Quelles sont les premières images qui viennent à l’esprit quand on entend le mot Floride ? Walt Disney World, flamants roses, minigolf, fast-food, châteaux de sable, condos, snowbirds ?
Il existe pourtant une autre Floride, où les McDo, les immeubles avec ascenseurs et parfois même les autos n’ont pas droit de cité. En revanche, les mangroves, les coquillages, les lamantins et les pélicans y sont rois.
Sur la carte, c’est là, au sud-ouest de la péninsule, en haut du Parc national des Everglades, fabuleux sous-bois marécageux peuplé de bêtes sauvages. Longtemps, ce territoire fut considéré comme le Far West, où seuls les cowboys, les marginaux et les fugitifs osaient s’aventurer. Jusqu’à la venue du train, au 19e siècle, construit pour le transport minier mais vite pris d’assaut par les habitants du Nord en quête d’exotisme.
Jusqu’ici, la région verdoyante de Fort Myers et son littoral de sable blanc d’une longueur de 80 km avaient échappé à mon radar – apparemment, je ne suis pas la seule, puisqu’on y rencontre très peu de Québécois ! Il ne m’a fallu que cinq jours pour m’enticher de cette destination, idéale pour recharger ses batteries et faire le plein de nature, en amoureux (ce qui était mon cas) ou en famille. On m’avait promis que j’y trouverais « mon île ». Je me suis donc détachée du continent pour découvrir celles, luxuriantes et luxueuses, de Sanibel, Captiva et Useppa.
Sanibel, l’île protégée
À peine atterrie à Fort Myers, je fonce vers l’ouest, en direction du Sanibel Causeway. La Floride d’autrefois se trouve au bout de ce pont à péage de 5 km qui a ouvert la porte au tourisme dès 1963. Sur l’île de Sanibel, pas de néons, de panneaux-réclame, de feux de circulation. La végétation est dense et la hauteur des bâtiments ne dépasse jamais celle d’un palmier.
Près des deux tiers de l’île sont protégés. Un tour de force attribuable au caricaturiste Jay Norwood Darling, surnommé « Ding ». Dans les années 1940, cet ardent défenseur de la nature s’est élevé contre la vente de terres boisées à des promoteurs, au moyen de ses dessins. C’est ainsi qu’est née, grâce à un décret du président Truman, la réserve faunique de Sanibel, devenue avec le temps la principale attraction de l’endroit. dingdarlingsociety.org
Il y a à faire, dans ces 26 km2 recouverts de forêts, de mangroves et de marais. Bien sûr, on peut passer la journée à observer les oiseaux en se baladant sur le Wildlife Drive à pied, à vélo, en tramway ou en auto (permise à cet endroit de la réserve seulement). Mais le plus chouette, c’est l’excursion guidée en kayak dans la baie de Tarpon, à travers un labyrinthe de palétuviers aux racines aériennes appelées racines échasses. J’y ai aperçu : un alligator (si, si !), un lamantin, des poissons volants et quelques-unes des 220 espèces d’oiseaux qu’abrite la réserve – aigrette, héron, bécasseau, cormoran, etc.
Cependant, je n’ai vu aucune trace des dommages causés par l’ouragan Charley (qui a secoué la région à l’été 2004) ou par la marée noire provoquée en avril 2010 par l’explosion de la plateforme pétrolière Deepwater Horizon dans le golfe du Mexique. Les îles n’en ont pas souffert, mais leur réputation, oui. Pendant deux ans, elles ont tourné au ralenti.
Sanibel (comme Captiva) est aussi renommée pour ses coquillages. Mais faites attention à vos pieds ! J’ai failli marcher sur des grappes de conques en spirale orangées, typiques de la Floride. On a le droit de cueillir tout ce qu’on trouve – pétoncle, escargot, buccin, huître, patelle, etc. – à condition de remettre doucement à la mer les mollusques vivants.
Le blogue d’une résidante, Pam Rambo, constitue une mine de renseignements sur les coquillages du sud-ouest de la Floride : iloveshelling.com.
Bon à savoir sur Sanibel
À visiter Le musée du coquillage Bailey-Matthews recense plus de 125 000 espèces de partout dans le monde, dont 400 du sud-ouest de la Floride. shellmuseum.org
Où se loger
Où manger
Quand y aller Idéalement, en basse saison (l’été et l’automne). Les touristes sont partis et les hôtels sont beaucoup moins chers (jusqu’à 60 %).
Comment s’y rendre
Sur les photos : La valse des sternes royales. Hamac sous la brise, au Casa Ybel Resort. Excursion en kayak dans les mangroves de la réserve J.N. Ding Darling. tarponbayexplorers.com
Captiva, une perle de beauté
Un petit pont (le Blind Pass) au-dessous duquel pêchent les résidants raccorde Sanibel à Captiva. Ici, même nature généreuse. Mais la sœur siamoise a plus de classe encore, avec ses auberges historiques et ses somptueuses mansions bordées d’acacias. Et, toujours, la mer en toile de fond.
