Commandité

Ce que les femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique aimeraient nous dire

Au Canada, une femme sur huit recevra un diagnostic de cancer du sein au cours de sa vie. On entend cependant peu parler du cancer du sein métastatique, la forme la plus avancée de la maladie. Des patientes nous racontent leur histoire pour changer cet état des choses.

Créé pour Parlons stade 4

La bosse qui est venue chavirer la vie d’Annick Gervais, 48 ans, avait la taille d’une pièce de dix cents. Celle de Marie-Geneviève Keddy, 44 ans, était bien dissimulée. Elle ne l’aurait peut-être pas trouvée si son amoureux ne l’avait pas remarquée. Karima Jessani, 59 ans, avait l’intention de parler de la sienne à son médecin, mais elle s’est dit que ça pouvait attendre.

Elles sont toutes trois atteintes d’un cancer du sein métastatique, aussi appelé cancer de stade 4, le stade le plus avancé de la maladie. Le diagnostic de Karima est tombé en 2013, et celui d’Annick et de Marie-Geneviève en 2019.

Métastatique signifie que les cellules cancéreuses se sont propagées à d’autres parties du corps, comme les poumons, les os ou le cerveau. Bien que la vie d’une personne qui reçoit un diagnostic de cancer du sein au stade précoce soit bouleversée, un dépistage rapide permettrait d’espérer une rémission et un rétablissement complet. Le cancer du sein métastatique, lui, demeure incurable. Entre 5 % et 10 % des cancers du sein nouvellement diagnostiqués sont métastatiques. En moyenne, quinze Canadiennes en meurent tous les jours.

Les clichés abondent lorsqu’il est question de cancer : on parle souvent de « guerrières » qui « luttent » contre la maladie. Mais que dire si le combat ne peut pas être gagné ? C’est un sujet qui met les gens mal à l’aise, et ils préfèrent donc ne pas en parler. C’est pourquoi il est important de lever le voile sur le cancer du sein métastatique, grâce aux récits de patientes comme Annick, Karima et Marie-Geneviève.

Le cancer du sein n’a pas d’âge

Annick a remarqué une masse sur sa poitrine pour la première fois en 2018, une année avant son diagnostic en 2019. Sa mère, morte d’un cancer du sein 17 ans plus tôt, avait une bosse semblable, presque au même endroit. Mais les médecins ne s’inquiétaient pas trop. Elle était jeune, 43 ans, et sa plus récente mammographie semblait normale.  Elle a dû insister à maintes reprises avant d’être vue par un spécialiste qui serait en mesure de poser le bon diagnostic.

« Est-ce que les choses auraient pu être différentes si on m’avait prise au sérieux dès le début ? Peut-être. C’est sûr que j’y pense », affirme-t-elle. « Je ne suis pas en colère. J’aimerais simplement que les patientes soient mieux écoutées, continue la mère de deux adolescentes. Il faut se faire confiance. Si on est inquiète, il faut insister », souligne-t-elle.

Photo: Stocksy

Des statistiques, pas un pronostic

Environ 30 % des femmes atteintes d’un cancer du sein métastatique sont encore en vie cinq ans après leur diagnostic, une statistique que Karima a vite appris à ignorer. « C’était horrible, je croyais qu’il me restait six mois à vivre », relate la mère de trois enfants, qui a appris qu’elle était atteinte du cancer il y a près de dix ans. « Chaque personne est différente, il existe des exceptions. J’en suis une », lâche-t-elle.

« Quand j’ai su que j’avais le cancer, j’ai demandé à Dieu de me permettre de voir mon fils finir son primaire. Il est maintenant à l’université. Je suis constamment en train de renégocier avec Dieu », s’exclame la pétillante brunette, qui sera grand-mère en juin.

Un mal invisible

Les effets secondaires que ressentent les trois femmes – comme les maux de dos, ou la fatigue écrasante qui leur colle à la peau – ne sont pas toujours visibles. C’est pourquoi il est préférable de ne rien présumer.  « Les gens disent que je n’ai pas l’air malade ou que je suis trop jeune pour avoir un cancer. Je le sais que je suis jeune ! » dit Marie-Geneviève. La meilleure chose à faire pour appuyer une amie atteinte d’un cancer du sein de stade 4 est donc d’abandonner toutes présuppositions, de lui poser des questions, et de l’écouter, tout simplement.

Des traitements, mais pas de remède

Des personnes bien intentionnées demandent à Marie-Geneviève si son traitement est terminé, sans comprendre que les soins qu’elle reçoit visent à améliorer sa qualité de vie, et non à la guérir. « Non, ce n’est pas fini. Ce ne sera jamais fini », lance Marie-Geneviève. « Les gens ne le font pas exprès. Ils ont de bonnes intentions, mais ils ne comprennent pas trop le cancer », déclare-t-elle.

Un soutien inestimable

Karima, Annick et Marie-Geneviève aimeraient que les femmes qui reçoivent un diagnostic de cancer du sein métastatique sachent qu’il existe de l’aide. Le site www.parlonsstade4.ca, par exemple, fournit une mine d’informations sur une variété de sujets, comme l’aide financière et les traitements disponibles. Par-dessus tout, Karima conseille aux nouvelles patientes de trouver un groupe de soutien. « Il faut se constituer un réseau, estime-t-elle. J’avais toute une pile de dépliants d’information, mais rien ne pouvait remplacer le fait de parler à quelqu’un qui avait vécu la même chose que moi. »

La recherche avance, mais il faut continuer

Les progrès médicaux réalisés au cours de la dernière décennie emplissent Karima, Marie-Geneviève et Annick d’un espoir prudent. « La recherche en matière de cancer du sein métastatique a énormément évolué au cours des dernières années. Il existe aujourd’hui toutes sortes de nouveaux traitements qui peuvent aider les patientes à vivre avec la maladie », déclare la Dre Mita Manna, oncologue au Centre du cancer de Saskatoon [Saskatoon Cancer Centre], et responsable de la Chaire de recherche provinciale de la Saskatchewan sur les tumeurs malignes du sein [Provincial Disease Site Chair Lead for Breast Malignancies]. Ces avancées incluent la pharmacothérapie ciblée qui peut être prise par voie orale à la maison ; l’immunothérapie ; la médecine de précision, qui propose un traitement adapté à chaque patient ; et des technologies d’imagerie diagnostique plus précises, par résonance magnétique (IRM), par exemple, qui permettent de détecter les tumeurs plus rapidement.

Si la recherche est cruciale, notre capacité à reconnaître le cancer l’est tout autant, comme le souligne la Dre Manna. « Nous avons fait tellement de progrès, mais il est essentiel de continuer à tenir ces conversations, et de sensibiliser la communauté », soutient-elle.

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