Haïtienne. 25 ans. A émigré au Québec avec sa famille à 10 ans. Auteure du blogue Racines Crépues (racinescrepues.com), un forum d’échange pour les filles noires qui portent leurs cheveux au naturel.
Rares sont les Antillaises qui ne sont pas obsédées par leur tignasse. La mode est au défrisage depuis si longtemps qu’on a perdu la manière ancestrale de s’occuper des cheveux naturels. On cherche ainsi à calquer un certain modèle européen, car les cheveux crépus rappellent l’esclavage. Pourtant, il y a eu des mouvements intéressants où les femmes ont assumé l’afro, notamment dans les années 1970, avec l’avènement du Black Power, mais ça n’a pas duré bien longtemps.
Le défrisage ou lissage capillaire est une norme. Sinon, on simule des cheveux raides avec des perruques ou des rallonges. Je me souviens qu’un jour – j’étais très jeune – j’avais mis une jupe à l’envers sur ma tête pour faire croire que j’avais les cheveux longs et en mouvement. Pas étonnant qu’on m’ait fait mon premier défrisage temporaire à 6 ans, puis mon premier lissage chimique permanent à 12 ans. C’en était fait de mes cheveux crépus, mais j’étais fière à cette époque de correspondre à l’idéal de beauté des femmes de ma communauté.
En 2009, j’ai eu envie de me libérer de ces diktats. Les défrisants chimiques sont irritants et dangereux pour la santé; et ils peuvent être à l’origine de catastrophes capillaires. Ça a provoqué toute une controverse chez nous : ma mère ne voulait pas que je coupe mes cheveux très court pour repartir à neuf. Mais j’étais décidée. J’ai longtemps porté l’afro et, maintenant, j’expérimente les dreadlocks (rastas). Devant l’absence de tradition familiale en matière de cheveux crépus, j’ai lancé un blogue qui fournit des trucs et astuces et me permet d’échanger avec d’autres Noires qui rejettent le défrisage.
Les cheveux crépus doivent être bien traités. Autrefois, on les percevait comme coriaces et indomptables, alors qu’ils sont plutôt fins et fragiles. On les a longtemps maltraités avec des outils et des techniques inadaptés. Par exemple, le démêlage doit se faire les cheveux mouillés avec un peigne à larges dents. Pour défaire les nœuds, on débute par la pointe et on remonte vers la racine (et non le contraire). On privilégiera des shampooings sans sulfate pour éviter d’enlever les huiles naturelles. L’hydratation est un must, car le sébum ne se rend pas sur les longueurs. L’huile de ricin pressée à chaud (Jamaican black castor oil) est un ingrédient important de notre culture pour se faire des bains d’huile chauds hydratants avant le shampooing.
Ça ne vient pas d’Haïti mais d’ici : je viens de découvrir les cosmétiques artisanaux Ayacaona, créés par une Montréalaise d’origine haïtienne. Elle propose des produits capillaires géniaux et des soins pour la peau vraiment efficaces (ayacaona.com).
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