Entrevues

Arianna Huffington : de nouveaux médias… et un GPS pour l’âme!

Arianna Huffington veut transformer les médias, motiver les femmes et nous inciter à dormir plus!

Victor Diaz Lamich

Depuis le 8 février, le Québec compte un nouveau quotidien sur le Web : Le Huffington Post Québec. C’est la plus récente édition du Huffington Post, média créé en 2005 aux États-Unis et qui porte le nom de sa fondatrice : Arianna Huffington. Lancé uniquement sur le Web, le Huffington Post a connu une croissance phénoménale, surpassant même, en lectorat et en visibilité, les sites Web de médias respectés et établis depuis longtemps, dont le New York Times. Le Huffington Post américain s’est imposé ainsi grâce à une formule particulière : il comporte une certaine quantité de renseignements et de nouvelles, mais rassemble surtout des blogueurs de tous les horizons. Des auteures comme Nora Ephron (qui a écrit des scénarios de films tels Quand Harry rencontre Sally et Le mystère Silkwood), des acteurs tels Robert Redford, des activistes politiques tels Robert Kennedy. Depuis, le Huffington Post a lancé des éditions au Canada anglais, en France, puis au Québec, en implantant la même formule. Au Québec, on trouve parmi les blogueurs des personnalités comme la comédienne Charlotte Laurier, l’animatrice et productrice Anne-Marie Withenshaw et les députés Maka Kotto et Fatima Houda-Pépin. Arianna Huffington a toujours souligné qu’elle « voulait amener dans les médias des voix que l’on entendait peu autrement ». Elle ne dédaigne pas non plus de jouer sur la controverse et le vedettariat : ainsi, en France, la rédactrice en chef du Huffington Post est nulle autre qu’Anne Sinclair, journaliste-vedette de la télé et épouse du maintenant controversé Dominique Strauss-Kahn.

Avant même de fonder le Huffington Post, Arianna Huffington était déjà une personnalité en vue aux États-Unis. D’origine grecque, née Arianna Stassinopoulos, elle a épousé, en 1986, le politicien Michael Huffington (républicain élu à la Chambre des représentants, en 1992, candidat défait pour le poste de sénateur de la Californie, en 1994), dont elle a divorcé, en 1997. Elle s’est elle-même présentée en politique, en 2003, comme candidate indépendante au poste de gouverneur de la Californie (remporté par Arnold Schwarzenegger) et est une commentatrice et chroniqueuse politique en vue. Elle a écrit 13 livres, dont des biographies de Picasso et de Maria Callas, et des ouvrages sur des sujets qui lui tiennent à cœur. Dans On Becoming Fearless in Love, Work and Life (non traduit en français), elle décortique les défis particuliers que rencontrent les femmes. Son plus récent livre s’intitule L’Amérique qui tombe : comment les hommes politiques abandonnent la classe moyenne et trahissent le rêve américain. Lors de son passage à Montréal pour le lancement du Huffington Post Québec, Arianna Huffington a partagé avec Châtelaine non seulement ses opinions sur les blogues, les médias, la place des femmes, mais aussi sur l’importance d’une bonne nuit de sommeil!

Qu’est-ce qu’un bon blogue selon vous?
C’est une bonne conversation, quelque chose qui peut vraiment engager les lecteurs. Et cela, autant sur des sujets importants tels l’état de l’économie que des choses qui peuvent de prime abord paraître futiles comme : faut-il porter des talons hauts ou des souliers plats? C’est un endroit où l’on peut trouver diverses façons de se faciliter la vie, de mieux comprendre des sujets comme la santé, la vie de famille, le stress ou encore le sommeil. Lire un bon blogue, c’est comme écouter un ami et engager une conversation avec lui.