Pour un peu d’action, on gagne le cœur de l’île, qui bat sur Andy Rosse Lane. Cette petite rue traverse l’île sur sa largeur (un demi-kilomètre tout au plus). D’un côté, une enfilade de restos, de terrasses, de galeries et de boutiques. De l’autre, la marina McCarthy’s, construite au début du siècle dernier, à l’époque où Captiva était coupée du reste du monde. Ce sont un certain Andy Rosse et son épouse Dessa qui l’ont reprise dans les années 1940. Au fil des ans, leur « saloon » de bord de mer est devenu un haut lieu de rassemblement, fréquenté notamment par l’activiste J.N. « Ding » Darling et l’homme politique Adlai Stevenson.
C’est aujourd’hui le point de départ des croisières-excursions dans l’archipel de la Floride – formé aussi de Cabbage Key (curiosité : les murs de l’unique resto sont tapissés de dollars apposés par les clients, comme porte-bonheur), Cayo Costa et Boca Grande (des repaires de milliardaires) et Useppa (on y arrive !). captivacruises.com
Bon à savoir sur Captiva
Où se loger Le paradis des familles se trouve à l’extrémité nord de Captiva, au South Seas Island Resort. C’est un village en soi qu’on pourrait très bien ne pas quitter une semaine durant : glissades d’eau, terrains de golf, plage à perte de vue, terrains de tennis, école de voile, pêche sportive, restos, boutiques, miniépicerie. Tout ce qu’on a à faire, c’est d’être heureux. Et prendre l’apéro sur le balcon. Coup de bol, le mien donnait sur le petit port où se réfugient les lamantins (comme l’indiquent les écriteaux « Manatees Area »).
Où manger Si on a la flemme de sortir du South Seas Island Resort, on se rabat sur le Harbourside Bar & Grill. La terrasse est sympa, le service y est poli, les assiettes, généreuses, mais les prix démesurés. On peut aussi se diriger vers Andy Rosse Lane, où ça grouille de vie et de musique. Aimé : le pub Mucky Duck, pour sa bière et ses fabuleux couchers de soleil, le Keylime Bistro et le RC Otters pour leurs menus variés, le Bubble Room pour ses décors de Noël installés toute l’année et ses gigaportions de dessert.
Sur les photos : Au menu du Harbourside Bar & Grill : bouillabaisse des îles (moules, crevettes, pétoncles) et vivaneau au pesto et aux asperges. Des green de golf impeccablement entretenus, entre ciel et mer. Les lamantins et les yachts de luxe se partagent les eaux de la marina du South Seas Island Resort.
Useppa, un joyau privé
Dernière escale et non la moindre : Useppa. J’ai enfilé ma plus jolie robe soleil, laissé l’auto à la marina McCarthy’s (seule la voiturette de golf est permise sur l’île) et suis montée à bord d’un petit bateau de croisière. Après une traversée d’une heure le long des côtes de North Captiva, Cayo Costa et Cabbage Key (en yacht et en ligne droite, elle s’effectue en 15 minutes), j’ai crié : « Terre ! »
Ça saute aux yeux : l’île au grand complet joue dans les ligues majeures, celle des prestigieux clubs privés. Le Useppa Island Club est strictement réservé à ses 515 membres et à leurs invités. Le commun des mortels (comme moi) a le droit d’y mettre l’orteil une fois dans sa vie.
Sur la photo : Les 140 propriétés de l’île sont construites dans le même style architectural. Toute modification doit être approuvée.
Bien avant d’être rachetée par le richissime homme d’affaires Gar Beckstead, en 1976, Useppa fut tour à tour le paradis de la tribu amérindienne Calusa, un repaire de pirates – le plus célèbre, Gasparilla, y garda captive la belle Joseffa, d’où le nom de l’île –, et la propriété du célèbre magnat de l’immobilier Barron Collier. Pendant la guerre de Sécession (1861-1865), Useppa servit d’avant-poste à l’Armée de l’Union.
Depuis 37 ans, elle accueille l’élite de la société américaine – des retraités et semi-retraités pour la plupart, qui, pendant les vacances, reçoivent leurs enfants et petits-enfants. Un seul jeune y vit en permanence : le fils du chef des pompiers.
La vie s’écoule doucement sur l’île, entre le jardinage, la pêche au tarpon, le croquet et le tennis. Les résidants se retrouvent au bar du Collier Inn pour le happy hour. « Ici, c’est comme un camp pour adultes », me fait remarquer Mary McColgan en levant son verre. « Si l’un d’entre nous est malade, tout le monde débarque chez lui avec de la soupe ! »
Sur la photo : Entrée grandiose à la marina d’Useppa.
Bon à savoir sur Useppa
Où se loger Au Collier Inn, hôtel au charme suranné, érigé sur les hauteurs. Demandez la suite Centennial, romantique à souhait. Étonnamment, vous ne vous ruinerez pas : les prix oscillent entre 230 $ et 310 $ la nuitée. De votre balcon, vous assisterez au plus spectaculaire des levers de soleil. Si vous amenez la marmaille (une expérience que vos petits Robinson ne regretteront pas), vous aurez le choix parmi une vingtaine de suites et de cottages (entre 120 $ et 630 $ la nuitée).
À faire L’histoire de l’île est présentée dans un petit musée, le Barbara Sumwalt Museum (don de 5 $ par personne).
Sur les photos : Douce fraîcheur à la terrasse du Collier Inn. Une allée rose serpente à travers les jardins. Le miracle d’Useppa : le lever de soleil sur la mer.
Ce voyage a été rendu possible grâce au Lee County Visitor & Convention Bureau. Pour plus d’information : fortmyers-sanibel.com.
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