Club de lecture

Par ici les meilleurs prix!

Prix littéraires : mode d’emploi.

Le 7 novembre, vers 13 h, la France retiendra son souffle. Chez Drouant, chic resto du centre de Paris, sera dévoilé devant un parterre de journalistes le lauréat du Goncourt 2012, prix littéraire de langue française le plus prestigieux du monde. Un événement qui marquera, comme chaque automne, la saison des multiples récompenses auxquelles rêvent la nuit tous les auteurs (même s’ils affirment le contraire).

Le Goncourt a des répercussions jusqu’au Québec : les bonnes années, le livre primé vendra 5 000 exemplaires supplémentaires dans la province, peut-être plus. Aucun prix québécois n’a cet impact. Et pourtant, ce ne sont pas les distinctions littéraires qui manquent ici. On en compte une bonne centaine, de la très spécialisée (Prix de la rivière Ouelle de la nouvelle policière) à la mieux dotée (prix Gilles-Corbeil, le « Nobel québécois », accordé tous les trois ans et assorti d’une bourse de 100 000 $).

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Si les enjeux sont plus modestes, les récompenses n’en sont pas moins essentielles à la survie des auteurs. «Chaque prix que j’ai reçu m’a permis d’écrire un autre livre», fait remarquer Élise Turcotte, qui, en 30 ans d’écriture et avec près de 20 titres à son actif, a remporté une dizaine de distinctions (prix Émile-Nelligan, Prix littéraire du Gouverneur général, Grand Prix du livre de Montréal, etc.). « J’ai pu prendre congé de l’enseignement pour enfin me consa-crer à l’écriture. Pour moi, ça représente presque un salaire. Et les retombées ne sont pas que pécuniaires : un prix, c’est une carte de visite qui permet de joindre tout un réseau, d’être invité ailleurs, de voyager. »

Au Québec, on estime à une vingtaine le nombre d’écrivains qui vivent confortablement de leur plume. Les deux tiers de nos auteurs tirent annuellement moins de 5 000 $ de leur travail de création (selon une publication de l’Institut de la statistique du Québec intitulée Les écrivains québécois – Portrait des conditions de pratique de la profession littéraire au Québec 2010). Alors, recevoir une bourse de 5 000 $ ou de 10 000 $, être en nomination pour le Prix littéraire des collégiens ou celui des libraires, bénéficier d’un supplément de publicité, c’est inestimable, surtout que les tribunes pour parler des livres se font rares.

Perrine Leblanc, lauréate pour L’homme blanc du Grand Prix du livre de Montréal 2010 et du Prix littéraire du Gouverneur général 2011, en sait quelque chose. Ce roman s’est, à ce jour, vendu à 11 000 exemplaires au Québec (on parle de best-seller à partir de 3 000). « Ces récompenses ont tout changé, dit l’auteure de 32 ans. Non seulement en m’encourageant à continuer, mais aussi en me permettant, grâce aux sommes que j’ai touchées [près de 40 000 $, si l’on additionne les deux prix], de ne faire rien d’autre qu’écrire. » Les prix littéraires, ça ne change pas le monde, mais… ça peut réellement faire décoller une carrière.

Le 5 novembre :
Le femina

Petite histoire : Instauré en 1904 par 22 collaboratrices des revues La vie heureuse et Femina, qui déploraient que le Goncourt soit remis de facto à un homme. Si le jury est exclusivement féminin (et compte dans ses rangs la célèbre écrivaine et féministe Benoîte Groult), le prix n’a pas de sexe.

Montant alloué : Aucun. Un livre primé du Femina s’écoule en moyenne à 155 000 exemplaires.

Lauréats célèbres : Antoine de Saint-Exupéry, Marguerite Yourcenar, Alexandre Jardin…

Faits intéressants:
Des Québécois ont souvent été mis en nomination : Dany Laferrière en 2009, Catherine Mavrikakis deux fois, dont cette année… Mais seuls trois Cana­dien­­nes ont remporté les honneurs : Gabrielle Roy, en 1947, pour Bonheur d’occasion, Anne Hébert, en 1982, pour Les fous de Bassan et Nancy Huston, pour Lignes de faille, en 2006.

