Projet 97

Il faut qu’on parle de Dalhousie

Si c’était votre gars ?

Lache_lousse

Treize champions qui s’amusent (?), dans un groupe supposément privé sur Facebook, à dénigrer leurs condisciples féminines. À se demander, par exemple, laquelle ils auraient envie de droguer afin de pouvoir l’agresser tranquillement.

Ils sont en 4e année d’université, ce qui suppose qu’ils sont au début de la vingtaine, un peu tard pour des niaiseries de ce genre. Et qu’ils sont, au moins, moyennement intelligents. Et il y a peu de chances que les 13 couples de parents qui les ont élevés soient tous de parfaits morons sans allure. En ce moment, il doit y avoir quelque part au Canada, deux douzaines de bonnes personnes intelligentes et pleines de bon sens, qui ont fait leur possible dans la vie, qui se demandent aujourd’hui ce qu’ils ont fait, ou omis de faire, pour que leur grand dadais en arrive là. Et quoi faire à partir de là.

Un peu d’éducation ?, propose Michel Dorais, professeur à l’Université Laval, qui s’intéresse à la sexualité et ses aléas depuis plus de 30 ans.
«Tout le monde a des fantasmes, dit-il, avouables ou pas. Et, la plupart du temps, ce n’est pas grave. À la condition de les garder entre nos deux oreilles. D’autant que la plupart des gens savent bien que les fantasmes et la réalité sont deux choses différentes.»

Le problème, note-t-il, est que la génération qui arrive aujourd’hui à l’âge adulte a grandi dans une société où la notion d’intimité n’existe pas. Il faut tout montrer, tout dire. Et en rajouter. Ajoutez deux ingrédients à cette recette:

1) les réseaux sociaux où rien ne peut rester privé, pas même les groupes fermés.
2) la fanfaronnade en matière de sexualité, si chère aux jeunes hommes (les gars se vantent volontiers de leurs exploits, vrais ou imaginaires. Ces choses-là ont toujours existé… sauf que maintenant elles se font au vu et au su de tous…).

Résultat: vous obtenez Dalhousie. Des jeunes femmes inquiètes, apeurées ou en colère. Des jeunes hommes bien mal pris. Et probablement honteux. Qui n’avaient pas prévu ce qui leur arrive. On fait quoi, maintenant ?

«À quoi servirait-il de les castrer sur la place publique ?, demande Michel Dorais. Il serait plus utile que cet événement serve de maudite bonne leçon. À ces garçons et aux autres. À leur apprendre qu’à tout dire, tout écrire, fût-ce par fanfaronnade, on peut blesser et intimider des gens. Que la notion de privé et d’intimité est importante. Sans compter, bien évidemment, que la sexualité ne devrait pas être conçue comme une arme afin de faire du mal à autrui ; c’est l’autre aspect du problème. Il faut s’occuper des jeunes femmes qui ont été visées, bien sûr, et de leurs consoeurs. Mais il faut s’occuper des gars aussi. Si certains ont besoin de consulter, qu’on les réfère au bon endroit. Cette triste affaire doit servir à la prévention : que devrions-nous faire pour que ça risque moins de se reproduire ? Manifestement, il y a encore de beaucoup d’éducation à faire… même chez des jeunes de vingt ans… »

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