« Dis, m’man, tu veux m’accompagner à Paris? »
Un an aujourd’hui que je suis revenue de ma longue pérégrination en Europe avec ma maman, Sylvie. Je lui avais fait une petite surprise, comme ça, sans crier gare. Le jour de la fête des Mères.
Je pense que j’avais un peu envie de me faire pardonner. Pour toute ma crise d’adolescence digne d’une fille indigne.
Ça fait un an, donc. Que je suis revenue avec elle. Et tout cela a été bien formateur. Nous avons été confrontées à la réalité qui vient à nos âges respectifs. Et ma mère m’a donné un cours 101 tellement instructif sur la perception de soi passé 50 ans. Dans son cas, ça n’avait rien de romantique. Comment vit-on avec l’acception des traits qui changent quand la société nous dit qu’il faut être jeune et sexy pour être belle? Wôw, menute.
Sa réalité de femme de 56 ans m’est apparue comme évidente, limpide alors que ce n’était que chimère auparavant. Son message était clair : fille, profite de tes jeunes jours, parce que…
Parce que c’est ben, ben dur d’avoir l’air de son âge à 56 ans. C’est qu’on te regarde plus un moment donné. Ish.
Je la revois m’accompagner rue St-Guillaume en plein coeur du sixième arrondissement comme une fillette qui débute la maternelle. Mais j’ai aussi souvenir de la voir se regarder dans le miroir. Son regard était celui d’une femme soucieuse, inquiète, dérangée par le reflet de la glace. «M’man, arrête de te traiter comme un détritus.»
Ça me rend profondément triste de penser que la vieillesse égale le rejet. Attends, un peu… C’est quoi cette aliénation? Le quotidien d’une quinquagénaire peut être épineux par ce que la société nous envoie comme message: «oubliez ça, vous êtes passées date. Les femmes âgées, ça pogne pas.». Comme si être vieille n’égale pas être sexy, comme si, donc, être vieille n’égale pas être belle. Franchement.
Cette fin de semaine lors du Salon international du livre de Québec où je présentais mon livre, La revanche des moches, plusieurs femmes, babyboomers, sont venues à ma rencontre. L’une d’entre elle m’a fait une révélation désarmante.
«Vous savez, je n’existe plus dans le regard des autres depuis dix ans.» Ayoye. Je refuse de prendre ça pour du cash.
Alors oui, Louise, tu fais bien de refuser que beauté égale nécessairement séduction sexuelle et jeunesse. Je t’appuie. Rebellez-vous!
Pis, je te le dis… moi je te trouve cute avec tes petits cheveux blancs qui commencent à se pointer dans ta tignasse noir jais. Et je trouve aussi belle ma maman avec ses petites pattes d’oie.
Pis fuck les talons haut… sauf une fois dans un lancement.