Il est cinglant (c’est le titre de son spectacle), et le mot est faible. Il dit des choses d’un mauvais goût tel qu’il crée des malaises dans une salle qui en a pourtant déjà entendu des vertes et pas mûres. Son humour typique d’un ado boutonneux «aux hormones dans le plafond» pourrait se résumer à ceci : pipi, caca, vagin, pénis, fuck you. D’autres sont passés par là avant lui : le gros cave (Jean-François Mercier), Mike Ward… Et pourtant… j’ai ri. Beaucoup.
C’était il y a 2 jours, mercredi, soir d’une grande première très attendue. Au Saint-Denis, le tout-Montréal était au rendez-vous, dont certaines personnes qu’il était étonnant de voir là : Mathieu Bock-Côté, l’intello sociologue de service invité à toutes les tribunes, et Jean-Martin Aussant, économiste et politicien (chef de l’Option Nationale).
Guillaume Wagner était très attendu. On l’a vu partout, de Tout le monde en parle à l’abri Tempo de Marie-France Bazzo. Maintenant, il devait livrer la marchandise, devant un parterre de gens dont la moitié était là pour le critiquer, dans un journal, à la radio ou en 140 caractères sur Twitter.
Il est arrivé sur scène très décontracté, a lancé quelques bombes hilarantes à faire friser les oreilles pour montrer qu’il était bien cinglant, et en quelques minutes il a glissé tous les spectateurs dans sa petite poche arrière. Enfin, presque tous. Suzanne, une collègue de travail qui m’accompagnait, a peu apprécié. Elle a d’ailleurs été cinglante, elle aussi, mais envers le genre d’humour que pratique Guillaume. Elle lui préfère (de loin, de très loin) Stéphane Rousseau. Je le lui laisse volontiers.
D’autres, plus spécialisés dans les humoristes, analyseront le comment et le pourquoi du succès de Guillaume Wagner. À 28 ans, il possède déjà une aisance sur scène époustouflante. Son charisme naturel fait le reste. Ses personnages récurrents (un douchebag évidemment épais, une fille «à gros totons», une matante à double menton, entre autres) sont irrésistibles. Sa force : il dit des horreurs en ponctuant le tout d’un clin d’œil qui signifie : je le sais ben que c’est niaiseux, mais prenez-le au 2e ou même au 3e degré. Ce grand lecteur du célèbre philosophe allemand Nietzsche (je sais, c’est surprenant) a même quelque chose d’Yvon Deschamps dans sa façon d’aborder des travers de la société actuelle. Ce qui, pour un jeune humoriste qui est loin d’être parfait et a encore bien des croûtes à manger, est sans doute le plus grand compliment qu’on puisse faire.
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