Quels médias consommez-vous et quelles sont vos sources d’informations préférées?
Je commence et je finis ma journée, bien sûr, avec les éditions du Huffington Post de différents pays. Puis je visite les sites de médias « traditionnels » tels le New York Times, le Wall Street Journal, et au Canada, le Globe and Mail, The Gazette. Je vais aussi visiter beaucoup de petits blogues, moins connus, de la même façon que je vais suivre toutes sortes de gens sur les médias sociaux comme Twitter ou Google Places… surtout des jeunes. Cela m’aide à rester en lien avec ce que les jeunes font et ce qui les intéresse. Je vais beaucoup voir les sites Web d’universités. D’ailleurs, c’est une excellente source pour repérer des gens intéressants à employer. Mes deux filles vont à l’Université Yale, et je lis beaucoup de blogues rédigés par des jeunes qui fréquentent cette université.

Vous vous êtes beaucoup prononcée sur les défis associés au fait d’être une femme, tant en politique qu’en affaires et dans l’univers des médias. Qu’est-ce que les femmes ont à apporter de particulier, surtout dans le monde d’Internet et des nouvelles technologies, tellement masculin au départ?
Nous attendons maintenant, de la part d’Internet, plus de maturité : on veut y trouver un endroit moins désordonné, moins dominé par les attaques ou les insultes. On veut un Internet plus humain, moins bruyant, plus intime. Et les femmes ont un rôle important à jouer pour humaniser Internet. Depuis l’an dernier, le Huffington Post a connu une augmentation de 54 % du nombre de visiteuses féminines. Et nous avons lancé plusieurs sections sur des sujets tels la vie de famille, la santé, le mariage…

Quel conseil donneriez-vous aux femmes pour mieux réussir dans la vie?
La première chose, c’est de ne pas craindre d’échouer! « Échouer » n’est pas le contraire de « réussir ». Un échec est une étape vers la réussite. En général, les femmes craignent davantage l’échec que les hommes, et à cause de cela, ont plus tendance à fuir le risque. Pour avoir une chance de réussir ce qui nous tient vraiment à cœur, il faut être prête à se tromper.


Vous parlez, chaque fois que vous en avez l’occasion, de l’importance du sommeil et des ravages causés par le manque de sommeil. Pourquoi cette question vous tient-elle tellement à cœur?

Parce que je me suis déjà littéralement évanouie d’épuisement! C’était il y a trois ans et demi. Je suis une experte quant aux dommages que peut causer le manque de sommeil et le prix à payer pour cela. Et si je ne me forçais pas moi-même à en parler chaque jour, je pense que je serais morte. Je ne m’écoute pas encore autant que je le devrais à cet égard, mais j’y arrive mieux maintenant. Les données médicales sont là, et nous n’avons pas cessé de couvrir cela en profondeur sur le Huffington Post : le manque de sommeil a des répercussions sur notre santé, notre niveau de stress, notre énergie, notre créativité. Et il y a un lien entre le manque de sommeil et l’obésité.

N’est-ce pas un paradoxe, étant donné que la popularité d’Internet est justement un des facteurs qui contribue au fait que les gens dorment moins et veulent toujours rester « connectés »?
C’est justement pour cela que les gens impliqués dans les technologies et dans Internet doivent être les premiers à mettre de l’avant l’importance, pour les humains, de « débrancher » de temps en temps. C’est encore plus important étant donné que le monde devient de plus en plus connecté. Je travaille même à une technologie pour nous aider à décrocher! Il y a des gens, au Huffington Post, qui travaillent à développer une application pour iPhone et les autres appareils mobiles, qui va s’appeler « GPS pour l’âme ». On espère avoir mis cela au point d’ici un an. La possibilité de connaître, en touchant votre écran, des données comme votre rythme cardiaque, votre pression sanguine, etc., existe déjà. Et on veut mettre au point une application qui pourra vous avertir quand votre niveau de stress sera trop élevé, quand vous serez sur la mauvaise voie.

Quelques blogueurs et blogueuses à suivre sur Le Huffington Post Québec :

Anne Marie Withenshaw, animatrice de télévision et productrice

Jocelyne Robert, auteure et sexologue

Francine Pelletier, journaliste, féministe et documentariste

Martine St-Victor, entrepreneure, fondatrice de Groupe Milagro Atelier de relations publiques

Guillaume Beauregard, membre du groupe musical les Vulgaires Machins

Guillaume Déziel, gérant du groupe musical Misteur Valaire

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