Demain, le Jour de la Terre. J’aime cette journée de printemps, le premier. Tout explose, toutes les promesses sont là, les volées d’outardes annoncent les naissances à venir, le germe de la vie nous saute au visage, la terre portes ses spores, sent le sperme, la couvée. J’aime toutes les odeurs que le printemps charrie. J’aime le frais du matin et l’ardeur du soleil qui commence à narguer. J’aime revoir les cardinaux et entendre leur chant énamouré. Le printemps nous traverse.
« À l’occasion du Jour de la Terre, refaisons connaissance, réapprivoisons ce monde du vivant qui nous a mis au monde, respectons sa part de mystère, de fantaisie et de poésie. Il n’est pas nécessaire de tout comprendre pour tomber amoureux. Il suffit d’aimer et de laisser l’instinct faire le reste.
En terminant, je citerai un écrivain, ornithologue et poète de Québec que j’apprécie beaucoup, Pierre Morency, qui a célébré la nature en maintes occasions. Tiré d’Amouraska, son dernier recueil de poésie, paru la semaine dernière :
« Le vrai vivant de vie est ce qui vient peut-être à seulement se demander : où est donc le vrai vivant de vie? Ce qui est certain il n’arrive pas de soi à la naissance. »
Chez les autochtones, dont la connaissance subtile des saisons nous échappe encore, il y a deux printemps et deux automnes. En ce jour de premier printemps, j’émets le souhait que le vrai vivant de vie ne termine pas ses jours au musée mais que les musées en soient les protecteurs et lui offrent un toit.
Bon Jour de la Terre à vous tous! » (Extrait d’une conférence que j’ai donnée au Musée de la Civilisation de Québec à l’occasion du lancement des activités du Jour de la Terre, la semaine dernière).
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J’ai choisi cette cause il y a quatre ans. Ou c’est elle qui m’a choisie. Chose certaine, lorsque je donne des entrevues et qu’on me qualifie d’écolo, j’éclate de rire! Trop facile. En disant ça, on sous-entend: « vous, les autres, ceux qui militent, nous, c’est pas notre problème, on a une vie! » Une recherchiste me disait la semaine dernière: « Vous parlez au vrai monde, là, madame Blanchette. Le vrai monde a des jobs, est stressé, a des enfants à aller chercher à la garderie et il n’a pas le temps de trier ses déchets dans le bac à recyclage. Pis le vrai monde il sait pas tout ce que vous me dites, ils ne sont pas journalistes. »
« Je vous signale que même les journalistes ont des jobs, sont stressés, ont des enfants et certains prennent même le temps de trier le contenu de leurs bacs. Mais le « vrai monde », comme vous dites, a le temps d’aller magasiner pour une télé HD? Et le vrai monde va s’installer devant pour regarder les Olympiques cet été? Et le vrai monde suit le hockey en buvant de la bière? Le vrai monde n’a pas le temps de s’occuper de son habitat, c’est ce que vous me dites? On épuise le contenu et on se crisse du contenant? Le vrai monde n’est pas informé ou ne veut pas l’être? Parce qu’il faut être drôlement borné pour ne pas comprendre ce qui se passe? »
Ça va se terminer comme dab, je le sens. « Et vous, madame Blanchette, qu’est-ce que vous faites pour l’environnement? ».
« Moi? Je fais l’amour langoureusement au lieu d’aller magasiner compulsivement. J’essaie de retrouver ma virginité. Fighting for peace is like fucking for virginity. Je ne prêche plus, ça donne rien. Je vais aller voter vert aux prochaines élections municipales, just watch me. C’est au municipal que ça se passe et c’est le thème du Jour de la Terre en 2008-2009: les écomunicipalités. Et puis je vais m’installer une corde à linges, c’est ma résolution 2008. Et je souhaite des mesures draconiennes pour aider « le vrai monde » à ne plus acheter-jeter-crever, sortir de ce cycle infernal et retrouver la seule chose qui paie pour vrai: le temps. »
Stay tuned.