour qui dure mais qui ne se fait pas sans heurts. L’écriture est prenante, réussit à nous captiver même pour les passages banals, alors que dire des moments ou l’intrigue se corse, impossible de ne pas rester accroché!
J’ai moins aimé : Le côté «rêve américain» du livre, tous les personnages deviennent riches malgré leurs débuts modestes. Cette réussite financière de tout leur entourage ne me semble pas réaliste.
Autres commentaires : J’ai adoré! Les personnages ont continué à m’habiter plusieurs jours après la lecture.
Ma note sur 10 : 10
J’ai aimé : L’histoire, qui se déroule tout au long de la vie du personnage principal, un jeune comédien qui s’épanouira plutôt comme auteur. On assiste au développement d’adolescents qui deviennent des adultes en quête de sens, de succès, prêts à bien des choses pour s’élever. Sous forme de poupées russes et de boîtes de Pandore, on y découvre l’importance de la représentation de soi, de l’autre, les origines véritables des uns, les replis sur soi des autres, les folies de jeunesses qui rattrapent, les secrets, les mensonges, les suspicions, les vengeances lentement fomentées, tout en subtilités, tout en sourires… Rester dans l’ombre, jouer avec la lumière, l’idéalisation de la jeunesse, la perte du prestige, ou non, avec l’âge qui avance, chaque personnage s’en sort comme il le peut dans une vie mondaine et d’apparences.
J’ai moins aimé : J’ai trouvé ça un peu long, parfois, particulièrement une des œuvres du personnage qui est très longuement décrite, mais ça reste pertinent, selon moi.
Autres commentaires : J’ai bien aimé ce roman, j’ai aimé les interventions de l’auteur, ses apartés dans le texte, ses commentaires sur ses personnages. Il est intéressant de voir, aussi, toutes les idées que l’auteure a pour les pièces de son personnage!
Ma note sur 10 : 8