Au Québec, la tradition veut qu’on offre un petit bonnet à chaque nouveau-né. Et si on en tricotait un en guise de bienvenue aux 25 000 réfugiés attendus chez nous ?, s’est dit Danielle Létourneau. Depuis sa cuisine du quartier Côte-des-Neiges, à Montréal, l’auteure et comédienne a lancé l’initiative « 25 000 tuques » sur Facebook, devenue virale en un rien de temps ! « Ma grande fierté, c’est d’avoir donné l’occasion aux gens de bonne volonté de passer à l’action et d’envoyer un message d’espoir aux nouveaux arrivants. » Jusqu’ici, environ 3000 tuques ont été confectionnées. Des tricotons s’organisent un peu partout à travers la province et les points de dépôt se multiplient. Le musée McCord s’est offert pour centraliser les dons à Montréal et les acheminer aux réfugiés, de concert avec la Croix Rouge.
Une trentaine de personnes ont participé à l’atelier de tricot du 11 décembre, au Musée McCord. Des tricoteuses expertes ou apprenties, Québécoises de souche ou d’adoption, unies pour la même cause. « Je me suis remise au tricot pour aider mes compatriotes, dit Houdad, d’origine syrienne. Je savais que les Québécois étaient généreux, mais pas à ce point ! Ça me touche. » Farnaz aussi éprouve de la gratitude envers les participantes. Iranienne d’origine, elle a appris à tricoter de sa mère. « Je fais ce que je peux ! », dit-elle en riant. À la table du fond, Isabelle en était à sa première tuque deux couleurs. « Ça m’attriste que des gens soient obligés de quitter leur pays en laissant tout derrière. Ils amènent ici leur culture, c’est tant mieux pour nous ! »
Widad (à gauche) est d'origine syrienne. Aïcha (à droite) est marocaine et séjourne à Montréal. Les deux se sont rencontrées à travers les différentes activités du mouvement « 25 000 tuques », dont l’atelier de tricot du Musée McCord. Et elles sont devenues amies. « Lorsque j’ai vu l’annonce sur Facebook, ça m’a fait chaud au cœur, dit Aïcha. Je me suis lancée avec ma laine et mon crochet. » Elle en est à sa 41e tuque ! Widad en a complété une. « Aïcha me montre le crochet. Tout le monde se donne des trucs et même les gars qui ne savent pas tricoter embarquent ! » Widad souhaite que cet esprit d’entraide demeure. « Après une période de grande noirceur, le Canada est en train de renaître et de redonner l’espoir aux autres pays. »
Chaque bonnet comporte un petit mot personnalisé, et parfois même les coordonnées de son créateur. On y glisse aussi une lettre plus « officielle » écrite en arabe, français et anglais, qui explique la symbolique du projet « 25 000 tuques » .
Ce mot écrit en arabe par le calligraphe québécois d’origine libanaise Burhan Zahrai a été tracé à la demande de son amie Anouk. « Plusieurs réfugiés ne lisent pas le français, observe-t-elle. Je voulais m’assurer que tous puissent comprendre le message d’amour qu’on leur envoie. »
Nathalie (à droite) tricote depuis longtemps, et pour différentes causes. Celle-ci lui tient particulièrement à cœur. « L’ennemi numéro un au Québec, c’est le froid ! Je suis ici pour souhaiter la bienvenue aux réfugiés et les aider comme je peux. » C’est Catherine (à gauche) qui lui a fait suivre l’info sur le tricoton organisé au musée McCord à partir de Facebook. Elle-même a formé le club de tricot Les Entremaillées avec une amie en apprenant l’initiative de Danielle Létourneau sur les réseaux sociaux. « On s’est tout de suite senties interpelées, dit Catherine. Je salue Danielle pour ce beau geste. »
Pour celles et ceux qui souhaitent s’engager, mais n’ont aucune dextérité : l’activité « assemblage » consiste à trier les tuques, y joindre les petits mots et les empiler dans des boîtes. Aussi, il manque d’écheveaux et de pelotes de laine. Les dons sont appréciés ! Le prochain tricoton du Musée McCord se tiendra le 15 janvier de 13h à 18h, à l’Atrium.
Devant le succès inattendu de l’initiative, quatre bénévoles se joints à Danielle Létourneau pour lui prêter main-forte. « J’ai créé un monstre en laine ! », plaisante-t-elle. Lucie Royal (à gauche) se charge de la logistique et fait le lien avec les quatre points de dépôts principaux – Musée McCord (Montréal), Musée de la civilisation (Québec), Musée des arts de Joliette, Musée des religions à Sherbrooke. Jérôme Dussot agit comme webmestre et photographe. Laetitia (à droite) communique avec les organismes qui distribuent les tuques, dont La Croix Rouge. Cathy Lucas répond au flot de messages et coordonne les activités des régions, et Jean-Daniel Nicol traduit les textes en anglais (tous deux sont absents de la photo). « Il y a une chimie entre nous, même si c’était la première fois qu’on se rencontrait en personne, au musée McCord », s’enthousiasme Lucie.
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