Lauréat 2011: Simon Liberati, pour Jayne Mansfield 1967 (Grasset).

Lauréat pressenti pour 2012 : Claudie Hunzinger, pour La survivance (Grasset).

Le 6 novembre :
Le médicis

Petite histoire :
Né en 1958, fruit de l’artiste Gala Barbisan et du romancier Jean-Pierre Giraudoux, il récompense « un jeune auteur, débutant ou ne bénéficiant pas encore de la notoriété qu’il mérite », dans les catégories roman, roman étranger et essai.

Montant alloué :
686 euros, soit environ 900 $. Un Médicis vend en moyenne 42 000 exemplaires de son livre.

Lauréats célèbres :
Georges Perec, Philippe Sollers, Bernard-Henri Lévy.

Faits intéressants : Deux Québécois ont reçu le Médicis : Marie-Claire Blais, en 1966, pour Une saison dans la vie d’Emmanuel, et Dany Laferrière, en 2009, pour L’énigme du retour.

Lauréat 2011 : Mathieu Lindon, pour Ce qu’aimer veut dire (P.O.L Éditeur).

Lauréat pressenti pour 2012 :
François Bon, pour La théorie des objets (Seuil).

 

Le 7 novembre :
Le goncourt

Petite histoire :
Fondé en 1903 selon les dispositions testamentaires d’Edmond Huot de Goncourt, écrivain et journaliste dont l’œuvre est aujourd’hui oubliée. Décerné par les membres de l’Académie Goncourt (dont fait partie Bernard Pivot).

Montant alloué : Symbolique : un chèque de 10 euros (12 $), que personne n’encaisse. Pas besoin, car les répercussions sur les ventes sont énormes : 380 000 exemplaires en moyenne, jusqu’à 1 million dans certains cas.

Lauréats célèbres : Proust, de Beauvoir, Duras…

Faits intéressants : Il y en a des tonnes! Le prix ne peut être remis qu’une seule fois à un même auteur, sauf que… Romain Gary, gagnant en 1956 pour Les racines du ciel, l’a remporté une deuxième fois avec La vie devant soi (1975), publié sous le pseudonyme d’Émile Ajar. Ce n’est qu’après sa mort, en 1980, que le canular sera révélé. Antonine Maillet demeure la seule Canadienne à l’avoir gagné : en 1979, avec Pélagie-la-Charrette. Le terme goncourable vient d’entrer dans Le Petit Larousse illustré 2013.

Lauréat 2011 : Alexis Jenni, pour L’art français de la guerre (Gallimard).

Lauréat pressenti pour 2012 : Patrick Deville, pour Peste et choléra (Seuil).


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Le renaudot

Petite histoire : Créé en 1926 par une bande de 10 journalistes et critiques littéraires pour récompenser « un roman ou un récit au ton et au style nouveaux ».

Montant alloué : Aucun. Un prix honorifique, mais des ventes qui dépassent 220 000 exemplaires.

Lauréats célèbres : Louis-Ferdinand Céline, Louis Aragon, Georges Perec…

Faits intéressants : Le Renaudot a la réputation de réparer les injustices du Goncourt. Le nom du lauréat est révélé tout de suite après ce dernier, aussi chez Drouant. Deux livres sont désignés, au cas où le choix du Renaudot aurait déjà reçu le Goncourt. En 2007, la remise du prix à Daniel Pennac, pour Chagrin d’école, a créé une vive polémique, car il ne figurait pas sur la liste des titres sélectionnés.

Lauréat 2011 : Emmanuel Carrère, pour Limonov (P.O.L Éditeur).

Lauréat pressenti pour 2012 : Agnès Descarthe, pour Une partie de chasse (L’Olivier).

Mi-novembre :
Prix littéraire du Gouverneur général

Petite histoire : Existe depuis 1937. Le GG, pour les intimes, probablement le plus prestigieux de nos prix littéraires, est attribué dans différentes catégories : roman et nouvelle, poésie, théâtre…

Montant alloué : 25 000 $ pour le lauréat, 3 000 $ pour l’éditeur du livre primé et 3 000 $ pour en faire la promotion. Un chèque de 1 000 $ est remis à chaque finaliste.

