Je savais qu’elle était morte, mercredi dernier, tout juste 49 ans, un AVC, un fils, un chum, bingo. Mais sur Facebook, ce n’est pas comme voir sa nécro dans La Presse, au milieu du cimetière alphabétique. Lire les nécros, c’est risquer de tomber sur un chapitre de sa vie. Une page de tournée.
Là, tout de suite, je viens de saisir qu’elle est morte. Je l’ai fréquentée lorsqu’elle était au Conservatoire d’art dramatique. Ça remonte loin loin dans le temps. Dans une autre vie. Moi, je vivais avec mon prof de philo au cégep et j’étais traiteur. Elle, faisait partie de la gang de théâtre de ma meilleure amie de l’époque. On a suivi des cours de wendo (art martial féministe de l’époque) ensemble. On a éclusé quelques bières aussi. La belle rousse est toujours restée présente dans mon esprit.
Je l’ai aperçue de loin en loin, « barmaid » dans un restaurant de la rue Bernard, une fois. Les fins de mois sont difficiles pour les comédiennes dans la quarantaine. Elle n’aura pas eu le loisir de voir ce que la cinquantaine lui réservait.
Ça fait longtemps que je me sais mortelle, depuis mes premiers cours de méditation, mais ça ne fait pas longtemps que j’ai commencé à consulter les nécros. D’un doigt un peu craintif et honteux au début.
Pourquoi y allons-nous? C’est ma question. Instinct macabre? Matérialisation de nos peurs les plus ataviques? Pour se convaincre que nous sommes toujours vivants? Pour retrouver une connaissance? Pour nous rappeler que nous sommes bels et bien mortels? Pour s’imaginer quelle photo on choisira pour la nôtre? Pour scruter les dates de naissance? Pour se faire des peurs avec les mots « oncologie », « Société canadienne du cancer » ou « parti soudainement »?
Je ne sais trop. Mais je sais une chose, le jour où vous prenez conscience qu’une épée de Damoclès vous pend au-dessus de la tête, vous relativisez tout. Et c’est très bien ainsi.
Repose en paix belle Marie-Noëlle.
(Marie-Noëlle Riddez, via Dominique Drouin sur FB)