Léa & Louise

Vieux pleins ou bébés gâtés?

Crois-tu que les baby-boomers t’ont volé ton avenir?

Lea et Louise hires

Chère Léa,

Notre premier ministre tout neuf a commencé par parler d’austérité. Puis, probablement parce que, ça faisait un peu…  austère, il a opté plutôt pour la rigueur. C’est bien, la rigueur. Ça fait sérieux.

Dans tous les cas, on n’a pas fini de parler de dette, de déficit, de régimes de retraite dans le rouge et de jeunes familles dans le trouble.  Ce qui m’amène à la question : crois-tu, toi, que les baby-boomers ont volé l’avenir de leurs enfants ?

Avril-1-Couverture_avril 012Il y a quelques semaines, mes amis de L’actualité ont publié un grand dossier qui tente de répondre à cette question. En allant plus loin que les impressions et les clichés de vieux pleins ou de bébés gâtés.

Projet ambitieux pour lequel ils ont réquisitionnée deux jeunes économistes et formé deux comités de sages. Un constitué de vieux et un autre de jeunes. Tu peux aller voir ce que ça donne ici.

Toi et moi ne sommes pas du même côté de cette clôture générationnelle. Penses-tu qu’on puisse arriver à nous entendre ? Je suis prête à tout faire pour qu’on y arrive.

Pour bien regarder cette réalité, prenons un peu de recul.

Ma grand-mère, née à la toute fin du 19e siècle (soit un peu plus de 100 ans avant toi) appartenait à cette cohorte qu’on a baptisée The Greatest Generation. Voici sa vie résumée en quatre points:

  • Elle a eu 20 ans et s’est mariée pendant la première guerre mondiale (1914-1918), une boucherie sans nom qui a fait presque 10 millions de morts.
  • L’armistice de 1918 n’était pas encore signée que frappait la grippe espagnole, une effroyable épidémie de H1N1 qui, selon des estimés récents, a tué 100 millions de personnes. C’est considéré comme la pire pandémie de toute l’histoire.
  • A peine 10 ans de répit avant le krach de 1929 et la dépression économique qui a suivi. Une autre décennie, de misère et de chômage celle-là, sans aide sociale ni aucun programme social.
  • La misère de la Grande Dépression a été remplacée par celle de la Deuxième Guerre mondiale.

Ma mère, elle, appartient à la Génération silencieuse. Elle a grandi pendant la Deuxième Guerre mondiale, n’a pas pu étudier aussi longtemps qu’elle l’aurait voulu car l’éducation des filles n’était pas gratuite, contrairement à celle des garçons. Veuve à 37 ans, elle est devenue chef de famille monoparentale 30 ans avant son temps à une époque où personne n’avait même imaginé les concepts de services de garde ou d’équité salariale. Le féminisme contemporain, c’est cette génération qui l’a inventé et fait progresser. Elle fait aujourd’hui partie de cette cohorte de vieilles dames qui vivent décemment en comptant leurs sous et en restreignant leurs besoins.

Méchante baby-boomer, j’ai eu plus de chance. Bonne éducation, bons soins de santé, début du féminisme. Une pleine et une profiteuse ? Tu me diras. Ma génération n’a jamais connu les programmes arts-études et sports-études. Ni les voyages dans le sud ou en Europe pendant les vacances scolaires. Nous sommes arrivés sur le marché du travail à un moment où le chômage chez les jeunes était plus élevé qu’aujourd’hui. Oui, les maisons étaient moins chères, mais les taux d’intérêt hypothécaires tournaient autour de 12 % et on a même vu 18 %. Les revenus : les femmes de ma génération ont eu des congés de maternité minimaux (18 semaines en 1978), ni CPE, ni services de garde. Elles quittaient souvent leur emploi le temps d’élever la marmaille. Et l’équité salariale se faisait toujours attendre. La retraite en or ? Ça n’existe pas pour la majorité d’entre elles. Et je ne crois pas que l’État maintienne des prestations de millionnaires si l’économie ne le permet pas.

L’environnement, la dette, l’état des infrastructures. Il reste bien des aspects à cette question. J’attends ta réponse et on continue notre conversation. D’accord ?

Louise

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