Entrevues

Le Paris d’Anne Hidalgo

On la traitait de nunuche dépourvue de charisme et de sens politique. Elle est maintenant la première femme de l’histoire élue mairesse de Paris.

FRANCE-POLITICS

C’était la bataille de sa vie. La dauphine désignée pour succéder au maire sortant, Bertrand Delanoë, l’a remportée haut la main au second tour, devant sa coriace et bourgeoise adversaire Nathalie Kosciusko-Morizet (NKM). Une victoire incontestée le 5 avril pour la socialiste de 54 ans, alors que tout le reste de la France (ou presque) basculait à droite aux dernières élections municipales.

Avec son calme imperturbable, sa détermination et sa chaleur toute maternelle, l’ex-première adjointe au maire a mené une campagne rassembleuse, sans faute ni éclat. « Une lutte au féminin entre plusieurs concurrentes, comme on l’observe à New York et à Los Angeles », s’est réjouie la féministe et mère de trois enfants sur le plateau de l’émission On n’est pas couché, sur France 2.

Elle aurait pu devenir ministre – François Hollande le lui a proposé – mais a préféré la mairie de Paris, « le plus beau mandat qu’on puisse imaginer dans la République ». Elle aime Paris pour l’avoir choisi, il y a 30 ans. Il fallait la voir défendre sa ville chaque fois que sa jeune rivale NKM la comparait désavantageusement à Londres ou à Berlin. « Paris est un leader en matière de start-ups ; je veux soutenir la créativité et l’innovation », a-t-elle répété sur toutes les tribunes.

Fille d’immigrés espagnols républicains, elle est née en banlieue de Cadix – seule ville d’Espagne à avoir résisté au siège de Napoléon ! – mais a grandi à Lyon, dans une cité HLM avec salle de bains sur l’étage et zéro aire de jeux. Quand elle monte dans la capitale, à 24 ans, la nouvelle inspectrice du travail se découvre des affinités avec les luttes syndicales et le Parti socialiste.

Elle y fait son entrée officielle en 1997, et accède vite aux cabinets de la ministre de l’Emploi, Martine Aubry, puis de la secrétaire d’État aux Droits des femmes, Nicole Péry.

En 2001, elle devient numéro deux du maire de Paris, Bertrand Delanoë. Conciliation travail-famille, égalité homme-femme, formation professionnelle, culture, urbanisme, architecture… Elle se fait la main jusqu’à ce que son mentor décide de lui passer le flambeau. C’était il y a un an et demi. Commence alors la course à la mairie pour cette « fille du peuple qui se balade en métro », comme son équipe se plaît à la présenter. Ses opposants, eux, la raillent et l’appellent « la concierge » (un clin d’œil acerbe aux immigrés ­espagnols des loges des immeubles). Qu’importe, Anne Hidalgo pose brique par-dessus brique.

Son livre Mon combat pour Paris, lancé en pleine campagne, détaille son programme, frappé du slogan « Paris qui ose ». La qualité de l’air, l’avenir des jeunes, l’intégration des immigrés, la solidarité… tout cela lui tient à cœur. Mais au sommet de ses priorités : le logement social. « Plus des deux tiers des Parisiens y sont admissibles », martèle-t-elle sans relâche. Le projet qui anime particulièrement « madame la maire », c’est la création du Grand Paris en 2016, qui englobera la capitale intra-muros et les villes périphériques – fusions municipales à la parisienne. Souhaitons qu’elle ne s’y casse pas la gueule comme certaines politiciennes québécoises…

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