Générale

Haïti chérie

Hier midi j’étais la « date » de Luck Mervil. Il m’a invitée à l’accompagner pour aller entendre René Préval, le président d’Haïti, de passage au Québec à l’occasion du Sommet de la francophonie. Monsieur Préval s’est arrêté en chemin vers Québec pour rencontrer la communauté haïtienne de Montréal au buffet Christina, rue Jarry, à Saint-Léonard. Riche après-midi où j’ai également croisé un de mes écrivains préférés, Dany Laferrière.

Quant à René Préval, il causait en français quand il demandait de l’argent et en créole lorsque les questions se corsaient.


Photo: Luck Mervil

Luck a improvisé un petit pot-pourri pas prévu au président. Nous étions en famille, un poète lisait en créole tandis que nous mangions le poulet national accompagné de bananes plantain frites et de riz aux fèves rouges. René Préval a même répondu aux questions la bouche pleine, vachement relax. « Je cherche la formule qui va mobiliser le monde pour leur faire comprendre la profondeur de la détresse haïtienne aujourd’hui« , a-t-il dit. Je n’ai pas de mal à le croire. Haïti reste ce que j’ai vu de plus pauvre en ce bas monde. Et quatre cyclones viennent de leur tomber sur la gueule; ils ne s’en remettront pas sans l’aide internationale.

« Lorsque je dis à des gens de Miami que sept ponts sont tombés à cause des cyclones, je vois bien qu’ils ne comprennent pas de quoi je parle, a ajouté le président. Un seul « overpass » de Miami équivaut à ces sept ponts! » Et Haïti fait face à une crise alimentaire qui s’est généralisée à l’échelle de la planète (près d’un milliard de personnes souffrent de malnutrition). Comme les pays qui avancent l’argent sont très occupés à en perdre en ce moment, on peut imaginer la détresse du président haïtien quand vient le temps de sonner l’alarme.

À la sortie, de jeunes Haïtiens oeuvrant dans les milieux politiques m’ont glissé que d’ici cinq ans on ne pourra plus parler de diaspora haïtienne (il faut des liens économiques et culturels pour utiliser un tel terme) et qu’Haïti sera vraiment dans la merde s’il ne peut plus compter sur le soutien de ses expats. « Je suis né ici, je n’ai plus de famille là-bas et je n’ai jamais mis les pieds en Haïti. Ma vie est ici, et je n’ai pas plus de raisons d’envoyer de l’argent en Haïti que j’en ai d’en envoyer au Guatemala. Le président n’a pas encore compris qu’il ne pourra plus compter sur nous« , m’a glissé un jeune homme qui travaille au ministère de la Culture.

Si vous pensez que ça va mal pour vous, je peux vous assurer d’une chose que vous savez déjà: ça n’ira jamais aussi mal que si vous étiez pogné en Haïti. C’est également l’avis de Luck qui estime que les Québécois ont le cul bordé de nouilles et n’ont aucune raison de rester assis dessus. Il s’en explique dans son livre: Ma race est la meilleure. En librairie depuis deux jours.


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