Lauréats célèbres : Gabrielle Roy, Jacques Poulin, Louis Hamelin…

Faits intéressants : En 1968, le prix a été décerné ex æquo à Marie-Claire Blais (qui l’a remporté quatre fois!) et à Hubert Aquin, qui, nationaliste convaincu, l’a refusé.

Lauréat 2011 : Dans la catégorie roman et nouvelle : Perrine Leblanc, pour L’homme blanc (Le Quartanier).

Lauréat pressenti pour 2012 : Wajdi Mouawad, pour Anima (Leméac / Actes Sud).

 

Le Grand Prix du livre de Montréal

Petite histoire : Attribué depuis 1965 par la Ville de Montréal à « un auteur ou un éditeur domicilié sur le territoire de la Ville de Montréal ». Montant alloué 15 000 $.

Lauréats célèbres : Victor-Lévy Beaulieu, Michel Tremblay, Yves Beauchemin…

Faits intéressants : En 2009, grande première : un auteur de bande dessinée, Michel Rabagliati, s’est retrouvé dans la liste des finalistes pour Paul à Québec. C’est finalement Dany Laferrière, pour L’énigme du retour, qui a remporté la palme.

Lauréat 2011 : Élise Turcotte, pour Guyana (Leméac).

Lauréat pressenti pour 2012 : Marie-Claire Blais, pour Un jeune homme sans avenir (Boréal).

Le National Book Award

Petite histoire : Établi en 1950, ce prix américain couronne des auteurs américains (comme John Irving, William Faulkner et Annie Proulx) et est doté d’une bourse de 10 000 $.

Lauréat 2011 : Jesmyn Ward, pour Salvage the Bones (Bloomsbury USA).

Lauréat pressenti pour 2012 : Toni Morrison, pour Home (Knopf).

 

Le Nobel de littérature

Petite histoire : Créé en 1901 en Suède par l’inventeur de la dynamite, il est attribué à un écrivain ayant rendu de grands services à l’humanité. Il était doté d’une bourse de 10 millions de cou­ronnes suédoises (environ 1,5 million de dollars), mais on a revu cette année le montant à la baisse (8 millions de couronnes).

Faits intéressants : Jean-Paul Sartre n’en a pas voulu. Sainte-Lucie, le Guatemala et le Pérou figurent parmi les pays aux auteurs primés, mais pas le Canada.

Lauréat pressenti pour 2012 : Les Américains – qui n’ont pas reçu de Nobel de littérature depuis Toni Morrison en 1993 et critiquent les derniers lauréats (qui connaît le poète suédois Tomas Tranströmer, Nobel 2011 ) – espèrent que Philip Roth, considéré comme le meilleur écrivain américain vivant, sera bientôt nobélisé.

 

Le « Nobel québécois »
Le prix Gilles-Corbeil

Petite histoire : Surnommé le « Nobel québécois », c’est le plus important prix en argent. Montant alloué Sa bourse de 100 000 $, qui en fait l’un des prix les mieux dotés au monde,  provient de la Fondation Émile-Nelligan. Depuis 1990, il est remis tous les trois ans à un écrivain, citoyen du Canada ou des États-Unis, pour une œuvre écrite en langue française. Il récompense l’ensemble de l’œuvre d’un écrivain et non un ouvrage en particulier.

Lauréats célèbres : Anne Hébert, Marie-Claire Blais, Jacques Poulin…

Faits intéressants : Réjean Ducharme a été le premier lauréat du prix, en 1990. Mais même 100 000 $ n’auront pas suffi
à faire sortir l’auteur de sa cachette. C’est sa mère qui est allée chercher le chèque à sa place, pendant que sa compagne, Claire Richard, a lu un poème par lequel le romancier remerciait le public.

Lauréat 2011 : Victor-Lévy Beaulieu.

Lauréat pressenti pour 2014 : Michel Tremblay.

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