Culture

Blanc de Deni Ellis Béchard: la quête de l’autre, la découverte de soi

S’aventurant en terrain glissant, Deni Ellis Béchard signe un roman prodigieux.

Photo: iStock.com/Guenterguni

L’histoire

Dans l’avion qui l’emmène au Congo, un journaliste fait la rencontre d’une jeune anthropologue. Lui est sur les traces d’un Américain «qui vit dans la forêt pluviale depuis trois décennies et qui a fini par s’ensauvager». Elle veut retrouver une enfant de la rue, «blonde aux yeux bleus convaincue qu’un démon l’a transformée en Blanche». Leurs recherches seront semées d’embûches, la réalité possédant un double-fond dont les codes sont inaccessibles aux non-initiés ou hors de prix.

Les personnages

Béchard, journaliste aux prises avec ses propres fantômes, a déjà séjourné au Congo et y revient pour écrire l’histoire d’un homme à la réputation douteuse et difficile d’accès. Richmond Voos, seigneur de guerre, règne en maître sur son territoire, où il érige des parcs nationaux. Terra, écologiste intrépide qui œuvre seule auprès d’une espèce de gorille rare et qui paiera cher son indépendance. Sébastien, cuisinier de la jeune femme, vieil Africain sage qui en a trop vu pour juger quiconque. Sola, qui croisera un moment la route de Béchard; ensemble, ils tenteront de retrouver Delia, la fillette blanche. Bram Rees, collègue anthropologue de Sola, étudie les enfants de la rue comme «sujets d’expérience». Thomas Omega, pasteur, deviendra ministre de l’Environnement.

On aime

Portée par un style imagé, l’histoire, à la fois thriller politique et voyage initiatique. Les personnages riches, pétris de contradictions, la probité de l’auteur, qui cerne avec une grande sensibilité le racisme blanc et noir. Et pose la quasi impossible équation de l’appropriation culturelle.

Photo: Julie Artacho

L’auteur

Deni Ellis Béchard

Naissance en 1974 en Colombie-Britannique. Père gaspésien et mère américaine qu’il suivra en Virginie où il se heurtera au racisme ordinaire. Plus tard, il retrouvera son père, criminel reconverti en poissonnier. Journaliste engagé, il a voyagé dans plus de 60 pays. Béchard le reconnaît, «il ne tient pas en place». Châtelaine l’a joint à New York, où il attendait la publication de White. «Est-ce que je ne répète pas des stéréotypes?» se demandait-il à l’heure des affrontements au sujet de l’appropriation culturelle. L’auteur a donné son nom au narrateur «pour le placer dans une situation d’inconfort, montrer ses lacunes, car je ne voulais surtout pas qu’il soit le sauveur des bons Blancs versus les méchants Noirs». Il lui prête aussi quelques souvenirs d’enfance. «Le narrateur a grandi dans un milieu raciste et il essaie de voir le monde sans ce filtre…» Béchard a décapé des couches de culture pour s’en débarrasser et a placé son roman sous l’égide du chef-d’œuvre de Joseph Conrad, Au cœur des ténèbres. Pour mémoire…

Blanc, Deni Ellis Béchard, Éditions Alto, traduit de l’anglais par Dominique Fortier, 230 pages.

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