Années 1960
Chiffons, journaux: les femmes se débrouillent pour éponger leur sang menstruel. Certaines optent pour la «ceinture sanitaire»: portée à la taille, elle permet de fixer une longue serviette qui va du nombril aux reins. L’arrivée des serviettes adhésives (Stayfree,1969) résout bien des tracas.
Années 1970
En 1972, la National Association of Broadcasters permet finalement la diffusion de messages publicitaires sur les produits menstruels à la télé américaine. L’utilisation du tampon et des serviettes jetables se généralise. Playtex lance ses tampons parfumés et avec applicateur plastique.
Années 1980
Une épidémie de cas de syndrome du choc toxique – dont 38 fatals – aux États-Unis met en cause les tampons superabsorbants Rely. Les fabricants de tampons abandonnent les composants jugés toxiques et doivent désormais inclure dans la notice d’emballage un avertissement sur les risques d’un port prolongé.
Années 1990
À la télé, c’est avec un improbable liquide bleu qu’on illustre les prouesses d’absorption des serviettes hygiéniques. Dans les magazines féminins, les publicités de Tampax optent pour la pédagogie: « Non, un tampon ne vous fera pas perdre votre virginité. »
Années 2000
Protège-dessous noirs, pour strings, dotés d’ailes transparentes… Les consommatrices ont le choix parmi une panoplie de modèles. De nouveaux contraceptifs hormonaux offrent la possibilité d’espacer ses règles, ou de carrément les supprimer.
Années 2010
Pour le bien de la planète et de leur portefeuille, de plus en plus de femmes adoptent la coupe menstruelle (pourtant brevetée en 1937!). En silicone de qualité médicale, elle peut servir pendant plus de 10 ans.
Années 2020
Tampons en coton bio, culottes menstruelles, serviettes lavables qu’on achète ou qu’on fabrique soi-même à l’aide d’un tuto YouTube: le virage écolo se poursuit!
Stop à la précarité menstruelle
Tampons et serviettes devraient-ils être gratuits ? L’idée fait son chemin. Car le manque d’accès aux produits hygiéniques – ou précarité menstruelle − n’est pas sans conséquence. En Grande-Bretagne, on estime que plus de 137 000 adolescentes ont manqué l’école en 2017 parce qu’elles ne pouvaient se procurer des protections adéquates. Il y a donc ici des enjeux économiques, mais aussi carrément d’égalité. Londres s’est d’ailleurs engagée à éradiquer la précarité menstruelle d’ici 2030, et distribue depuis cette année des produits hygiéniques gratuits dans les écoles du pays. Au Canada, où les produits menstruels ont été détaxés en 2015, la Colombie-Britannique est devenue l’an dernier la première province à établir la gratuité dans les écoles publiques – une décision « évidente qui aurait dû être prise il y a longtemps », dixit son ministre de l’Éducation. De son côté, le gouvernement Trudeau envisage d’obliger les employeurs sous juridiction fédérale à offrir des produits hygiéniques à leurs employées. Des initiatives applaudies par le Réseau québécois d’action pour la santé des femmes, qui a lancé cette année la campagne de sensibilisation Rouge pour changer les perceptions entourant les menstruations. « Redouter, voire détester une fonction naturelle de son corps tous les mois parce qu’on n’a pas les moyens, c’est terrible », s’indigne Élise Brunot, chargée des communications. En plus d’aider directement les femmes les plus vulnérables, la distribution de protections hygiéniques pourrait contribuer à normaliser un processus biologique encore honni, estime le Réseau. « C’est simple, ça devrait être accessible partout, comme le savon! » lance sa directrice, Lydya Assayag.
7 Canadiennes sur 10 ont déjà dû s’absenter de l’école, du travail ou d’une activité en raison de leurs menstruations. (Source : Plan International Canada)
Étudiantes au front
Saluons le travail de Monthly Dignity, un organisme créé en 2017 par des étudiantes de McGill, qui a fourni plus de 134 000 produits d’hygiène féminine à des Montréalaises sans-abris ou en situation de précarité. « Quand on évoque l’itinérance, les gens pensent à donner des vêtements ou de la nourriture, mais jamais des tampons et des serviettes hygiéniques », souligne la cofondatrice Chloé Pronovost-Morgan. La jeune femme de 24 ans est consciente de se frotter à deux grands tabous, les menstruations et la pauvreté. Certaines femmes vont se rabattre sur des chaussettes, du papier de toilette replié 50 fois… « Cela met à risque leur santé physique et leur santé mentale, parce qu’elles se sentent dépossédées d’une dignité fondamentale », dit-elle.
Les indiscrétions des applications
Devrais-je mettre des tampons dans mon bagage ? À quel moment mes chances de tomber enceinte sont-elles le plus élevées ? Pour mieux comprendre leur corps, des millions de femmes utilisent des applications de suivi menstruel. Or, un rapport de Privacy International a révélé l’an dernier que certaines applications transmettaient à Facebook ainsi qu’à des tiers les données pour le moins intimes de leurs utilisatrices. Ces dernières étaient ensuite exposées à des publicités sur mesure – évidemment à leur insu. L’ONG a épinglé les applis Maya et MIA, qui fournissaient systématiquement à Facebook les précieux renseignements qu’elles recueillent (intensité du flux menstruel, dates des relations sexuelles, protégées ou pas…). Un rappel que les femmes, notamment celles qui tentent de concevoir, constituent une clientèle très prisée des entreprises, et que celles-ci usent de méthodes pas toujours irréprochables pour l’atteindre.
30 millions : Nombre d’utilisatrices actives par mois de l’application de suivi menstruel Flo.