J’ai rencontré Joanne Gauthier dans un parc où l’on s’entrainait toutes les deux. C’était l’automne, il faisait déjà noir, déjà froid, mais sa présence lumineuse faisait chanter l’automne. La course, c’est aussi des rencontres qui marquent pour la vie, avec des gens ordinaires qui se donnent à l’extraordinaire…
Joanne est faite de cet extraordinaire. Prof de français au secondaire, quand elle a fini d’apprendre l’art difficile de la conjugaison à ses élèves, elle les fait… courir. Eh oui. La rencontrer, c’est avoir envie d’avoir quinze ans juste pour avoir le droit d’être dans sa classe.
Je me souviens que le soir de notre rencontre, je n’ai vu qu’une chose : ses yeux. Noirs, pétillants et graves, ils étaient pleins de douceur et de vivacité, mais aussi d’une émotion à fleur de peau qui m’avait touchée en plein cœur.
La mort lui avait enlevé l’homme de sa vie, la laissant seule avec un jeune fils et un immense chagrin.
Sa conciliation à elle était portée par le vent de la survie… je la laisse raconter.
« Partir courir avec un cellulaire dans ses poches et un jeune encore au primaire qui dort à poings fermés les matins du weekend. Et courir. Et courir…. en laissant sa main dans sa poche pour sentir la vibration dudit cellulaire au cas où les bruits ambiants couvriraient la sonnerie (impossible, pourtant, à la campagne…. Le silence habite la campagne). Mais courir sa vie pour survivre à un chagrin d’amour, la main dans la poche parce que l’idée même de perdre un autre être cher m’aurait anéantie. Mais courir parce que la course m’a sauvée »…
***
Par un juste retour des choses, digne d’un roman de Paul Auster, c’est la course qui a ramené l’amour dans sa vie.
Eh oui.