Fête champêtre à la « maison du 7 »
C’est dans une maison plus que centenaire de Fortierville, dans le Centre-du-Québec, que les Delisle-Chandonnet se retrouvent chaque été. Une demeure qui a toute une histoire, dit Lucie Delisle, 47 ans. « Mon arrière-grand-père l’a construite il y a 130 ans. Ma grand-mère et ma mère y sont nées. Et c’est là aussi que mes parents sont tombés amoureux. De tout temps, elle a été le théâtre de gros partys de famille. »
Au tournant de l’an 2000, son petit-cousin Stéphane, descendant direct des premiers occupants, a eu l’idée d’étendre les rassemblements à toute la lignée. Depuis, une grande fête champêtre se tient chaque début juillet à la maison du 7 – comme on l’appelle dans la tribu, de l’ancien numéro de rang où elle se trouve. « J’ai commencé à y aller il y a six ans, quand papa a cessé de conduire, raconte Lucie. Je ne voulais pas qu’il rate la fête. C’est le moment où il est le plus heureux. Je passe ma soirée à le regarder chanter et taper du pied. Et moi aussi ça me rend heureuse. »
Le samedi du jour J, Lucie arrive de bonne heure, avec sa fille, Janelle, 13 ans, son père, Léo, et Marc, son conjoint. Les festivités commencent officiellement l’après-midi, mais une partie de la gang a débarqué la veille ou l’avant-veille pour tout installer – le barbecue pour le lunch, la table à méchoui pour le souper, le chapiteau, le filet de volleyball, la piscine gonflable, les feux d’artifice…
Certains couchent au village. D’autres plantent leur tente ou leur roulotte autour de la maison, décorée de boules et de guirlandes comme pour le Noël des campeurs ! « Il y en a toujours un qui se déguise pour animer et faire rire le monde », décrit Lina, qui a repris avec l’une de ses sœurs la maison du 7, convertie en résidence secondaire. La palme de l’animation revient à son neveu Stéphane, qui enfile son costume d’Elvis pour l’occasion et entonne La poule à Colin – « Tu n’entends pas mon lanliiiire » –, tandis que les matantes lui passent le foulard autour du cou !
On s’donne la main, on s’embrasse, on s’informe des exploits du petit dernier et de la santé des doyens. « Le soir, les jeunes jouent aux cartes dans la cuisine d’été ou se rassemblent autour du feu. Nous, on danse et on chante sous le chapiteau », ajoute Lina. La musique et les chansons à répondre, ça fait partie de la culture familiale. « Quand j’arrive là, j’ai l’impression de baigner dedans, dit Lucie. Ma jumelle Jacinthe et moi, on chante avec papa au micro. Il est tout fier de voir la tradition se perpétuer à travers ses enfants. »
Ce dernier se plaît à répéter que Wilbert et Laurette, grands-parents de Stéphane et dernier couple à avoir habité la maison, ont fait une « bien belle job » : avoir transmis à leur postérité – 10 enfants, 21 petits-enfants, 35 arrière-petits-enfants et 3 arrière-arrière-petits-enfants, sans compter les conjoints ! – un modèle de clan uni, accueillant et chaleureux. « Peu de familles réussissent cet exploit, estime Lucie. Leur secret, je crois, c’est l’amour de la vie qu’ils ont su communiquer. Je veux participer à cette fête le plus longtemps possible, même quand papa ne sera plus là. »